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Nature Humaine (amocalypse)
Survivalisme>Récits>Le passage

Première version: 2014-10-18
Dernière version: 2018-05-21

Le passage

Sommaire de la page


Préambule

Rappel des avertissements préalables sur les sources des infos de cette partie.

C'est le premier livre de Nancy sur le sujet, écrit en 1997 et remanié en 2009. Sur le site de Zetatalk français, il n'y a que la première version 1997 de traduite. Vous trouverez ici la version 2009 inédite en français.

Il s'agit d'un texte résumant dans les grandes lignes ce qu'il va se passer lors de l'apocalypse, avant, pendant, après. C'est donc un schéma directeur qui peut grandement vous aider dans votre préparation, tout en vous aidant à comprendre la réaction des gens qui n'auront pas été préparés.

Texte original

J'ai mis dans un fichier texte le texte d'origine en anglais en correspondance avec le texte traduit.

Comme le texte original est un scénario de film, il y a pleins de descriptions inutiles et de redondances. C'est pourquoi ci-dessous vous trouverez une version simplifiée sous forme de nouvelle, car après tout seul l'enchaînement des péripéties et le ressenti des personnages est important.

C'est de la survie axée sur le peuple américain, les choses seront légèrement différentes pour la France.

Résumé du livre

Le passage suit plusieurs petits groupes de personnes qui subissent le basculement de pôle (pole shift) et sont progressivement mis en contact avec des ET (Extra-Terrestres) amicaux.

Danny, un jeune journaliste, se retrouve confronté, lorsqu'il tente de publier l'information provenant d'un observatoire, à la dissimulation gouvernementale (cover-up) sur cette planète qui s'approche. Danny apprends plus tard que cette planète, Nibiru, provoque un pole-shift terrestre, à savoir un basculement des pôles géographiques (c'est à dire un basculement de l'axe de rotation de la croûte terrestre).

Découragé par le refus de son rédacteur en chef, il part faire du camping avec sa petite amie Daisy. Rencontrant un autre couple, Frank et Jane, dans les Rocheuses, ils discutent des théories du professeur Isaac et de la congruence entre les prophéties, les légendes et les preuves géologiques.

Un autre groupe est présenté, une famille d'éleveurs. Big Tom, sa femme Martha et son jeune fils Billy (ces 2 derniers étant des contactés Zétas, un type d'ET amical).

Le basculement des pôles s'effectue, précédé par des jours d'obscurité, de poussière rouge et une rotation terrestre ralentissant de plus en plus. Un campement de fortune est érigé dans le ranch dévasté par les séismes et les tempêtes. Red, le père de Martha, permet à la famille de tenir bon. Martha et Red nourrissent le groupe avec des opposums (sortent de gros loirs ou de gros rats d'Amérique du Nord) et des vers de terre, et Red assemble une éolienne à partir de pièces auto et de tondeuse à gazon.

Divers groupes se joignent à celui de Big Tom, dont le groupe de Danny, un groupe d'habitants du coin qui connaissaient déjà Big Tom, Netty, la seule survivante d'un hôtel de tourisme massacré par des voyous armés, et enfin Mark et Brian, qui étaient en avion lors du basculement. Chaque groupe raconte les histoires qui lui sont arrivées, mettent en commun ce qu'ils savent des événements.

La folie due au stress des changements affecte Tammy, la soeur de Billy, et Brian. Le jeune Billy reçoit un cadeau des Zetas pour soigner sa soeur. Mark ramène Brian à l'épave de l'avion pour monter une montgolfière, voyageant jusqu'à New York City, observant la dévastation au fur et à mesure de leur avancement.

Lors d'une exploration, une partie du groupe du ranch se fait capturer par des militaires devenus pilleurs puis sont emmenés dans un centre autonome de survie (planifié à l'avance par l'armée puis construit rapidement après le basculement).

Le groupe doit finalement quitter le ranch, trop exposé aux pillards, après que Jane ait été tuée lors d'une tentative de viol. Le groupe du ranch devenu nomade vit de la chasse-cueillette lorsque leurs réserves s'épuisent complètement. Le groupe trouve des preuves de cannibalisme de la part d'autres groupes les ayant précédés.

Le groupe nomade rencontre alors un autre groupe guidé par Ian, établis sur une falaise de rivière. Là, Frank trouve un nouvel amour avec Madge, une cuisinière muette. Red aide un autre bricoleur du groupe de Ian à assembler un générateur de gaz de bois (gazogène) pour le vieux tracteur.

Les pilleurs militaires sont toujours à la poursuite du groupe du ranch. De nouveau en mouvement, le groupe du ranch rencontre une innovante ville de maisons flottantes dans la rivière, utilisant des bouteilles en plastique comme dispositifs de flottaison. Ils arrivent à une ville dôme sous la protection des Zetas. La ville du dôme est autosuffisante, cultivant de la nourriture à l'intérieur. Le maire de la ville, Jonah, est un contacté et des enfants hybrides vivent à la ville-dôme. Après une bataille dans laquelle la protection des Zetas leur donne la victoire, les habitants de la ville-dôme découvrent qu'ils ont des voisins amis bien que pas complètement humains.

Danny et Netty font un tour de reconnaissance pour rencontrer les formes de vie extraterrestres qui les environnent.

Prologue

Martha n'est encore qu'une enfant. Elle joue dans le marais près du ranch où son père célibataire, Red, élève sa fille unique. Pieds nus, Martha est un vrai garçon manqué. Elle est en train de manger un sandwich alors qu'elle s'approche d'une clairière au bord d'un étang.

Martha s'aperçoit que le chant des grenouilles a cessé, puis se fige, en regardant fascinée au-dessus de l'étang. Quelque chose descend du ciel. La zone est éclairée, sans bruit, pendant un moment.

Un vaisseau spatial compact, de 8 mètres de diamètre, descend rapidement dans la clairière. Le mouvement, très rapide au début, ralentit brusquement près du sol. Une rampe descend d'un côté, et un petit Zeta beige bondit, franchissant la rampe en quelques bonds légers. Martha reste caché derrière les racines d'un grand arbre abattu.

Un petit Zeta de couleur beige, pas plus grand que Martha, s'approche de l'arbre, se penchant en avant pour établir un contact visuel avec Martha, sans lui faire peur. Il s'approche de Martha, lui prend la main et la ramène dans la zone herbeuse au bord de l'étang. Martha ne montre aucune peur. Deux autres petits Zetas se trouvent à l'extérieur du vaisseau, l'un penché vers un raton laveur qui n'a pas peur et qui se tient debout sur les pattes arrière. Les 2 êtres vivants ont une conversation télépathique silencieuse.


L'arbre tombé est aujourd'hui pourri et s'est enfoncé dans le sol, des broussailles ont poussé là où se trouvait l'herbe. Billy, le fils de Martha, patauge le long de l'étang, son jean roulé juste au-dessous de ses genoux et ses chaussures restées au bord de l'étang. L’eau est fraîche sur ses jambes nues, et lui fait oublier le Soleil brûlant. La pluie s'est réduite à une bruine constante et tombe au goutte à goutte.

Billy s'immobilise puis se déplace lentement, ses mains devant lui. Il attrape d'un geste vif une grenouille.

Je t'ai eu!

La grenouille se débat. Billy la laisse partir. Même s'il reste comme tous les garçons, il a bon cœur. Billy regarde autour du bord du marais, scrutant l'eau. Tout est silencieux, pas de chants de grenouilles. Son visage affiche une mine perplexe.


Red est dans son atelier. La retraite ne lui convient pas, et même s'il n'a aucune raison de regretter de vivre avec sa fille Martha à la ferme, être un invité permanent reste difficile à vivre pour le vieil homme. Ici, parmi les outils, il est dans son royaume, et sent qu'il ajoute quelque chose de solide, quelque chose de réel, au bien-être de la famille. Le vieil homme trouve ces moments où il est seul et seul maître à bord reposants. Son royaume est peut être une pièce poussiéreuse pleine d'outils rouillés, mais c'est là, de plus en plus souvent, qu'il passe sa journée.

Billy s'approche de son grand-père, inquiet et désireux de partager avec le vieil homme, qui a toujours une oreille et un vif intérêt pour les exploits et les découvertes de son petit-fils. Billy est contrarié.

Papi... toutes les grenouilles sont parties! Il n'y a pas de bruit, pas de saut nul part. Est-ce que quelqu'un les auraient toutes attrappées ?

Red réfléchit un moment.

Je viens d'entendre quelque chose à ce sujet à la radio, que toutes les grenouilles disparaissaient et que personne ne savait pourquoi.

Red se retourne, se murmurant :

Peut-être que cela a quelque chose à voir avec ces crop circles que nous avons trouvés sur le terrain.

Les petits mystères disparaissent subitement pour des priorités plus élevées quand ils entendent Martha appeler depuis la maison :

A table, ne tardez pas !

Un avertissement inutile. Dans une ferme, les hommes sont rarement en retard pour le repas, ou alors pas par choix. Red pose ses outils pendant que Billy court vers la ferme.


Un homme aux cheveux blancs ébouriffés est penché sur le viseur d'un grand télescope. Il s'agit d'un observatoire ancien, de petite taille, qui a échappé au cover-up gouvernemental (censure et mise sous secret défense) car il ne demande pas de subventions. L'astronome est à la retraite, donc plus soumis aux chantages sur l'emploi, un autre bras du cover-up. Il lève les yeux, l'air joyeux, s'adressant à sa fille d'âge mûr :

Pourrait être une comète. Elle est sur un bras d'orion. Elle émet des ondes.

Sa fille sourit et tape l'information sur son ordinateur portable.


Un jeune homme aux cheveux blonds et courts, astronome amateur, s'approche d'un observatoire moderne construit sur des hauteurs rocheuses. Il ouvre la porte et entre. Il est accueilli par l'assistant astronome auxiliaire. L'astronome amateur dit :

Salut. Je suis Joe. J'ai loué ce télescope pour cette heure. J'ai mes coordonnées ici...

L'amateur sort un morceau de papier et le tend à l'assistant. L'assistant fronce les sourcils en voyant les coordonnées, faisant un geste vers un échafaudage placé sur le côté du téléscope.

On ne peux pas regarder dans cette direction. Il faudrait pour cela déménager cet équipement mais je ne suis pas autorisé... Hum...

L'assistant est perplexe, car l'échafaudage n'a pas de raisons rationnelles d'être là. D'autant plus que le téléscope a été louée. Après réflexion, le visage de l'assistant s'illumine. Il commence à marcher vers une porte latérale.

Nous pouvons utiliser un autre télescope. Venez par là.


Les deux astronomes sont maintenant côte à côte sur un autre télescope. L'assistant est prêt à entrer des coordonnées dans le téléscope, a les mains sur un clavier et regarde l'amateur en l'attendant. L'amateur a sorti son papier et l'a déplié. Il lit les coordonnées :

Angle droit 5.151245, déclinaison +16.55743.

L'assistant dit:

Orion, hein? Beaucoup d'intérêt pour cette région du ciel ces derniers temps.

Le télescope couine et se déplace dans un angle différent. L'assistant se penche en arrière et dit:

Regardez.

L'amateur se recroqueville sur l'occulaire, recule, s'éloignant de l'occulaire en faisant couiner son tabouret. Il fait un geste vers l'occulaire avec sa main.

Pouvons-nous nous concentrer sur cette tâche de lumière juste à gauche du centre? Est-ce censé être là?

Dans le viseur se trouvent plusieurs étoiles de lumineuses à moyennement brillantes, et avec en effet une tâche de lumière à gauche du viseur. La tâche est plus claire en son centre. La tâche est globalement plus grande que les étoiles, qui ont tendance à être des petits points de lumière. L'assistant se penche en avant pour voir. Il ajuste le télescope pour centrer l'objet, prend note de la coordonnée, puis se lève et se dirige vers le côté de la pièce où de grandes cartes d'étoiles sont disposées sur une table. Il en tire une en haut de la pile et localise les coordonnées en vérifiant les numéros du haut et du côté. Il se tourne pour répondre à la question, avec de la surprise dans la voix :

Non !


Dans l'espace, on aperçoit Niburu, alias Planet X, la Planète du Passage. Toute la scène est baignée de rouge, de poussière rouge tourbillonnante, remplie de débris. Des pierres et du gravier sont parfois vus dans le mélange tourbillonnant. La planète semble être une planète aquatique mais ce n'est pas évident car la poussière rouge ne lui donne pas une teinte bleue. Il y a peu de terres, moins de 10% de terres constitués de divers petits continents, essentiellement des îles.

La queue, apparemment sans fin, montre parfois un objet de la taille de la lune, le plus souvent tournant autour d'un autre objet de la taille de la lune. Les débris continuent à défiler, mais toujours la poussière rouge tourbillonnante. Un certain nombre de lunes tournant autour d'une autre s'enroulent comme la queue d'un scorpion. La queue de la poussière rouge elle-même, chargée électriquement, semble fouetter l'espace et s'enrouler. Gravier gris et débris fins forment leur propre nuage dans la queue, et réagissent au mouvement des lunes en orbite et la poussière rouge tourbillonne en tourbillonnant sur elle-même (2 mouvements de vortex combinés). L'ensemble est un monstre se tordant en se déplaçant dans l'espace sombre.

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On peut sentir les pulsations générées par les pales de l'hélicoptères tandis que l'appareil surplombe, à travers des nuages brumeux, un vaste champ de blé doré. Au fur et à mesure que les nuages se séparent, le crop circle posé dans le blé apparaît. Le blé a été plié aux noeuds, pas cassé. Un enquêteur de crop circle est assis à côté du pilote d'un hélicoptère. L'enquêteur a une caméra vidéo à la hauteur de son visage, mais l'a éloigné de son visage pour parler. L'enquêteur dit :

Qu'est-ce qu'ils essaient de nous dire?

Le pilote dit quelque chose de presque inintelligible, étant donné le bruit de fond de l'hélicoptère, et l'enquêteur répond.

Oui, oui, du jour au lendemain. . . Il n'y a pas d'empreinte de pas. Nous sommes les premiers ici. . . C'est énorme!

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Red et Martha sont assis sur la balancelle de jardin, juste après le crépuscule. C'est l'été et la nuit est remplie du son trépidant des insectes qui chantent. Red est en train de boire une bière, tandis que martha profite d'un moment de répit pour se reposer enfin. Elle regarde le paysage, et pointe du doigt un point de l'horizon à sa gauche, vers la demi-lune qui se lève.

Papa, la Lune a-t-elle jamais surgi là-bas? C'est toujours plus... là bas...

Martha fait un geste vers la droite. Red dit :

Elle s'est levée là ces derniers temps... mais pas depuis toutes ces années que je suis ici, non.

La voix sourde de Big Tom, le mari de Martha, vient de l'intérieur de la maison, on entends à peine :

... bain avant la nuit, les enfants...

Martha se lève et part en courant, avant que Red ai pu l'en empêcher.

Repose-toi un peu, Martha !

En entrant dans la maison, Martha marmonne :

Il oublie toujours leurs oreilles...

Red sourit affectueusement en voyant le dos de sa fille travailleuse disparaître dans l'encoignure de la porte, sachant qu'il valait mieux ne pas essayer de l'arrêter. Son regard revient à la lune montante tandis que son visage devient sombre.

Qu'est-ce qui te tracasse ces derniers temps ?

Red soupire. Il sent que quelque chose d'anormal se passe, mais ne sait pas exactement quoi.

Théories

Zack Maya, le rédacteur en chef du Daily News, fait lentement le tour de son bureau encombré. Le quotidien est un succès, mais la marge, comme pour tous les produits qui dépendent d'un public volage, exigeait une attention constante. Maya s’est retrouvé plus souvent dans la peau d’un politique que dans celle d’un journaliste, et il avait appris à accepter cela.

Maya se glisse dans sa chaise en cuir usée, feuilletant les pages d'un article posé sur son siège avec à peine le temps de saisir leur sens. Le rédacteur en chef jette un coup d'oeil, à travers ses lunettes à double foyer, vers le bureau de Danny. Ce dernier, prenant cela comme un appel, quitte son bureau pour rejoindre celui de Zak. Zack est bref et va droit au but, sans même lui laisser le temps de finir d'entrer :

Je n'imprimer pas cette histoire. Il n'y a aucune preuve! C'est juste une idée folle. Puis-je vous rappeler que vous écrivez pour un journal conservateur? Vous pourriez engendrer une panique avec ce genre de choses.

Danny fronce les sourcils et se glisse sur une chaise en bois, en face du bureau de son rédacteur en chef. C'est la chaise de l'accusé, pas destinée à être confortable. Danny écoute mais on peut voir qu'il n'adhère pas à cette explication. Zack continue :

Qui va payer les commerçant pour les dégâts et les émeutes que cela va causer ?

Danny proteste :

C'est un excellent article. Le gars m'a impressionné, et il avait beaucoup de sources. Nous avons déjà fait des documentaires auparavant, des chutes d'astéroïdes et tout le reste. Je, je ne pensais pas que c'était différent.

Maya secoue simplement la tête, regardant Danny sans ciller, le scrutant du regard par dessus ses lunettes.

Ce n'est pas parce qu'on le faisais avant qu'on peux refaire quelque chose aujourd'hui. Je ne peux pas imprimer ceci.

Maya lance l'article à travers son bureau et se réinstalle au fond de son fauteuil.

Tu n'es pas à ma place, et je te l'assures, je ne passerai pas cela.

Danny ramasse son article, sa bouche s'ouvrant et se fermant pendant qu'il réfléchit à des arguments, il les rejette, cligne deux fois des yeux, se lève lentement et sort du bureau sans un commentaire. Une fois dehors, il s'arrête, perdu dans ses pensées, son visage lisse, sans émotion apparente. Enfin, il finit par murmurer.

Conneries.

Danny empoigne sa veste et sort à grand pas de son bureau.


Le campus boisé de l'Université de Brandon remonte dans les contreforts des montagnes des Appalaches, sillonnés dans tous les sens de pistes damées par le martèlement des pieds des étudiants et du corps enseignant faisant leur jogging. Pour les habitués de ce labyrinthe, ces pistes mènent à des trésors dans la forêt que peu de gens connaissent. Le professeur Isaac est en train de pêcher, la casquette enfoncée sur la tête, le dos appuyé contre un arbre au bord de la rivière. Isaac jette une ligne quand un téléphone sonne. Il sort son téléphone de son sac et répond.

Professeur Isaac, c'est Danny du journal. .. Eh bien, je veux publier l'histoire, mais mon rédacteur en chef dit que c'est des foutaises et que The Daily est un journal intègre. Mais je sais que nous avons déjà publié des trucs comme ça avant. Savez-vous pourquoi il ne publiera pas l'histoire ?
...
Je connais l'endroit. Je serai là.


Isaac est toujours en train de pêcher quand Danny arrive, essouflé de la montée qu'il vient de faire. Danny sort un calepin. Au cours de leur conversation, Danny alterne entre croire ce qu'Isaac dit, et le déni, car prendre au sérieux ce qu'avance Isaac est trop effrayant. Alors il propose d'autres explications plausibles. Isaac est familier de ce type de réaction, et il démonte les arguments adverse en exposant simplement les faits jusqu'à ce qu'ils soient écrasants (aucune autre explication n'étant possible).

Danny... un de mes amis travaillant dans un grand observatoire a suivi un objet entrant, mais il lui a été imposé de garder le silence à ce sujet s'il tenait à la sécurité de sa famille. Cet ami dit que cela dure depuis plus d'une décennie, sur tout ce qui touche à la Planète X depuis de nombreuses années. Cette planète traverse le système solaire tous les 3 600 ans environ et démolit pas mal la Terre à chaque fois. Eh bien, c'est la planète destructrice dont je t'ai parlais. Elle existe ! Elle arrive ! Et aucun d'entre nous n'est prêt pour cela, c'est sûr. Et c'est précisément pourquoi le gouvernement ne veut pas que le public le sache. Eux non plus ne sont pas prêts.

Danny s'y attendait. Le rédacteur en chef a rejeté son histoire trop vite, la lisant à peine.

Qui lui demande de se taire et pourquoi?

Le professeur relève sa canne à pêche puis relance sa ligne dans les bas fonds avant de répondre. Danny est soulagé d'avoir une discussion sur le sujet, mais n'est pas encore prêt à prendre tout ça pour argent comptant. Isaac dit :

Le gouvernement ne veut pas que le public le sache. Ils ne sont pas prêts pour cela, et ils ne savent pas quoi dire aux gens. Alors ils s'appuient sur des personnes pour garder le peuple tranquille. Les observatoires coûtent cher, ils sont construits avec beaucoup d'argent. Les universités reçoivent des subventions du gouvernement. Et le gouvernement peut toujours venir et dire que c'est un problème de sécurité nationale.

Danny est confus. Pourquoi une planète qui passe est-elle spéciale ?

La sécurité nationale ? Nibiru ne peut provoquer la panique ? Ils n'ont pas invoqué la sécurité nationale pour la menace que cause les astéroïdes passant proche de la Terre, ils en ont parlé partout aux infos, à la télé et autres. En quoi serait-ce différent ?

Isaac doit expliquer comment fonctionnent ceux qui sont au pouvoir et qui ont peur de le perdre.

Ces astéroïdes, soit ils balayent toute vie sur Terre, soit ils passent à côté sans rien faire, c'est blanc ou noir. Mais ce monstre de Nibiru passe et provoque un pole-shift (déplacement de pôles géographiques). Le globe survit, mais la civilisation est pratiquement anéantie, s'est crashée en plein vol. C'est ce qui s'est passé pendant le temps de Moïse. L'Egypte a perdu ses esclaves, ils sont partis, et l'Egypte fut dans le chaos pendant des siècles. C'est ce qui les inquiète vraiment. Ils s'inquiètent de l'ouvrier remettant en question ses maîtres, et reprenant le pouvoir. Ils s'inquiètent de la domination de la foule.

Danny commence à relier les pièces du puzzle.

Ils pensent que ça va arriver? Cette chose arrive? Pour sûr, est-ce vraiment sûr? Ça explique que Maya me saute dessus. C'était comme si quelqu'un lui avait confié une tâche, comme s'il en savait plus que ce qu'il m'en a dit.

Isaac dit :

Ce n'est pas seulement une théorie. Mon ami dit qu'ils cherchaient cette planète, ils l'ont trouvé et maintenant ils la pistent.

Danny est étonné.

Ils l'ont trouvé ? Ils l'ont trouvé ? Où l'ont-ils trouvé ?

Isaac lui explique alors la longue histoire du cover-up, depuis la découverte de la planète X en 1983.

En 1983, ils envoyaient des caméras infrarouges au-dessus des nuages, alors qu'ils n'avaient pas le télescope spatial Hubble, et regardaient vers Orion parce que les astronomes savaient qu'il y avait quelque chose qui attirait les comètes et les planètes dans cette direction, une force gravitationnelle, et ma foi, ils l'ont trouvé. Ça les a effrayés, et ça a frappé les journalistes au point de faire la une des journaux avant qu'ils ne puissent l'étouffer. La découverte était dans le Washington Post, en première page, en 1983.

Mais Danny n'a pas encore compris.

Zut! Mais je ne comprends pas pourquoi la violence de la foule s'ensuivra. Je veux dire, ok cette chose passe. Mais alors pourquoi les civilisations devraient-elles s'effondrer ?

Isaac souligne l'étendue de la dévastation qui accompagne un changement de pôle :

Nibiru ne fait pas que passer. Jetez un oeil à la construction de montagnes, des montagnes jeunes comme les Rocheuses ou l'Himalaya. Si tout ce que nous avons, c'est quelques tremblements de terre de temps en temps, qu'est-ce qui pourrait pousser ces montagnes à des milliers de mètres vers le ciel ? Quelle force surmonterait la résistance ?

Isaac jette un coup d'œil de côté à Danny, jugeant son scepticisme léger. Comme la plupart des jeunes, il est réticent à abandonner son idéalisme, ne croyant pas que le gouvernement et les médias mentiraient au peuple. Isaac est familier de cette résistance et de ces arguments, les balayant à chaque fois. Danny dit,

Euh, les tremblements de terre font s'écrouler des bâtiments, et ..

Isaac interrompt rapidement,

Ça c'est juste à cause des tremblements / vibrations.

Isaac réfléchit à une scène de construction de montagne, où la roche plate se casse et commence à s'incliner vers le haut à un angle de 45 degrés, grimpant sur les contreforts à proximité, grimpant dans le ciel jusqu'à la hauteur d'un Everest. Il dit :

Je parle de prendre une montagne et de la faire monter jusqu'à des milliers de mètres. Des chaînes de montagnes entières, à élever. Et regarde la question des glaciations et des déplacements des pôles magnétiques! Nous ne les comprenons tout simplement pas, nous ne comprenons pas du tout ! Tu sais que lors de la dernière période glaciaire il y avait de la glace sur la France, il y a 11 000 ans à peu près, mais en même temps, les prairies Sibériennes étaient chaudes et luxuriantes! Maintenant, qu'est-ce que le Soleil a fait là-bas, a-t-il brillé uniquement pour la Sibérie et s'est éteint pour la France ?

Isaac tire sa ligne et l'éloigne de nouveau, les deux hommes se taisent un moment. Isaac continue :

Le passage de Nibiru ne va pas être de tout repos, loin de là, fiston.

Isaac visualise un mammouth debout dans les prairies, la neige et les vents hurlants qui descendent. Le mammouth se mets dos aux vents, tronc haut comme s'il essayait de se défendre, des yeux fous de peur face au maelström descendant. L'estomac a l'herbe avec des boutons d'or non digérées à l'intérieur, comme si ce qui avait tué le mammouth était un événement soudain ayant eu lieu au milieu de la digestion du mammouth.

On a retrouvé des mammouths en Sibérie, figés par le froid en un éclair, congelés comme cela depuis des milliers d’années, avec des boutons d'or dans l’estomac. Des boutons d'or, là où actuellement on ne trouve pas trace d’herbe à des centaines de kilomètres à la ronde. La Terre a basculé sous leurs pattes, fiston, et les a déplacés rapidement vers une zone polaire. Ils ne furent pas la seule espèce à s’être éteinte sans raison apparente. Il y en a des douzaines.

Jouant le rôle du débatteur, Danny essaye toujours de contrer les arguments du professeur. Les yeux de Danny oscillent d'un côté à l'autre alors qu'il cherche rapidement des explications rationnelles. Danny se mord légèrement la lèvre inférieure mais est clairement à court d'arguments.

Isaac maintient la pression.

Ça n'a aucun sens! L'université de Potsdam a publié des articles indiquant que l'axe du monde s'est déplacé, tirant l'Allemagne plus au Sud, au moment de l'Exode juif d'Egypte. La croûte terrestre s'est déplacée. La croûte a bougé ! Avant l'exode, le Groenland était là où est maintenant le pôle Nord géographique. Tu le vois? La croûte se déplace, et pendant cette dernière période glaciaire, la France était le Pôle Nord géographique, c'est pourquoi il était gelé ! Nous n'avons pas des pôles magnétiques errants, nous avons une croûte errante.

Isaac relance sa ligne dans la rivière, se détendant contre le tronc d'arbre, sachant que l'argument avait porté. Danny s'avoue vaincu, et dit :

Est-ce la raison pour laquelle le temps devient fou et les boussoles ne semblent plus fonctionner correctement?

Isaac, voulant continuer la discussion avant d'exposer sa preuve ultime, et ignorant donc la question de Danny, continue a lister les preuves des cataclysmes de Nibiru dans le passé :

Et puis il y a aussi les raz-de-marée, les squelettes de baleine trouvés sur les collines à 120 à 150 mètres au-dessus du niveau de la mer en Ontario. En Sicile, il y a des ossements entassés dans des crevasses rocheuses qui proviennent d’à peu près tous les animaux d’Europe et d’Afrique, tous en petits morceaux comme si les vagues les avaient amenés là et éclatés contre les rochers..

Danny proteste. Il y a sûrement une autre explication.

Alors peut-être qu'un météore, comme celui qui a tué les dinosaures, est tombé dans l'océan et a provoqué un raz-de-marée géant.

Mais Isaac en rajoute.

Chief Mountain au Montana a fait un voyage de 13 kms a travers la plaine, et les Alpes se sont déplacées sur plusieurs centaines de kilomètres vers l’intérieur des terres. Nous parlons de plaques rocheuses de centaines et de centaines de mètres d’épaisseur... Quelle force déplace ces montagnes ?

Danny tente de donner l'explication standard pour les changements géologiques massifs dans le passé de la Terre.

Oh, c'est arrivé il y a des millions d'années.

Mais comme précédemment, c'est Isaac qui a la carte maîtresse.

Les chutes du Niagara coulent sur un lit qui a moins de 4000 ans, fiston, et plusieurs lacs de la côte ouest n’existent que depuis environ 3500 ans. Ca te rappelle un chiffre? Les scientifiques savent depuis un certain temps que le niveau des océans a baissé d’environ 6 mètres partout sur la Terre, en même temps, et devine quand: il y a entre 3000 et 4000 ans.

Finalement, Danny demande.

La vache ! C'est énorme ! Pourquoi ne laisseraient-ils pas ça sortir? Ils préviennent les gens des inondations, des ouragans, des stocks pour la tempête, et tout. En quoi est-ce différent?

Isaac admet sa propre impuissance, se montre désormais plus doux avec Danny. Le débat d'idées s'arrête et redevient une discussion. Isaac dit :

Mets-toi à la place des responsables, Danny, et regarde la liste de tes soucis. Un, il n'y a aucun moyen après que la croûte terrestre se soit déplacée, après que toutes les villes soient tombées en poussière, pour loger et nourrir les citoyens. Ils réfléchissent donc à sauver quelques privilégiés, et les quelques-uns incluent toujours ces dirigeants, bien sûr. Ils ont bien sûr construit des bunkers, qui sont bien approvisionnés, et tout ça avec l'argent du contribuable. C'est pourquoi cette histoire est gardée secrète. Ils ont des chiens de gardes à la tête des médias pour surveiller que le planète X reste un secret. Ils tirent à tous les coups et sans sommation.

Les déclics dans son cerveau continuent à s'enchaîner pour Danny, qui réalise que la réaction de Maya n'est pas la première de ce type qu'il a rencontré. Danny demande :

Tu veux dire, tu as déjà essayé de divulguer cette histoire avant ?

Isaac dit :

On m'a demandé de contacter votre journal, de réessayer encore une fois. Quelques uns d'entre nous ont essayé de trouver un débouché. Jusqu'à présent, personne n'est passé devant les gardiens de la censure. Ils disent à ces rédacteurs que c'est une question de sécurité nationale ou quelque chose dans le genre, pour ne peut pas avoir la panique. Dieu sait ce qu'ils leur disent, mais une chose est claire, c'est une histoire que le public n'est pas autorisé à entendre.

Danny est nouveau dans le monde du cover-up / dissimulation, et cherche un chemin pour le contourner.

Quelqu'un pourrait aller à un observatoire. Je veux dire, notre observatoire fait des nuits portes ouvertes. Vous pouvez y aller, pointer le téléscope où vous voulez, ils vous aident...

Isaac, plus âgé et avisé, sait ce que signifie un cover-up sérieux.

Tu peux l'essayer. Nous l'avons fait, quand Nibiru pouvait encore être vu dans le ciel nocturne. Mais cette une désinformation/cover-up très poussé et généralisé. Ce ne sont pas seulement les éditeurs, mais ce sont aussi les observatoires et les astronomes que vous ne pouvez pas croire. Vous pensez que le peuple américain ne voulait pas savoir ce qui était arrivé à JFK ? Ils n'ont pas eu l'histoire à l'époque, et ils ne l'auront pas maintenant. Quand le voile s'abat pour protéger les responsables, à Washington, tout le monde s'en réjouit.

Les jeunes persévèrent. Danny dit :

Oui, mais je parie que je pourrais. Je veux dire, je peux être assez persuasif.

Isaac le refroidit :

Trop tard, en tout cas. C'est fini, les observatoires ne censurent plus rien, Nibiru est trop près du Soleil maintenant. On ne peut plus la voir en pleine lumière, les observatoires ont besoin du ciel nocturne. C'est arrivé, Danny, on arrête de tergiverser, et on se prépare au grand chambardement !

Danny est tombé dans le silence, mais finalement prend une grande respiration.

Alors que faisons-nous?

Isaac explique cette chose fondamentale, que chacun doit être personnellement préparé.

Je ne vais pas attendre qu'on me dise ce que je dois faire, je sais très bien ce que j'ai à faire. J'ai un endroit dans les collines, et dès que les choses commenceront à s'aggraver, c'est là que j'irais.


Big Tom et Red remplacent les piquets de clôture en bois dans un champ. Ils ont un stock de piquets à l'arrière du camion, tirent un piquet cassé, coupent le fil, enfoncent à la masse un nouveau piquet à sa place et raboutent le fil avec un nouveau morceau de fil de fer. Pendant ce temps, ils conversent. Big Tom dit :

Entendu dire que des gens riches venant de la côte veulent remplir un bunker en haut des montagnes. Je ne voulais pas savoir, mais tu connais Fred Harvey.

Big Tom et Red se sourient brièvement à travers leur sueur. Fred Harvey est un bavard réputé. Big Tom continue :

Fred dit qu'ils lui ont fait prendre assez d'eau en bouteille et de conserves pour nourrir une armée pendant un an là-bas. Ils ont remplis le bunker un camion après l'autre. Il a dit que pour lui, le plus gros choc c'était d'avoir vu le le trou dans la montagne. Ils avaient fait creuser le tunnel principal, puis une pièce. Lumières partout. Meubles aussi.

Red est accroupi, réparant le fil. Il ne s'interrompt pas mais comme il veut entendre l'histoire, il regarde Big Tom. Big Tom continue :

Maintenant, qu'attendaient-ils? Une invasion?

Big Tom secoue la tête et remet le marteau dans le camion. Se murmurant à lui-même et à Red.

Les riches sont fous. Ils ont tellement d'argent qu'ils ne savent plus quoi en faire.

Signes

Danny et Daisy roulent en voiture vers le camping, où ils devraient rester une semaine, quelque part dans l'ouest de l'Utah. Danny jette des regards furtifs de côté pour se régaler de la vision du corps alangui de Daisy, dans son short et son haut bain de soleil. Couper du boulot pour faire du camping, où il aura Daisy pour lui tout seul, lui fera du bien. Il espère pouvoir oublier le malaise de ces derniers jours depuis qu’il a discuté avec le professeur Isaac, et la colère qu’il ressent encore suite au refus de publication de son article.

Daisy, pour sa part, attend également avec impatience deux semaines avec Danny. Pas de téléphone. Pas de rédacteur en chef. Aucun souci. La plupart de leurs amis sont mariés, et beaucoup ont de jeunes enfants ou sont en passe d’en avoir, et elle a rarement l’opportunité de le faire lâcher prise de ses passions. Danny est toujours en colère à propos de son article censuré, et il sent qu'il y a quelque chose derrière. Il pleut beaucoup, les essuie-glaces sont à vitesse maxi et la voiture est embuée. Daisy dit :

Chérie, tu dois laisser tomber. Tout cela n'est que de la théorie. C'est tes vacances, et tout ce que tu as fait, c'est brasser du vent. Nous sommes déjà sur la route depuis presque une semaine et entre tes plaintes sur cette putain de planète, tes récriminations envers Zack qui annule ton article et cette foutue pluie, ça ressemble plus à l'enfer qu'à des vacances. Comment peut-il pleuvoir autant? Le New Jersey reste sec comme un coup de trique et c'est la grosse rincée dans le reste du pays.

Mais Danny est toujours chaud bouillant. C'est juste que toutes ces choses que le professeur Isaac a montré, que ce truc est vraiment arrivé. Personne ne peut l'expliquer, rien ne peut tout expliquer excepté le passage de cette planète destructrice. Même un ami d'Einstein, un gars nommé Hapgood, a compris cela. Il dit que la théorie de la croûte glissante est la seule explication, et Einstein l'a accepté! Et là ils stoppent tout à l'entrée des médias, empêchent l'histoire de franchir la barrière des rédacteurs en chef. Et ce gars de l'observatoire!

Danny a presque serré les dents dans sa colère, sa colère de se sentir bloqué sur tous les fronts. En tant que jeune homme, il découvre la réalité de la vie dans le monde adulte et n'aime pas ce qu'il y trouve. Comment oser enterrer la vérité, ce cover-up se faisant devant ses yeux!

Daisy veut juste mettre tout ça de côté, car elle a d'autres choses en tête :

Tout ça me fait un nœud à l'estomac. Il n'y a rien que tu puisses faire, alors oublie ça, chéri.

Danny l'ignore mais arrive à lui caresser la cuisse avec un regard et un sourire pour ne pas faire la moue. Voyant qu'il ne va pas commenter, Daisy allume la radio.

.. semblent avoir complètement disparu de la plupart des zones humides. Les naturalistes pensent que la couche d'ozone endommagée peut être un facteur qui permet aux rayons du soleil nocifs de tuer les œufs de grenouilles, mais la disparition des grenouilles se produit aussi dans les zones où la couche d'ozone est intacte. Pour ceux qui voyagent sur l'autoroute I-15, nous avons une alerte de flash-flood (inondation éclair) près de la forêt nationale de Fishlake. Les conducteurs devraient emprunter des itinéraires alternatifs ou conduire avec une extrême prudence...

Daisy éteint rapidement la radio, ne voulant pas de mauvaises nouvelles pour gâcher l'ambiance. Daisy se tourne et regarde par la fenêtre de la voiture. Il pleut toujours. Elle dit :

Sommes-nous sur I-15?

La Toyota bleue de Danny, arrosée à verse par la pluie, se déplace lentement. En amont, au-delà de quelques collines, l'autoroute est inondée là où ils sont passés quelques minutes auparavant, la circulation s'arrête de part et d'autre du torrent de ruissellement.


Danny et Daisy s'assoient autour d'un feu de camp pour partager une bière avec des campeurs du site dont la tente est voisine de la leur. Les présentations ont déjà été faites, les tentes sont installées, la vaisselle lavée et rangée. Il a cessé de pleuvoir, mais de temps en temps, des grosses gouttes d'eau tombent des arbres trempés au-dessus d'eux. Danny dit :

Asseyez-vous sur une pierre... Vous voulez une bière?

Jane est de Californie et attentive à sa santé. Elle rit.

Vous n'auriez pas plutôt du jus d'orange fraîchement pressé ?

Danny répond en rigolant :

Nous avons des Coors (marque américaine vendant des jus de fruit), fraîchement pressés !

Danny se penche en avant, mettant ses coudes sur ses genoux, le regard sérieux.

Je travaille dans le milieu de la presse écrite, et d’habitude on pourchasse l’info et le scoop, et si cela a un quelconque intérêt, on se dépêche de l’imprimer. Eh bien, j'ai eu un vrai scoop, un professeur du coin qui avait une théorie sur les crop circles. Il a fait un discours dans un club local et quelqu'un dans le public a été tellement impressionné qu'ils m'a envoyé le prospectus de la soirée. Puis il a appelé le journal pour obtenir une couverture médiatique. Après tout, nous imprimons les théories de tout le monde sur les crop circles - que ce soit des mathématiques, de l'ADN, peu importe. La théorie était cette fois que nous avons une autre planète dans le système solaire, qui revient en orbite proche de la Terre tous les 3 600 ans ou quelque chose comme ça, et ces crop circles apparaissent juste avant une autre visite de cette planète, comme un avertissement!

Danny lève deux doigts.

Deux choses me dérangent ici. Un, il a de sacrément bons arguments, et deux, mon rédacteur en chef ne me laisse pas imprimer l'histoire.

Le mari de Jane, Frank, est heureux que le camping ait au moins un locataire avec qui il puisse élever le débat au-delà des bavardages habituels sur les moustique et la sauce barbecue...

Tu parles de la théorie de Sitchin. Il a affirmé que certains documents anciens, les tablettes sumériennes, montrent que cette planète existe. Et ce nombre - 3600 ans - ces anciens avaient un terme pour désigner ce nombre.

Danny se lève, raide comme un piquet, il a soudainement retrouvé son énergie.

C‘est dingue! Mon rédacteur en chef est parti en vrille quand je lui ai présenté la théorie. Je ne l’avais jamais vu comme ça. Alors maintenant je me pose la question, s’il n’y a rien là dessous, pourquoi a-t-il réagi comme ça ? Alors je suis sorti voir ce type, le professeur, et il m'a dit que les médias étaient réduits au silence. Il m'a dit que le gouvernement était au courant, qu’ils avaient à l’œil ce fichu machin, qu’ils l’observaient nous foncer dessus, et qu’ils n’en disent rien au reste d'entre nous !

Danny commence à montrer ce qui va se passer avec ses mains, plus détendu maintenant qu'il peut parler de ses soucis a une oreille intelligente.

Des montagnes qui sortent de terre, des raz de marée déferlants sur les côtes, des vents d’enfer, et surtout, de la poussière rouge. De la poussière rouge partout.

L’ombre légère d’un sourire se dessine sur la bouche de Frank, en voyant la consternation de Danny. Ayant toujours vécu avec les légendes, et avec une épouse très au fait des prédictions du New Age, Frank avait fini par trouver à ces théories un goût de râssis.

Oh, il y a bien là quelque chose de vrai, au moins toutes les prophéties en parlent d’une façon ou d’une autre.

Voyant une ouverture, Jane rebondit :

Les Hopi parlent du Jour de la Purification, quand le monde entier tremblera et deviendra rouge. Et de petits bisons blancs sont nés, ce qui est une autre prophétie indienne qui se réalise.

Détestant laisser sa femme prendre complètement le devant de la scène, ce pourquoi ils se disputent sans cesse, Frank intervient à nouveau :

Il y a une centaine d’années, un dentiste de l’Ohio a fait un travail de chanelling peu connu. L’Oashpe, je crois qu’il s’appelle. Ca parle d’une Étoile Rouge qui voyage et cause beaucoup de mort. Ça dit que les âmes sont moissonnées à cette occasion, c’est le terme utilisé, moissonnées...

En jetant un regard furtif à son mari, et voyant qu’il y a un blanc, Jane dit :

Edgar Cayce a vu la Californie recouverte d'eau.

Mais Frank a la palme des prophéties.

Et puis il y a Mère Shipton, il y a plusieurs centaines d’années, qui a prédit presque exactement la même chose dans notre bonne vieille Angleterre. Elle a aussi fait beaucoup de prédictions justes sur notre technologie.

Frank se lève et cite Mère Shipton :

Pendant sept jours et sept nuits
l'homme regardera cette vue impressionnante.
Les marées vont s'élever au-delà de leur point le plus élevé
mordre les rivages et ensuite
les montagnes vont commencer à rugir/grogner
et les tremblements de terre fendront les plaines où la mer se ruera.

Toujours émotionnellement réticents à accepter la situation, même si son intelligence lui dit le contraire, Danny l'interrompt :

Ah, allons! Ce n’est pas possible! Tu crois vraiment que ça va arriver ?

Jane vient à la rescousse, comme elle le fait toujours en cas de divergence d’opinion.

Voyons ce que disent les cartes.

Jane sort ses cartes de Tarot et les mélange, les étale en éventail, face cachée car posées sur la couverture qui a été étalée sur les aiguilles de pin. Jane retourne les cartes du dessus, une par une. La première carte est la carte de la Mort. Danny, désireux de se rassurer à ce stade, hausse les sourcils, et dit :

Oops!


Le colonel Cage parle à un Zeta, un Extra-Terrestre (ET) du système d'étoiles Zeta Reticuli. La pièce est sombre, les lumières sont éteintes. Le colonel est un homme d’âge moyen, dont l’allure saine ne montre aucun signe de l’âge ni aucun muscle avachi. En tant que militaire, le Colonel Cage considère la forme physique comme le premier bastion de la discipline. D’une discipline stricte, il vit selon des règles à la fois militaires et personnelles, qui sont souvent en conflit les unes avec les autres. Le Zeta plus grand que le colonel, il a des os fins et avec une énorme tête semblant trop lourde pour le corps mince et filiforme comme un bâton. Mais il y a de la grâce dans les mouvements du Zeta, et le colonel ne semble ni remarquer ni s’inquiéter de l’allure de son compagnon. Cela fait longtemps qu’il est habitué à converser avec son visiteur de Zeta Reticuli. Lorsqu'une conversation se déroule, seule la voix du colonel peut être entendue. Pourtant, l'intensité de ses paroles montre qu'un échange d’idées a réellement lieu, de manière télépathique.

Nous ne pouvons pas leur dire. Ne pense pas que je ne le veux pas. C'est des ordres, et les ordres sont des ordres

Le colonel Cage s'effondre un peu, bougeant ses mains devant lui d'une manière désordonnée, comme s'il cherchait une réponse à tâton, une solution qui ne viendrait pas.

Mon Dieu, ne pensez vous pas que j’aimerais mettre en sécurité les enfants de mon voisin ? Ils vivent pratiquement chez moi. Mais si je dis quoi que ce soit je disparaîtrais. Et que feront alors Mary et les enfants, pour l'amour de Dieu ?


Au camping, le quatuor a campé ensemble pendant quelques jours, formant une bonne équipe. Pendant ce temps, les journées semblaient anormalement sombres, comme si le ciel était recouvert au point que l'on ne puisse plus voir le Soleil. En raison de la couverture nuageuse, ils ont pris cela pour des jours extrêmement nuageux, mais Frank a été nerveux.

Alors que Danny est en train de chercher un objet dans sa voiture, Frank s'approche de lui, et dit :

C'est tellement sombre ! Je n'ai jamais vu le ciel aussi couvert, c'est inquiétant. Nous n'avons pas vu le soleil ces derniers jours.

Danny sort de la voiture, regardant autour de lui pour s'assurer que Daisy et Jane ne soient pas à portée de voix, avant de répondre à voix basse :

Est-ce que ces prophéties que vous avez citées l'autre soir disent quelque chose à propos de quelque chose comme ça? Ces ténèbres?

Frank lève les sourcils, réalisant soudainement quelque chose qu'il avait oublié. Il lève la main.

Je reviens tout de suite.

Frank se précipite dans sa tente, fouille de partout, sort avec un livre qu'il feuillette frénétiquement. Finalement, après une pause, il cite :

C'est ici. Les trois jours d'obscurité biblique prédit. Et dans le Livre d'Amos : "je ferai descendre le soleil à midi et j'obscurcirai la Terre au milieu de la journée". Et les Grecs, dans le Phaéton, «Un jour entier s'est passé sans le soleil. Mais le monde qui brûle a donné la lumière.

Frank s'arrête, regardant Danny.

Zut !


À Houston, dans les locaux de la NASA, une vidéo montre l'horizon sombre, comme si la vidéo s'était arrêté à l'heure de pré-aube, quand le ciel commence à s'allumer mais qu'on ne voit pas encore le soleil. Des rangées de tables en métal gris sont placées devant un mur composé de plusieurs écrans vidéo, tous actuellement combinés ensemble pour montrer la même scène aggrandie, une ligne d'horizon. Moniteurs, claviers et divers autres équipements électroniques sont placés sur les tables, et quelques papiers et dossiers ici et là. Il s'agit d'une salle de commandement et de travail, une salle de guerre. La salle est remplie d'hommes et de femmes en costard-cravate ou en tailleur, mais aujourd'hui les cols de cravates sont ouverts, les cols de chemise déboutonnés, les cheveux ébouriffés à force de s'arracher les cheveux.

Un employé de la NASA regarde fixement l'écran d'un air hébété, ne disant mot à personne. Un second employé marche à toute vitesse dans la pièce, s'engageant dans une conversation animée avec ceux qui daignaient lui prêter attention. Un troisième employé marche dans la pièce, un téléphone portable collé à l'oreille, faisant des grands gestes brusques avec ses mains, l'air furieux. Il dit :

... temps d'aller au bunker !

Se penchant sur une table et posant son poing dessus, furieux, il s'installe sur sa chaise alors qu'il tremble de rage.

Quand cela a commencé, vous m'avez dit que nous partirions. Maintenant, je veux savoir où est ce putain de bunker ! Tout de suite !


Au ranch McGregor, Martha est normalement debout avant l'aube pour préparer le petit-déjeuner de son travailleur de force de mari. Big Tom dévore son petit-déjeuner, avalant son café avec bruit et s’empiffrant de ses œufs bacon comme s’il n’y avait pas de lendemain, en parlant entre deux bouchées des tâches qu’il a planifiées pour la journée.

. . trouvé une clôture cassée hier, mieux vaut que cela soit réparé avant que le bétail ne découvre la brêche.

Big Tom jette un coup d'œil en direction de la clôture cassée et s'arrête au milieu de sa phrase. Dehors, il fait une nuit d'encre, alors que l'aube aurait déjà dû avoir coloré l’horizon de stries oranges. Il se tait un moment, son bras tendu au milieu du geste. Puis il recommence à manger, tout en continuant de jeter un œil par la fenêtre, nerveusement, une expression perplexe sur le visage. Il vérifie sa montre, regarde l'horloge sur le mur et demande à sa femme ce que dit son horloge.

... Martha, quelle heure as-tu?

Quand il découvre qu'ils sont tous synchronisés, il secoue la tête et retourne à la tâche de dévorer son petit-déjeuner.


Martha est dans son jardin derrière la maison, mais elle est trop tendue pour ramasser les légumes. Elle se tient juste là, entre la laitue, les oignons et les plants de tomate, une expression inquiète sur son visage. Soudain, elle secoue la tête, car un grand Zeta se tient à côté d'elle sans qu'aucun bruit ne l'ai alerté. Proche des larmes en voyant un ami, elle est soulagée de pouvoir demander conseil.

Mon Dieu, que se passe-t-il?

Le Zeta s'approche d'elle et pose sa main sur l'épaule de Martha, baissant la tête pour que leurs 2 fronts se touchent. Martha lève sa main et la pose sur l'épaule du Zeta. Ils restent ainsi pendant quelques minutes. Ils finissent par s'écarter, leurs yeux plongés dans le regard de l'autre. Le visage de Martha reflète maintenant le calme, elle n'est plus paniquée ni effrayée.


Les yeux de Danny s’ouvrent d’un coup dans le noir de la tente, bien qu’aucun son ni aucun mouvement ne l’ait réveillé. Il braque une lampe torche sur sa montre et son visage prend un air perplexe quand il lit 10h12 du matin. Il fait pourtant toujours nuit. Le sentant bouger, Daisy se réveille. Elle dit :

Tu ne peux pas dormir non plus?

Danny dit :

Normalement, je dors comme un loir au camping. Bizarre que nous ayons tous les deux du mal à dormir. Je sais ce qui va réparer ça !

Danny entoure Daisy de ses bras, lui caressant le cou. Ils supposent tous les 2 qu'ils ont une insomnie et que la montre est arrêtée. Danny est juste en train de se blottir contre Daisy quand ils entendent les voix du couple New Age d'à côté. Danny dit :

Ils sont éveillés aussi? Quelque chose ne va pas ici.

Danny enfile son pantalon et va enquêter.


Les 4 campeurs se retrouvent tous dehors, devant le feu de camp qui couve encore de la veille. Un peu abasourdis et embrouillés, ils regardent autour et vérifient leurs montres. Frank et Danny comparent leurs heures, puis se regardent l'un l'autre. 10h14 et 10h16, les montres concordent. Danny va vérifier l'horloge dans sa voiture, qui marque 10:16 comme toutes les montres. Il dit :

Quoi qu'il en soit, il semble que toutes les horloges avancent. Nous en entendrons probablement parler plus tard aux nouvelles. Bizarre!

Jane remue le feu de camp de la nuit dernière, y ajoute du petit bois d'allumage, et met de l'eau à chauffer pour le café. N'ayant aucune explication pour expliquer pourquoi toutes leurs horloges sont fausses, et ne voulant pas admettre à quel point ils sont effrayés, les campeurs plaisantent. Jane dit :

Tout semble mieux après une tasse de café.

Frank sourit et dit :

Oui, nous sommes tous encore en train de rêver.

Daisy est assise sur une pierre sans rien dire, un léger froncement de sourcils sur son visage. Son anxiété ne veut pas se dissiper. Peu à peu l'aube se lève, et le groupe montre un soulagement évident. Daisy s'illumine, et dit avec un visage presque extatique :

Oh, il y a le soleil!


Au Daily News, à Newark, dans le New Jersey.

Zack Maya, le rédacteur en chef, est furieux. Le visage rouge de colère, il se tient debout son bureau, téléphonant à un ami, trop agité pour s’asseoir. Il regarde sa montre et s’il semble que ce soit l’aube au dehors, sa montre et la pendule murale disent qu’il est 13h07. Il hurle au téléphone :

Nom de Dieu, qu’est-ce qui se passe! Tu m’avais dit qu’il n’y avait aucun danger, espèce d’enculé. J’ai fait ce que tu m’a dit de faire, et maintenant, qu’est-ce que tu as l’intention de faire !

Quand il devient évident que l’autre partie lui a raccroché au nez, le rédacteur en chef écarte le combiné de son oreille, le regarde fixement, puis il raccroche en marmonnant dans sa barbe, d’un air décidément abattu. De la fenêtre se font entendre des klaxons de voiture et des cris hystériques.


L'horloge de la Bourse de New York indique 13h11. La vie continue, même face à l'inexplicable. Sur le parquet de la Bourse, il y a d'habitude des cris et des traders qui courent çà et là avec des téléphones portables à leurs oreilles, mais aujourd'hui le plancher est inhabituellement vide et silencieux. Les traders et les revendeurs se tiennent en rond, regardant fixement la grosse horloge qui marque à présent 13h12. Peu d'échanges d'actions en cours. Quelques cris, des gens qui tournent en rond avec des téléphones portables, mais beaucoup de traders et de vendeurs sont simplement debout à regarder la grande horloge. Les gens se parlent, faisant des gestes et montrant du doigt avec excitation. Des petits groupes regardent les moniteurs de télévision accrochés aux fils sur le sol. L'équipe de CNN parle de l'aube en retard de plusieurs heures.

... les scientifiques doivent encore trouver une explication au Soleil qui tarde à se lever. La plupart des entreprises et des écoles fonctionnent à leur horaire normal, mais la confusion a ...

Dans la rue très fréquentée de Times Square, un trafiquant de drogue, qui devrait normalement se déplacer rapidement dans la foule, afin de se faire des contacts puis ensuite se rapprocher de rues plus sûres, se tient aujourd'hui adossé contre un mur en briques, les yeux scrutant le ciel, une cigarette à la main. Un clochard vient lui taper une taffe.

Tu as des cigarettes, mec?

Le dealer lui tend le paquet entier, briquet compris, d’un air absent.

Le dealer sort un joint et se tourne vers le clochard, lui demande s'il a du feu, oubliant apparemment qu'il vient juste de lui remettre son briquet.

Les voitures sont à l'arrêt dans les embouteillages et les gens, par les fenêtres, regardent le ciel. Un groupe d'enfants fermiers descendent d'un bus et regardent autour d'eux.

Donc, c'est ça New York? Ils ont des embouteillages monstrueux ! Maman avait raison!

Un cadre en complet gris sort d’un taxi, un bel attaché case à la main. Il remarque une fine poussière rouge poudrant le trottoir, et s’accroupit pour en ramasser une pincée, puis la frotte entre ses doigts. La fine poussière est partout à présent - se soulevant du toit des voitures qui démarrent, s’amassant en petits tas sur les trottoirs, et tombant en un fin brouillard sur les visages anxieux tournés vers le ciel.


Il est maintenant 11 h 30 dans les Rocheuses. Au camping, la fine poussière rouge a tout saupoudré, mais cela passe inaperçu car elle est éparpillée par les branches en surplomb. Danny revient des courses de l'épicerie locale, et en voulant ouvrir le coffre, il s’aperçoit que ses doigts laissent une marque sur la carrosserie. Il passe un doigt sur la poussière puis regarde le bout de son doigt, perplexe. Frank revient du ruisseau, la canne à pêche dans une main, bredouille.

Le ruisseau devient rouge, comme du sang, et les poissons viennent flotter sur l’eau les uns après les autres, le ventre à l’air, morts d’on ne sait quoi.

Daisy pose sa main sur sa bouche, les yeux écarquillés, et le regard angoissé. Jane dit :

Mon Dieu, les prophéties se réalisent.

Danny tape sur le clavier de son portable à présent, il écoute, puis il tape un autre numéro et écoute à nouveau. Il se fige, pas de sonnerie.

Ça ne passe pas, rien ne fonctionne.

Danny jette un regard vers le ciel.

Cette affaire détraque les satellites.

Frank est déjà en train d’amener ses provisions de camping à sa voiture, démontant son campement. Jane défait la tente, jette les piquets en tas comme si elle courait après le temps. Danny se frotte le front, essayant de comprendre.

Le magasin du camping n’avait pas plus d’info. Les journaux n’avaient pas été livrés, ni aucune des provisions habituelles.

Voyant que tous le monde dans le camping commence à lever le camp, comme s'il fallait absolument se conformer à ce que faisaient les autres, Danny commence aussi à lever le camp. Il va au feu de camp et commence à ranger la nourriture dans des boites, silencieusement. Daisy qui s’est assise sur un rondin attrappe son nécessaire à maquillage, et commence à se faire les ongles avec une grande concentration. Elle commence un monologue qui parle des types de vernis et d’ongles cassés selon son expérience et celle d’amies à elle, bien que personne n’écoute.

Je n’arrive pas à avoir les ongles longs! Mon amie Célia y est pourtant bien arrivée avec un nouveau vernis qui renforce les ongles.

L'horreur

Big Tom est en train de réparer la clôture. Sa jeep se trouve à plusieurs mètres, car le bétail a tendance à marcher le long des clôtures, créant des ornières profondes bien cachées par les hautes herbes. Comme beaucoup d'éleveurs, Big Tom a tendance à prendre soin de son matériel plus que de lui-même.

Les bovins se mettent soudainement à piétiner et à meugler, s'éparpillant sans but dans toutes les directions, allant et venant, paniqués, se heurtant les uns aux autres. Les bêtes captent un signal que pour l'instant Big Tom ne reçoit pas. Enfin il le perçoit. Un grondement sourd en provenance de la Terre, à peine perceptible au premier abord. Mais le gémissement continue à monter puis à redescendre en intensité, de manière incessante, comme si la Terre était à l'agonie.

Big Tom pâlit, laisse tomber ses précieux outils, et les laissant en vrac sur le sol, rejoint sa jeep en trébuchant. Il démarre comme un fou, ne fermant sa portière qu'après avoir atteint la route poussièreuse.


Big Tom freine en dérapant dans l’allée. Il se précipite vers la maison et se jette sur le téléphone. Martha est calme, assise sur une chaise de cuisine, une bière à la main, sa fille Tammy couchée sur le ventre à ses pieds. Martha dit à Big Tom d'une voix tranquille :

Tu ne pourras pas téléphoner. Je n’arrive à joindre personne.

Martha et Big Tom échangent un long regard, sans un seul mot. Finalement, Big Tom brise le silence, jetant un coup d'œil à la bière.

Ça me fait envie, je crois que je vais m’en prendre une.

Red arrive dans le cuisine et annonce qu’il a approvisionné le hangar anticyclonique. Il a son aide de camp, Billy, sur ses talons. Billy part se laver les mains vite fait, puis revenant vers ses parents, il s'aperçoit que ses mains sont toujours un peu sales. Après un regard lancé à sa mère, il retourne à l’évier, sans réaliser qu’il se passe quelque chose de plus sérieux que de se faire gronder.

Des coups frappés avec force à la porte d’entrée empêchent Big Tom de s'installer confortablement sur le fauteuil de bois familier sur lequel il vient de se laisser tomber, bière à la main. Il se lève pour aller voir de quoi il retourne, Billy le curieux sur ses talons.

Danny est sur le pas de la porte, le visage poussièreux strié de sueur qui dégouline. Le reste du quatuor (Daisy, Jane, Frank) est resté près de la voiture dans l’allée. Danny dit :

Auriez vous un peu d’essence à vendre, les pompes à essences ne semblent pas ouvertes.

Big Tom, jaugeant les visiteurs, sent qu'ils ne posent aucune menace. Big Tom veut aussi échanger des infos pour se rassurer sur ce qui se passe.

Pas surpris ... Jed a probablement déjà emmené sa meute de chiens dans les collines, il parlait de la fin du monde, et il se figure sans doute que l’heure est venue.

Danny ne répond pas pendant quelques minutes, le bruit des insectes chantant au soleil alourdissant le silence entre les deux hommes.

Bon, est-ce que c’est le cas ?

Big Tom s’avance vers les deux couples qui sont maintenant sous le porche.

Cela peut aussi être le mauvais sort, les journées sont déjà chaudes et cela ne semble pas vouloir s’arrêter.

À la mention du temps, Danny jette un coup d'œil à sa montre et s'étouffe.

Mon Dieu, il est presque minuit!


Ce qui semble être des jours entiers ont passé, et le long lever de soleil qui n’en finit pas ainsi que la chaleur accumulée fatiguent le groupe. Sombres et concentrés sur le drame qui se joue, tout le monde sentant la fin prochaine du monde qu'ils ont connus, les adultes se comportent entre eux en respectant les critères de la civilisation, ne voulant pas rajouter à leurs problèmes. Les hommes sont calmes, regardant par la fenêtre comme s’ils s’attendaient à ce quelque chose arrive. Les femmes épluchent les pommes de terre et aident Martha dans son raccommodage, bavardant de tout et rien pour empêcher que les enfants ne réalisent la gravité de la situation. Jane dit :

Laissez-moi voir si je peux trouver un bouton correspondant. Tu veux m'aider, Tammy? Je cherche un petit brun comme ça.

Tout le monde est en short, recouvert d’un film de sueur apparent, mais personne ne se plaint de la chaleur ni ne s’en soucie à part Daisy qui est limite à pleurnicher, une continuelle expression d’exaspération sur le visage. Daisy a le comportement de l'adulte qu'elle est en train de devenir, mais fait des petits bruits frustrés quand les tiroirs ne s’ouvrent pas facilement ou que quelque chose n’est pas là où elle pense. Finalement, elle regarde avec insistance Danny mais il a l’air sombre et secoue la tête. Danny dit :

Ne recommence pas! Nous n'allons pas partir. C'est partout, Daisy, partout, et nous devons juste attendre que ça casse ou que nous ayons des nouvelles. Ce ne sera pas mieux ailleurs.

C’est une dispute qui dure depuis un moment entre eux, de celle qui a lieu quand ils se retirent dans une des chambres pour une petite sieste ensemble. Daisy essaie souvent de relancer la conversation sur le sujet, publiquement, espérant gagner des voix, et Danny commence à en avoir assez d’elle. L'un des enfants du groupe éprouve également des difficultés à comprendre la situation. Tammy demande à sa mère :

Quand est-ce que mes poupées pourront de nouveau aller pique niquer au trou où on nage ?

Martha lui fait un petit câlin, comprenant que l'enfant veut se rafraîchir les idées et sortir de la tension dans la cuisine.

Bientôt chérie, bientôt.


Les pompes qui amènent l'eau s'arrêtent. Elles se sont déjà arrêtées à plusieurs reprises en raison de l'alimentation irrégulière des lignes électriques du réseau. Les interrupteurs se déclenchent dès que le bouton de réinitialisation est enfoncé. Big Tom s'accroupit à la pompe près du puits, des outils sur le sol à côté de lui, bricolant la pompe. La pompe démarre et coupe immédiatement à chaque démarrage. Il ramasse ses outils et se lève, murmurant doucement :

Zut!

Big Tom revient avec des seau d'eau. Il s'arrête subitement, sentant un tremblement léger mais continu dans le sol. Martha sort en courant de la maison et se jette dans ses bras, faisant tomber les baquets qui sont à présent sur le sol, clapotant et débordant. Les enfants courent derrière elle.

Maman! Maman!

Il y a de la panique dans l’air. Danny et Red, qui étaient au jardin, débouchent du coin de la maison, des oignons et des tomates dans les mains pour le gumbo que Martha était en train de préparer. Red pâlit en regardant le ciel :

La lune est en train de se déplacer !

Soudain tout ceux qui sont debouts sont projetés sur plusieurs mètres. Big Tom est projeté vers l’arrière, dérapant sur les fesses, Martha par dessus lui. Tammy s’assoit, regardant son coude écorché qui saigne, secouée douloureusement d’avant en arrière et pleurant très fort. Billy chancèle sur ses jambes, il se tient debout, blême et secoué, les bras tendus de chaque côté et genous légèrement pliés pour assurer son équilibre. Big Tom, se redressant, fronce les sourcils.

La grange, posée sur une dalle de béton, a été arrachée à ses fondations et s'est déplacée à mi-chemin dans la basse-cour. La maison a plissé au milieu, les murs se pliant sur un support cassé, mais est toujours collé à ses fondations. Daisy sort de la maison en hurlant, accompagnée de Jane qui se tient la tête ensanglantée à deux mains.

Une fissure massive s'ouvre dans la terre, déchirant le champ derrière la grange. La fissure s'ouvre et se referme sans cesse, s'ouvrant sur plusieurs mètres avant de se refermer de nouveau rapidement. Le ciel s’obscurcit lorsque des pierres commencent à parsemer le paysage, comme une grêle de pierres. Le groupe dans la cour, sous les coups des pierres qui leurs tombent sur la tête, surmontent leurs blessures et leur état de choc, mettent leurs mains au-dessus de leurs têtes et se précipitent dans tous les sens, ayant besoin d'un abri mais craignant de se réfugier dans une maison brisée en 2. Des éclairs éclatent au-dessus de leur tête constamment, bien qu'il n'y ait pas de pluie, et au loin, il y a un bruit sourd, tandis qu'une sorte de voile de feu venant du ciel tombe sur un bosquet d'arbres, les incendiant. Le groupe, dirigé par Red, se précipite dans la cave anti-cyclone. Red dit :

Je savais que cela serait utile.

Daisy est hystérique et ne cesse de hurler à Danny.

Arrête ça... Arrête ça.

Tout le monde l'ignore.

Martha enroule son tablier autour de la tête de Jane, lui expliquant d'une voix calme de presser sa tête pour arrêter le saignement de sa blessure au cuir chevelu. Le visage de Jane est couvert de sang.Pour couronner le tout, Frank énonce de façon factuelle :

Je pense que mon bras est cassé.

On voit son bras pendouiller dans une direction bizarre, le traumatisme sur l’instant ayant été si fort qu’il ne l’avait pas remarqué avant d’être en sécurité dans le hangar anticyclonique. Les vents à l'extérieur se mettent à hurler plus fort, et la porte métallique boulonnée de l'abri enterré claque de temps en temps sous la force du vent. La seule source de lumière du hangar vient d’une lanterne marchant sur piles.

Big Tom remet en place le bras cassé de Frank, Danny se plaçant derrière Franck pour le tenir, un bras de Danny s'enroulant devant, et l'autre bras tenant le bras valide de Frank dans une prise assez serrée pour l'empêcher de frapper par réflexe lorsqu'il aurait mal. Big Tom annonce :

Maintenant !

Big Tom tire, Frank hurle et fait une embardée vers l’arrière en poussant sur ses pieds. Red est à côté d'eux, une attelle faite d'une jambe de chaise cassée dans ses mains, avec Billy à ses côtés, essayant d'aider.

Derrière eux se tient un autre drame, tout aussi important, et que personne ne remarque. Tammy est recroquevillée à l’arrière dans un coin de la pièce, serrant contre elle une de ses poupées, le visage figé et sans voix.


Une heure plus tard, les vents ont cessé de hurler. Red retire les verrous qui retiennent fortement fermée la porte tempête (une contre-porte supplémentaire pour augmenter l'étanchéité). Red pousse légèrement la porte, l'entrouvrant à peine. Big Tom, hésitant et prudent, sort la tête et jette un coup d'œil autour de lui. Tout est calme, seul le paysage dévasté attestant de ce qui s'était passé seulement une heure avant. Big Tom est suivi de près par son Billy, avec Red et Martha qui se déhanchent derrière eux, essayant de voir eux aussi. Martha cligne des yeux et lutte pour retenir ses larmes, voyant leur lieu de vie, qu'ils ont construit si laborieusement, complètement dévasté. Chaque bâtiment est sorti de ses fondations, les branches des arbres encore debout sont déchiquetées, et le moulin n’est qu’un enchevêtrement tordu dans le coin de la basse-cour. Big Tom résume :

Au moins, nous sommes toujours en vie.

Et puis, montrant sa nature pratique.

Je vais aller voir si je peux faire fonctionner la pompe... nous devons stocker et conserver toute l'eau propre possible dans le réservoir avant qu'elle ne s'écoule complètement.

Big Tom marche à travers les ruines fragmentées qui étaient la maison et la grange. Red reste derrière, sa main sur l'épaule de Billy, restants tous deux silencieux et immobiles. Martha a la main à la bouche, et toute la famille reste figée à la vue des dégâts.


Là où les forces cataclysmiques mettent en pièce les constructions de la civilisation, la nature reste souvent imperturbée. À l'exception d'un occasionnel morceau d'arbre jeté dans les herbes hautes, les pâturages semblent toujours les mêmes.

Un cheval et sa cavalière émergent en galopant du sentier de vache qui traverse les bois. Netty, les cheveux ébouriffés, est en fuite depuis des jours. Netty ralentit le cheval, se retournant pour regarder derrière elle. Ses poursuivants sont toujours là. Elle repart malgré la fatigue, son cheval dégoulinant de sueur.


Le groupe du ranch a construit une tente de fortune. Pour cela, ils ont tendu une corde entre 2 arbres, puis posé des toiles diverses sur la corde (nappes, couvertures, draps, etc.). Enfin, ils ont lesté le bas des toiles qui touche par terre avec des pierres. La pente donnée aux toiles pendues est suffisante pour empêcher l'eau de pluie de goutter à l'intérieur, l'eau s'écoulant le long des toiles. Des lits de toutes sortes ont été mise à l'intérieur de la tente, et un peu de linge est accroché à une autre corde tendue à proximité. La vie continue. Un feu couve entre quelques pierres et une marmite est suspendue à une poutre métallique au-dessus du feu, poutre sortie des ruines de la grange. Un ensemble de chaises en bois qu’on a pu sauver de la maison sont placées près d’une table à 4 pieds, pieds dont l'un a disparu et est remplacé par un tonneau.

Au loin, le groupe voit arriver Netty au galop. Netty est dressée sur les étriers, à l’anglaise, penchée au dessus de l’encolure pour aider le cheval fatigué à porter sa charge le plus facilement possible. Martha se lève et sort de la "cuisine", l’endroit où elle était en train de laver et éplucher des pommes de terre et des carottes pour la soupe. Netty met pied à terre avant que le cheval ne s’arrête, et dit à Martha :

Ils arrivent...

Martha, bégayant, porte sa main sur sa gorge.

Quququi, qui arrive ?

Big Tom se précipite, un fusil dans les mains. Il arme le fusil en position de tir. Il a un regard sinistre, ses mâchoires se crispent : il s'est préparé aux intrusions et n’a pas besoin que Netty s’explique. Elle voit un allié sur son visage, leurs yeux se rencontrent, et elle explique rapidement :

Je suis Netty Finley, la petite-fille de Buck Finley. J'étais à l'hôtel "L'eau claire" quand c'est arrivé.

A nouveau entourée d’amis, Netty se laisse aller, relâchant la tension accumulée des derniers jours. Big Tom jette un regard à l’horizon, il scrute, impatient qu’elle s’explique. Netty tremble.

Ils les ont tous tué... tous... même le bébé...

Netty a du mal à parler, se reprend, mais lutte contre l'envie pressante de s'effondrer en sanglots. Jetant un regard dans les yeux de Big Tom, Netty explique clairement :

Je pense qu'ils me suivent.

Big Tom, croisant son regard, lui fait un rapide signe de la tête et se remet en joue, un silence bien compris s’étant installé entre eux.


Une jeep débâchée suit à distance les volutes de poussière soulevées par le cheval, et le sol a récemment été marqué par des sabots de cheval, des traces bien visibles. Ils suivent Netty. Le moteur hurle et les jeunes hommes, les frères Groggin, crient leur joie de l'hallali prochain d'une proie qui ne peut pas leur échapper.

Yeehaw!

Big Tom est appuyé contre le tronc d’un gros arbre, son fusil reposant sur une branche basse. Le bruit de la jeep se rapproche, puis la jeep apparait. Big Tom se cale contre le tronc d'arbre, ajuste la mire. Un coup de feu retentit. Big Tom est ébranlé par le recul du fusil.


Red a dirigé le groupe vers une citerne où l’eau de source arrive et où la nourriture est placée au frais, sorte de frigo à l’ancienne. Red est contre la porte, jetant un œil par la fente, le doigt sur la bouche pour leur rappeler à tous de se taire. Red a un deuxième fusil contre la jambe, au cas où. Il fait le guet pour Big Tom, en tant que commandant en second.

Martha a ses deux enfants contre elle, un sous chaque bras. Tout le monde est silencieux, respirant à peine. Danny a la main posée sur la bouche de sa petite amie hystérique, ses grands yeux regardant fixement et sans ciller dans les siens. Il lui a lié poignets et chevilles et l’a attachée à une chaise, ne prenant aucun risque. Netty est debout derrière Red, guettant derrière son épaule. Frank et Jane sont dans les bras l’un de l’autre.

On voit au loin Big Tom qui descend du tertre, sa démarche posée ne montrant ni tension ni hâte. Il enlève son chapeau et l'agite dans la direction de la citerne, signalant que tout va bien. La porte s'ouvre et Red émerge alors que Big Tom annonce d'une voix tranchante.

Ils ne dérangeront plus personne.


Derrière ce qui était autrefois la grange, les dames se baignent, et on a tendu un drap entre la cuvette et le campement, pour des raisons d’intimité. Martha, en peignoir, essuie la tête de Tammy, enroulée dans une serviette bien trop grande pour elle. Daisy se plaint que l'eau n'est pas chaude, frissonne et marmonne alors qu'elle se lave rapidement avec un chiffon humide puis se glisse dans l'une des grandes chemises en laine de son petit ami. Netty se lave avec délectation, pour la première fois depuis des jours, savonnant à plusieurs reprises et rinçant comme si elle pensait que ce jour ne reviendrait plus jamais. Jane a récupéré de sa plaie au cuir chevelu, mais a toujours une mince bande de tissu blanc attaché autour de sa tête. Elle est gaie, ou du moins essaie de l'être, racontant des histoires à Tammy au sujet des femmes pionnières, de leur courage et des épreuves qu'elles ont endurées. Le point évident de ces histoires est qu'on peut survivre à ces événements. Jane continue son monologue, Tammy restant toujours silencieuse.

Elles se lavaient comme ça tout le temps, et en hiver, debout devant le poêle ! Ça ne leur a pas fait de mal. Ça peut même être une sorte de jeu si on y pense.

Les dames retournent tranquillement au campement après avoir quitté l'abreuvoir à chevaux, en riant et en plaisantant, la tension des quelques jours précédents étant loin maintenant que la menace est passée. C'est alors qu'elles aperçoivent 2 hommes, Mark et Brian, qui marchent à leur rencontre, sur le chemin de terre.

Mark et Brian sont soulagés de trouver d'autres personnes encore en vie et bien portantes. Martha se sépare du groupe et court vers le campement pour avertir Big Tom. Tammy, à la vue de deux étrangers approchant, reste figée, debout et immobile, regardant fixement dans leur direction. Netty doit revenir en arrière pour la prendre par la main et la ramener au groupe.

Mark et Brian sont boiteux et poussiéreux, Brian presque chancelant. Big Tom s'avance à découvert pour que les étrangers le voit. Les femmes sont maintenant en train de courir en direction du campement. Big Tom tient la carabine pointée vers le haut en signe d'avertissement, indiquant clairement que les visiteurs doivent s'arrêter et s'identifier. Mark est le plus grand et le plus séduisant, il est presque deux fois plus grand que le mince Brian au visage émacié et cheveux longs. Mark est brun et bronzé, les cheveux courts, le regard assuré et une allure de commandant qu’il a acquise lors de l'exercice de postes de responsabilité. Mark lève la main, signalant à Big Tom qu'ils ne leur veulent pas de mal.

Nous ne sommes pas armés... Nous ne voulons pas vous faire de mal... Nous cherchons juste un téléphone.

A ce moment, il jette un regard derrière Big Tom et remarque pour la première fois que les bâtiments de la ferme sont dévastés. Il finit de balayant du regard les environs, en silence. Il dit alors, et c’est plus une affirmation qu’une question :

J'imagine que votre ligne ne fonctionne plus...

Pas encore rassuré, Big Tom reste sur ses gardes.

Mettez vos mains sur vos têtes. Nous avons eu des visiteurs indésirables et je ne prends aucun risque.

Red, qui est arrivé derrière Big Tom, lui tend le second fusil puis fouille rapidement les visiteurs, et indique d'un hochement de tête à Big Tom qu'aucune arme n'a été trouvée. Big Tom redonne le second fusil à Red et accueille les deux hommes.

Venez prendre un peu de soupe, vous avez l'air d'en avoir besoin.

Histoires

C'est l'heure du souper (le soir), les dernières traces du soleil couchant s'évanouissent rapidement, et le groupe est rassemblé autour des braises d'un petit feu, maintenu petit et bas pour ne pas attirer l'attention. Martha débarrasse sa cuisine d'extérieur, empilant des assiettes ébréchées et ses casseroles bosselés et posant un drap sur eux comme couverture, pour les garder propres. Les nouveaux invités ont mangé tout ce qui a été mis devant eux. Martha a assaisonné l'eau utilisée pour cuire les carottes et le leur a donné comme bouillon, un en-cas pour la nuit. Rien ne doit se perdre.

Les mains de Brian tremblent en portant le bol à sa bouche, il avale le bouillon à grandes lampées bruyantes, car il est encore affamé. Mark est en train de raconter leur histoire, et ce qu'il a entendu à la radio avant que son avion ne soit trop malmené par l'ouragan et ne s'écrase.

Nous étions à San Francisco pour les événements. Les voitures ont été progressivement abandonnées sur le pont du Golden Gate, bloqué à cause de cela. Les gens continuent malgré les bouchons à affluer sur le pont, depuis les 2 sens, augmentant ainsi la pagaille. Les gens ont un regard de désespoir dans leurs yeux. Les gens essayent de se déplacer dans les deux sens à la fois, essayant simplement d'aller ailleurs, n'importe où sauf là où ils étaient. Un enfant abandonné pleure, seul dans un coin, et personne ne prend la peine de s'en occuper.
Des émeutes éclatent dans la ville. Le pillage est endémique et se répand rapidement, comme pour les émeutes de LA mais répandu cette fois-ci dans tous les secteurs de la ville. Les incendies sont partouts. La police n'est plus là pour empêcher les pillages, ou du moins n'y fait plus attention. Aucune loi, et tout fiche le camp.

Le visage de Mark est froid comme un masque alors qu'il raconte tout cela, gardant ses émotions déconnectées pour qu'il puisse passer outre et continuer son récit.

Les services étaient défaillants. Les gens n'ont pas réussi à rejoindre leur boulot. Les pannes de courant n'ont pas été réparées. Les lignes téléphoniques sont devenues mortes. Les pompes à essence étaient verrouillées et les stations fermées.

Mark s'arrête une minute, reprenant le contrôle de ses émotions. Mark secoue la tête.

Un milieu de matinée sans fin sur la côte Est, aux effets ravageurs. .

Puis l'histoire de Mark devient personnelle.

Nous avons vu ça de l'avion. Les gens marchaient en petits groupes. Les autoroutes et surtout les ponts routiers étaient bloqués par des voitures en panne d'essence, abandonnées là où elles se trouvaient. Et pendant tout ce temps nous pouvions entendre la Terre gémir. Je ne pense pas que j'oublierai un jour ce son.

Big Tom hoche la tête, en accord avec Mark concernant ce son, et Mark continue :

Nous avons entendu dire que des groupes religieux pensaient que la fin du monde était arrivée et que beaucoup de gens, même athées, se suicidaient, emmenant toute leur famille avec eux, supprimant d’abord les enfants, exactement comme les adeptes de Jim Jones.

Mark se penche en arrière, résigné, les yeux baissés sur les pieds de ceux qui entourent le feu de camp. L'histoire redevient alors personnelle.

Brian et moi étions au-dessus des terres quand ça nous a frappé. Nous avons perdu le contrôle. En premier, La boussole est devenue folle...

Mark se revoit dans le poste de pilotage du petit avion, la boussole qui commence à se comporter de manière erratique. Brian s'empare de leurs cartes pour les guider. Mark a une main sur les commandes et de l'autre secoue une carte pour l'ouvrir, une expression frénétique sur le visage. Les mainsde Brian s'agitent inutilement, essayant d'aider à ouvrir la carte.

Puis le ciel a commencé à danser autour de nous... Et quand les vents nous ont heurté, nous n'avions pas d'autre choix que d'atterrir et de débarquer rapidement !

Mark se tait une minute, cherchant dans sa mémoire ce qu'il aurait pu manquer à son récit.

A un moment, nous avions été nombreux à aller à la plage, et je me souviens avoir regardé cette vaste étendue d'eau et je me suis demandé sur le coup ce que ça ferait de voir cette masse d'eau se lever et de se précipiter sur moi. Vous savez, une vraiment très grosse vague. Celles qui arrivent après un tremblement de terre ou quelque chose comme ça.

Mark visualise une grande ville côtière, vue de profil et à distance de sorte que l'eau et la ville ont chacune la moitié de la scène. L'eau commence à s'élever du côté bord de l'eau de la scène, puis se lève rapidement, une énorme vague arrondie aussi haute que certains gratte-ciel se dirigeant vers la ville. La vague se déplace régulièrement, avançant progressivement comme une marée plutôt que comme une vague imposante et brisante sur le point de s'écrouler. Cela inondant la ville plutôt que de s'écraser depuis le haut sur la ville.

La dernière chose que nous avons entendu était le speaker de la radio, qui criait... "Ça arrive... Oh mon Dieu, nous allons tous nous noyer." Puis la radio s'est tue soudainement.

Netty brosse les cheveux de Tammy qui est assise mollement, pétrifiée dans une absence d’émotion qui pourrait faire croire qu'elle est d'une nature calme et impassible. Netty raconte à présent sa propre histoire.

Nous étions dans un hôtel de la station balnéaire de Clearwater, en Floride, le Clearwater Resort. Nous étions en train d'attendre car le téléphone ne marchait plus et personne ne savait ce qui se passait. J'étais en haut, dans ma chambre, en train de me changer ... J'ai entendu la voix d'une femme supplier ... "Pas mes bébés, s'il vous plaît, ils sont si petits". Puis j'ai entendu des coups de feu, puis le silence. Je me suis glissé sous le lit, discrète et silencieuse comme une souris.

Martha s'approche et prenant la main de Tammy, l'éloigne pour qu'elle n'entende pas la suite de l'histoire.

C'était les frères Groggin. Plus tard, je me suis rendu compte qu'ils avaient tué tous les autres pensionnaires pour s'entraîner à tirer sur des cibles vivantes. Ils les ont massacré quand les pensionnaires revenaient de la pêche. Presque tout le monde était allé là-bas pour échapper à la chaleur, vous savez. J'ai vu les morts plus tard quand je me suis échappé, ils avaient encore les cannes à pêche et les poissons à la main, couchés dans leur sang et tordus par l'agonie. Tous morts.

Netty imagine la scène : Les vacanciers qui reviennent de la pêche, parlant entre eux. Tout à coup un des vacanciers est rejetté violemment en arrière, du sang giclant de son visage et de son cou, éclaboussé de sang sur tout le devant de sa chemise. La panique se lit sur le visages des autres vacanciers, tournant la tête dans tous les sens pour essayer de déterminer l'origine du tir, essayant de discerner ce qui se passe.

Netty se revoit ensuite, tremblante sous le lit, n'osant pas bouger.Les frères Groggin sont en bas, se saoulant et riant de leurs exploits.

Ils parlaient en rigolant de ce à quoi les gens avaient l'air quand les balles les avaient frappées, comment ils réagissaient, le regard sur leurs visages à ce moment-là. Puis les frères poussaient de hurlements de rire et embrayaient sur la description d'une autre de leurs victimes. J'étais malade, tremblant si fort que j'avais peur de bouger. J'essayait de ne pas respirer, de ne pas bouger, de ne pas faire de sons qui pourraient être entendus.
Les frères Groggin se considèraient maintenant comme les maîtres de la station balnéaire de vacances, station où ils n'ont jamais été les bienvenus. Ils fanfaronnaient, posant leurs bottes crottées sur les coussins du mobilier, dévalisant le bar et jetant les bouteilles vides sur les lampes et les verres. Pas de téléphone, pas de loi, les frères pouvaient faire tout ce qu'ils voulaient. Ils disaient que c'était plus amusant que de se rouler un joint...
Ils se sont ensuite déplacés de chambre en chambre pour voir ce qu'ils pouvaient trouver, à la recherche d'objets de valeur. J'ai retenu mon souffle quand ils sont entrés dans ma chambre, je n'ai pas respiré et ils ne m'ont pas vu.

Netty se revoit descendre prudemment les escaliers, ses chaussures à la main et restant contre le mur pour voir la pièce principale sans que les frères Groggin ne voient ses pieds.

Plus tard, je me suis faufilée en bas par les escaliers quand tout fut redevenu calme. Ils étaient endormis, ivres et ronflaient. Je suis allé à la grange et j'ai sellé mon cheval. Il me suit sans faire de bruit après l'avoir caressé un peu. Calme et discret lui aussi comme une souris.
J'ai marché le long de la haie, sans monter sur le cheval pour qu'ils ne puissent pas me voir. Je ne suis monté sur le cheval qu'une fois au-delà des arbres. Je pensais que je m'étais éloigné suffisamment. Mais pendant que je m'éloignais, j'ai cru voir quelque chose bouger près de la maison. Je pense qu'ils m'ont vu à ce moment-là. Ils m'ont poursuivi. Je n'avais pas de cachette car le soleil ne descendait jamais. J'étais le seul témoin de leurs crimes.

Netty jette un coup d'œil autour du groupe, et voit que tous les regards sont sur elle, attentifs.

J'étais le seul témoin vivant de leurs crimes, et ils ne voulaient pas me laisser m'enfuir. Les femmes mortes ne racontent pas d'histoires. Mais je pense qu'ils faisaient aussi une chasse à l'homme pour exercer leur pouvoir / sentiment de domination. Leurs armes font la loi, je suppose. Ces gars sont sadiques. Une fois qu'ils sont arrivés au sommet/pouvoir, mieux vaut ne pas imaginer ce qu’ils en feraient.

Netty se tait une minute, mettant la peur qu'elle avait ressentie dans un compartiment de sa mémoire qu’elle ne veut plus jamais rouvrir. Prenant une profonde inspiration, Netty jette un coup d'œil autour du groupe pour signaler un changement dans l'histoire.

J'ai fait marcher son cheval dans le lit d’un cours d’eau, pour essayer de perdre mes poursuivants. Marchant à côté du cheval, j'avais de l'eau jusqu'aux hanches par endroits. Soudain, le cheval et moi avons été jetés sur le côté, les jambes du cheval s'agitant follement dans l'air et donnant des coups de sabots alors qu'il essaie de se redresser. J'atterris à plat ventre sur l'eau, le souffle coupé par ce plat. Quand je suis revenue à moi, légèrement KO, tout ce que je voyais c'est des coups de sabots désordonnés et des éclaboussures partout. C'était une bonne chose que je ne montais pas mon cheval à ce moment-là. Mon cheval était presque à l'envers. Mais finalement nous étions tous les 2 OK, l'eau ayant amorti le choc.

Netty fait une pause pour reconstituer l’histoire, rassemblant les morceaux.

Apparemment, les frères Groggin étaient saouls, pâteux comme de la viande molle. Les conducteurs ivres sont toujours ceux qui survivent à l'accident. C'est ce qu'on eu les frère Groggin.

Netty redevient silencieuse, arrivée au bout de son récit. Elle termine son histoire avec une question.

Je me demande si ceci n’est pas en train de se passer un peu partout.

La plupart du groupe garde le silence autour du feu de camp, sauf Brian qui s’est mis à ricanner en gloussant au cours de l'histoire, bien qu’il n’y ait rien de drôle. Les autres ne l'ont pas remarqué sur le coup, concentrés sur les récits.

Des chocs répétés, appliqués sur des individus faibles/fatigués, font remonter en surface les instabilités mentales. Tammy développe des symptômes de schizophrénie catatonique, et Brian qui délire. Brian dit :

...Ça arrive aux chèvres...

Tout le monde fixe Brian qui continue de glousser doucement, le regard dans le vide levé vers le ciel.


La faible lumière de l'aube éclaire Big Tom qui revient péniblement du ruisseau, une serviette jetée sur l'épaule. Il rencontre Red, qui sirote un café sur la table multiusage, qui en ce moment fait office de table de cuisine. Les deux hommes sont seuls car les autres dorment. Big Tom jette un coup d'œil vers le ciel et commente tranquillement.

On dirait que cette couverture nuageuse ne se lèvera jamais.

Red se frotte le bout des doigts.

J'ai vu cela quand j'étais stationné aux Philippines - quelque part, des volcans sont entrés en éruptions.

Big Tom se penche sur le feu de camp fumant, ramasse une cafetière noircie et, se versant une tasse de café, parle d'une voix calme.

A-tu remarqué ce qui arrive à Tammy ?

Red redoutait ce moment. Il essaie d'être rassurant, autant pour Big Tom que pour lui-même.

Je pense qu'elle va s'en sortir, c'est juste sa maison de poupée qui lui manque. La façon dont elle tient sa poupée de chiffon, on croirait que c’est tout ce qu’elle possède au monde.

Clairement désireux de parler de ce qu'il voit arriver à sa petite fille, Big Tom ne veut pas en rester là si facilement.

Elle n'a jamais été comme ça, tellement calme ! Je ne pouvais même pas la faire parler hier, elle n'a pas voulu dire un mot. Sacrément étrange.

Martha sort de l'une des tentes de fortune, brossant les cheveux de son visage endormi et paisible. Elle sourit légèrement aux deux hommes de sa vie et s'approche du feu, ouvrant le couvercle de la cafetière pour inspecter le contenu.

Je vous ai entendu parler de Tammy. Je sais qu’elle ne va pas bien, et si je pouvais, je l’emmènerais tout droit voir le docteur Townsend, mais il n’y a aucune chance avec ces routes coupées.

Un son plaintif flotte dans les airs, lointain mais incontestablement humain. Mark sort précipitamment d’une des tentes, faisant dans sa hâte tomber les couvertures qui tiennent lieu de mur. Il paraît soucieux sous son air endormi.

Où est Brian, avez-vous vu où il est allé?

Red pointe du doigt la direction de la plainte, le visage inexpressif comme s’il n’y avait rien de spécial. Mark se précipite dans cette direction, ajustant sa chemise dans son pantalon et enfilant ses bottes en chemin.

En voilà un autre qui ne va pas bien. L’autre jour je l’ai trouvé en train de parler dans le vide.


Une semaine plus tard, des citadins arrivent au ranch, venus à pieds de la petite ville voisine. Ils se traînent dans l'aube pâle, le long de la route sinueuse qui passe devant la ferme. L'un d'eux tire un chariot, initialement prévu pour être tiré par un poney. Un homme se trouve dans le chariot, s’agrippant aux deux côtés pour résister aux secousses, son corps meurtri se plaignant du mouvement. Herman, un homme de haute taille, vient en tête du cortège. A la vue du ranch, les marcheurs avancent avec plus d’énergie, dans l’espoir d’avoir trouvé d’autres survivants.

Big Tom regarde de loin cette procession, assis à table avec Martha et Red, ses mains autour d'un mug de café. Un mug est une grosse tasse de café de 125 ml, soit 1/4 de litre.

Nous avons plus de visiteurs.

Red tourne la tête brutalement, puis se lève pour aller prendre son fusil. Big Tom pose son mug et se dirige dans la direction des voyageurs, ayant apparemment jugé à leur apparence qu’ils ne constituaient en rien une menace. Big Tom marche d’un pas décidé et s'approche avec la main tendue, reconnaissant le chef de file. Le groupe se précipite autour de Big Tom, tout le monde voulant parler à la fois. Clara, une femme mince aux cheveux gris décrit les tornades de feu descendant du ciel qui ont consumées un groupe, dont ils ont retrouvés les corps carbonisés.

Ils ont tous été brûlés, comme s'il n'y avait pas eu d'échappatoire, comme si le feu leur était tombé dessus depuis le ciel!

Son mari, Len, un homme mince et voûté, se joint à la conversation.

Et ce n'est pas ce qu'on a vu de plus bizarre !

Clara jette un regard son mari.

Tu parle de cet homme mitraillé à mort?

Len, peu habitué à être détourné de ce qu’il raconte, reprend.

Les grêlons de pierre en avaient tué un autre, qu'on a trouvé le long d'une route, à côté de sa voiture abandonnée. La voiture de cet homme avait des vitres brisées et était marquée de coups. Cest comme si l'homme avait été lapidé à mort, ces petites pierres partout sur la route, et sa voiture semblait encore pire.

Clara est trop excitée pour rester silencieuse.

Pauvre homme, on dirait qu'il a essayé de s'enfuir quand les fenêtres se sont brisées, et il n'y a juste pas eu d'échappatoire.

Big Tom demande :

Ces gens de la ville ?

Len et Clara se lancent un regard furtif, mais alors Clara baisse les yeux, regardant la route avec des larmes qui lui montent aux yeux, temporairement accablée. Len montre du doigt la ferme démantelée.

Ça n’a pas été tellement mieux que pour vous, et ceux qui ont survécu se sont sauvés exactement comme nous autres, pour chercher de l’aide.

Clara ajoute plus de détails, retrouvant à nouveau la voix.

Dans la ville, certains qui se tenaient sur un large porche de véranda à ce moment-là ont été jetés et se sont étalés là où ils sont tombés, brisés et sanglants, sans aucune chance de survivre à l'expérience.
Mademoiselle Farmington a été projetée dans le cours d’eau, contre le barrage, on aurait dit une de ces tomates que les enfants jettent le samedi soir, elle était toute rouge et écrasée.

Big Tom n'a pas manifesté de surprise à tout cela.

Où allez-vous?

Personne ne répond, mais après un moment de silence, Herman fait.

N'importe où ce n'est pas comme ça.

Big Tom fait un signe de tête et les invite à retourner au camp.

Nous ne sommes pas beaucoup mieux lotis, mais nous avons du café et des pommes de terre frites que nous pouvons partager.
Venez.

Ami et ennemi

Dans les contreforts boisés bordant la vallée, des préparatifs silencieux et efficaces ont eu lieu. La construction se poursuit après une averse récente. Un grand dôme argenté est en train d'être érigé, des grues soulevant un panneau au fur et à mesure que les ordres sont aboyés. Les militaires, semble-t-il, n'ont pas été pris par surprise. Ils se sont préparés pour ce jour en préparant à l'avance des matériaux de construction, et ont rapidement fini la construction d’un dôme avec des corps de l’armée assignés à cette tâche. La conception du dôme est la même que celle des dômes lunaire et martiens, scientifiquement étudiés pour résister aux vents violents, aux tremblements de terre et suffisamment grands pour contenir leur propre atmosphèren et confortable pour les habitants.

La conception du dôme a été obtenue par contrainte d'un contacté Zeta.

Le général Flood, une veine palpitant dans son cou taureau, est impatient.

Je veux que cela soit fini pour hier ! Nous pouvons nous attendre à ce que les vagabonds commencent à arriver, et ça va chauffer s'ils nous trouvent à l'air libre!

Son sous-officier, le sergent Hammond, se dépêche de rattraper le général. Plus petit et maigre de constitution, il lève les yeux vers le général, sa voix pleine d'inquiétude.

Monsieur, je n'ai toujours pas réussi à joindre ma femme et mes enfants. Aucun de nous n'a pu.

Général Flood répond brusquement.

Je vous ai dit que cela devrait attendre ! Nous avons de plus gros soucis en ce moment.

Alors que le général Flood et le sergent Hammond continuent à marcher vers le chantier de construction, 2 individus sortent du bosquet d’arbre. Jonah porte un jean et une chemise blanche usée par de nombreux lavages, ses bottes poussiéreuses et ses cheveux ébouriffés attestant de son attitude négligente à l'égard des apparences. Il est debout à côté d'un grand Zeta dont le corps mince comme un pieu et les bras fin comme des bâton sont presque choquants quand on le voit côte à côte à côté du mince Jonas. Le Zeta fait un geste vers les militaires qui s’éloignent, son visage se tourne vers Jonas, communiquant en silence. En réponse à cette conversation télépathique, Jonah répond.

Je sais. Ils l'ont volé à un contacté. Mais ils n'ont pas grand-chose à part la forme. Ce n'est pas comme nos dômes.

Le Zeta pose sa main sur l'épaule de Jonas, et jette un coup d'œil vers le haut, Jonah acquiesce.

Oui, je sais, avant qu'on nous repère.

Là-dessus, les deux s'élèvent dans les airs d'1 ou 2 mètres et s'éloignent en flottant de ce lieu, avant de se dissoudre dans une autre dimension.


Jonah et son compagnon Zeta marchent vers le centre d'une clairière naturelle, où se trouve un grand dôme d'argent. Jonah dit :

Les blessés que vous avez amenés ont été agités et veulent aider, ils ont demandé à travailler.

Ils approchent de la porte d'entrée au niveau du sol. A l'extérieur, il y a plusieurs Zetas minces qui transportent des blessés ou aident ceux qui sont trop faibles pour entrer dans la ville-dôme à partir d'un engin en forme de soucoupe gris terne suspendu à 1 mètre du sol. Ceux qui ne peuvent pas marcher sont transportés par lévitation, leurs corps couchés flottant à côté d'un Zeta qui marche.

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Billy est dans un champ, situé derrière le campement, en train de récolter des pommes de terre. Il fait sombre comme à l’aube naissante, les arbres se découpent crûment sur le ciel gris. Leurs feuilles sont tombées, mais pas comme en automne quand elles prennent des couleurs puis tombent, mais parce que la moitié environ ont jauni et sont tombées tandis que les feuilles restantes sont encore vertes. Billy gratte la terre avec une petite binette et creuse avec une pelle, retournant la terre à la recherche de pommes de terre. Il a un sac en tissu posé à côté de lui sur le sol, déjà bien rempli des pommes de terre qu’il a trouvé. Il est poussiéreux et franchement sale en certains endroit, autant par son travail que par des bains peu fréquents. Billy semble désespéré, et il fronce légèrement les sourcils. Il ne remarque pas qu'il n'est plus seul.

Soudain, Billy remarque un pied gris de Zeta gris, massif car évolué ainsi au fil des éons pour faire face à une lourde force de gravité, et la jambe mince au-dessus. Le pied semble être botté dans un matériau gris sans couture. Billy se recule pour se mettre à l'aise en position assise, allongeant les jambes devant lui, et lève les yeux, en plissant des yeux. Le Zeta tient une fiole fermée par un bouchon, en verre fumé de couleur. Les doigts longs et fins du Zeta sont enroulés autour de la fiole, maintenue par une apparence de pouce, une bosse là où devrait être un pouce. Billy commence à parler au Zeta comme s'il l'avait fait toute sa vie, comme s'il n'y avait rien d'inhabituel dans la scène. Comme s'il parlait à un membre de sa famille en qui il avait confiance.

Tammy ne veux parler à aucun d'entre nous.

Les larmes lui montent aux yeux. Billy continue, avec un tremblement dans la voix.

Elle me fixe comme si elle ne me voyait pas.

Sa respiration s’accélère comme s’il était sur le point d’éclater en sanglots, les larmes commencent à couler sur son visage.

Je lui ai demandé de venir avec moi pour creuser, comme ça on aurait pu sauter par dessus les cailloux comme avant, et elle n'a rien répondu. Rien !

Billy essuie les larmes de ses joues avec la paume de sa main, secouant soudain la tête puis la relevant pour présenter un regard clair au Zeta. Il y a un moment de silence alors qu'il écoute évidemment quelque chose avec intensité. Il jette un coup d'œil à la fiole et lève la main pour la prendre au Zeta. Il sourit légèrement à travers ses larmes poussiéreuses, jetant un rapide coup d'œil au Zeta pendant ce temps, en guise de remerciement.


Bien qu'il soit midi, il fait encore sombre, comme si c'était le début de l'aube d'un jour très couvert. Martha est en train de trier le linge après une lessive, assise sur une chaise en plein air, le linge éparpillé devant elle en petits tas sur le sol. Ses deux enfants sont derrière elle sur l'herbe. Billy apporte à Tammy ce qui semble être un verre d'eau. Tammy lève faiblement la main et Billy l'aide à boire le verre.


Les problèmes liés à la pénurie alimentaire ne tardent pas à apparaître, avec des solutions créatives pour y pallier. Martha cuisine ce qu'elle et Red décident qu'il est bon de manger, et les autres n’ont pas à poser de questions. Cela a inclus des éléments de menu atypiques tels que les vers de terre ramassés sur l'herbe humide après la dernière pluie et certains opossums lents que Red a attrapé (sorte de gros rat ou gros loir d'Amérique du Nord), ainsi que les plantes sauvages comestibles.

Big Tom s'avance pour parler à sa femme, s'accroupissant devant elle afin qu'ils puissent parler en face à face. Il lève les yeux vers son visage.

Nous sommes à sec pour la citerne, complètement à sec, et les conserves disparaissent aussi vite.

Elle continue de raccommoder malgré tout cela sans perdre son point, bien qu’elle lève les yeux pour regarder son mari en face afin de lui faire comprendre qu’elle l’a entendu. Elle sourit.

Red ramène un opossum, et j'ai une soupe spéciale ce soir, vous verrez, tout ira bien.

Big Tom fait une pause, puis se lève.

Une soupe spéciale?

Martha commence à prendre le linge de l’un des tas, pour le plier sur ses genoux comme si elle était prête à partir, et dit,

Ne t’inquiète pas, tu trouvera ça bon.


C’est l’heure du souper dans le campement, où le groupe s’est rassemblé autour d’un feu de camp qui rougeoit faiblement au milieu des tentes de fortune. Martha est en train de servir des louches de soupe et distribue les bols l'un après l'autre. Certains membres du groupe mangent de bon cœur, d'autres reniflent et hésitent. Herman dit :

Qu'est-ce qu'il y a dedans?

Il ne reçoit aucune réponse ni même un signe de la part de Martha. Tous finnissent par manger. Billy et Tammy sont assis dans l'herbe derrière Martha. Billy tend un bol à sa sœur Tammy. Tammy dit :

Merci.

Tammy commence à manger presque comme elle le fait d'habitude. Martha, boulversée, a cessé de servir, sa louche figée dans l'air, les larmes lui montant aux yeux. Elle se reprend, inspire profondément en essayant de masquer l’émotion dans sa voix.

Quelqu’un en veut encore ?

Tammy jette un coup d'œil à son frère et glousse, partageant une blague, tous deux inconscients de l’émotion qui secoue par vagues leur mère.

Len et Big Tom sont assis à une table. Len dit :

Il y a beaucoup d'histoires autour de ces camps. Des camions ont été vus y aller régulièrement, juste avant les bouleversements.

Big Tom est intrigué.

Peut-être devrions-nous organiser une virée tous les 2 et découvrir ce que c'est?

Adorant toujours les bons sujets de commérage, Len continue.

À plusieurs reprises, à plusieurs reprises et parfois tous les jours ! Jed n’est pas le seul à l’avoir observé non plus, il y en a plein qui l’ont vu aussi.

Len prend un peu de soupe avec un morceau de pain et, après avoir mordu un morceau, continue avec beaucoup de sérieux.

Je te le dis, ils ont un camp là-bas, ils ont des provisions, et c'est là que nous devrions nous diriger.


Traversant un champ à ciel ouvert, Big Tom, Len, Herman et Jane, qui a insisté sur la nécessité d’une présence féminine, marchent péniblement sous les nuages bas. Ils ont des sacs à dos ou des besaces de toile sur les épaules, des bottes et des vestes ouvertes, et ils portent leurs vêtements sur eux plutôt que dans leur sac. Jane est la dernière, suivant Len qui est en fait le plus lent. Jane le fait par égard pour lui, le stabilisant de temps en temps s'il perd l'équilibre en mettant une main contre son sac à dos, à son insu. Une personne bienveillante, elle peut voir que ce vétéran est un homme affaibli, luttant pour ne pas le montrer. Len montre du doigt une brèche dans la colline qui a surgi devant eux.

Là bas, ils sont montés en conduisant leurs engins et ils ont complètement disparu entre ces collines. Personne ne sait rien de ce qu'il y a là-bas, et les panneaux disent «propriété privée».

Une sentinelle sur la colline surveille les quatre personnes qui marchent à grands pas vers lui. Il prend un téléphone portable et parle doucement.

Entrants, 4 heures.

Le groupe s'approche d'une fente dans les collines, des arbres des deux côtés. Len parle avec animation, agitant son bras dans telle ou telle direction pendant qu'il décrit ce que lui ou d'autres ont vu de loin concernant le camp. Jane regarde lentement d'un côté à l'autre, scrutant la forêt maigre qu'ils approchent. Soudainement Jane se fige, sa main se lève dans la direction des bois, des militaires approchent à grands pas, son avertissement coincé dans sa gorge alors que celui des militaire éclate.

Arrêtez ! Halte ou je tire ! Identifiez-vous !


Le quatuor est mené rudement dans une grande pièce dépouillée dont seul meuble est une table posée au centre. Seul le centre de la pièce est violemment éclairé, le reste de la pièce étant plongé dans l'ombre. Le général Flood sort de l'ombre pour leur faire face.

Qui vous a conduit ici? Cette installation n'est pas sur la carte! Qui vous a conduit ici!

Sa voix est ferme et ses questions ne semblent attendre aucune résistance de leur part. Len se tortille, et les autres le regardent. Len prends la parole :

Eh bien, monsieur, j'étais autrefois dans l'armée et...

Le général Flood l'interrompt brutalement :

Venez en au fait ! Qui vous a conduit ici !

Len déglutit.

Moi.


Le groupe est séparé, Big Tom et Jane sont emmenés dans une autre salle d'interrogatoire. En face, un groupe d'interrogateurs militaires en chemise, manches retroussées au-dessus du coude, cravates défaites et cols de chemise ouverts. Cette salle est petite et étroite, de sorte que les interrogateurs sont littéralement collés aux visages de ceux qu'ils interrogent. Big Tom et Jane sont interrogés sans relâche, avec des questions assénées sans répit pour les faire craquer. Le colonel Cage fait partie du groupe d'interrogateurs. Il demande :

Combien êtes-vous dans votre groupe ?

Big Tom répond.

Ma famille ? Incluez-vous les citadins ?

Un autre interrogateur demande,

Où avez-vous dit que vous étiez quand c'est arrivé?

Big Tom commence à répondre.

J'étais au ranch, mais...

Il est interrompu par un second interrogateur.

Herman, c'est qui ?

Toujours en difficulté pour répondre aux questions qui lui sont posées, Big Tom dit :

Il est, il est le maire de la ville.

Big Tom essaie de répondre aux question comme si elles avaient un sens, ne comprenant pas qu'elles sont juste destinées à les secouer, à leur faire perdre leur sang froid. Par contre, Jane le comprend intuitivement. Elle est calme, et les surprends tous en posant d'une voix claire :

Combien de temps pensez-vous que ça prendra avant que la ville entière arrive ? Que ferez-vous de ces gens ?

Sa question fait taire les inquisiteurs, car elle a bien vu ce qui les fait paniquer, au delà de leur bravade affichée.


Finalement autorisé à sortir dans la cour du camp, Big Tom et Jane sortent d'une porte pour rejoindre Herman et Len. Ils se tiennent debout serrés les uns contre les autres, dans l’attente, au milieu d’un complexe de huttes aux couleurs ternes. Le général Flood et son attaché toujours présent, le sergent Hammond, sont sur un côté de la cour. L'équipe d'interrogateurs qui ont interrogé Herman et Len lui font le rapport de ce qu'ils ont appris. Le colonel Cage rejoint le groupe du général, secouant la tête pour indiquer leur échec. Le Général Flood l'informe :

Ça n'a pas d'importance, le petit rat a craché le morceau. Ils venaient du ranch Shaw, juste au nord d'ici.

Le général Flood fait une pause, puis dit :

Assurez-vous qu'ils ne sont pas suivis.

Puis il fait brutalement demi-tour et s'en va, laissant ses ordres ambigus.


Big Tom et Jane doivent retourner au ranch, accompagnés de 6 militaires. Ils reprennent le chemin de l'aller, qui suit une vallée étroite. Tous marchent en file indienne. Les militaires portent leurs armes, négligemment pointées vers le bas, mais néanmoins prêtes à servir. Big Tom, abattu, marche lentement en tête, essayant de penser à une solution pour fuir ou les bloquer, ne voulant pas ramener les militaires vers sa famille. Le soldat derrière lui lui donne une poussée, le faisant trébucher légèrement. Le colonel Cage, qui marche derrière Jane, s'avance rapidement, réprimande le soldat qui vient de pousser Big Tom, et se mets à marcher côte à côte avec Big Tom. Le colonel Cage accélère l’allure pour mettre un peu de distance entre eux et les autres, puis demande doucement à Big Tom.

Y a-t-il un coin tranquille un peu plus loin où l’on pourrait faire une halte ?

La proposition n’échappe pas à Gros Tom, qui a jaugé le Colonel comme un homme bon, et après un moment de réflexion, il dit :

Au ruisseau là bas. C’est....

La conversation est interrompue, le colonel Cage tourne violemment la tête de tous les côté, entendant un son léger mais familier, et se retourne immédiatement vers la file d'hommes qui les suit. Il dit :

Où est-elle!

Sa question est accueillie avec un regard froid par ses hommes, mais comme Jane et deux des soldats ont disparu, le colonel a sa réponse. Le colonel remonte rapidement le sentier qu'ils viennent d'emprunter, et trouve bientôt ce qu'il redoutait. Derrière un bosquet d'arbres, Jane se débat avec l'un des hommes qui essaie de lui arracher le pantalon, tandis que le second soldat, une arme automatique à la main, observe la scène appuyé contre un arbre. Le second soldat tourne la tête, et voit le Colonel Cage qui court vers eux. Le violeur repousse Jane et remet rapidement son pantalon à la volée, essayant de cacher ce qu'il s’apprêtait à faire. Le second soldat lève son arme et tire sur Jane. Elle s'écroule en arrière. Le colonel Cage arrache l'arme au tireur. Ce dernier se justifie :

Elle essayait de s'échapper.

Sans hésiter une seule seconde, le colonel Cage abaisse l'arme et tire sur le soldat dans l'estomac, puis l'écarte rapidement pour faire la même chose au violeur. Pendant que les deux se tordent sur le sol, agonisant, le colonel Cage se dirige vers Jane, s'apercevant d'un seul coup d'œil qu'elle est définitivement morte, la plus grande partie de sa tête ayant été arrachée par la balle.

Il tourne les talons et retourne à grands pas rejoindre la colonne, son visage tendu et un film de sueur sur son visage livide. Il respire fortement, sous le coup de la course et de l'adrénaline. Alors qu'il regagne la file d'hommes en train de l'attendre, il dit simplement :

Allons-y.

Il se dirige vers l'avant pour rejoindre Big Tom qui l'attend avec une expression anxieuse sur son visage. Le colonel réponds à la question muette :

Ils sont tous morts, c'est fini.


Les femmes lavent des vêtements sur des rochers le long du ruisseau. Netty est énervée après Daisy, qui est assise en arrière et trempe à peine sa part de linge dans l'eau, comme si elle espérait qu’on vienne l’aider. Netty la regarde fixement :

Je ne vais pas le faire pour toi cette fois-ci. Réveille-toi, c'est ça ou vivre dans la crasse.

Clara se lave vigoureusement, l'air inquiète. Finalement, elle s’accroupit, face à Martha.

Pense-tu que nous les reverrons ?

Martha jette un coup d'œil rapide par dessus son épaule, s'assurant que ses enfants qui jouent le long du ruisseau sont hors de portée de voix, et réponds :

Big Tom connaît cette zone et Len sait comment leur parler.

Martha n'a pas répondu à la question, mais il est évident en voyant son visage qu'elle aussi s'inquiète et essaie juste de faire bonne figure. Soudain, Tammy crie :

Papa!

Tammy court et Billy saute sur ses pieds pour la suivre. Big Tom et le Colonel Cage sortent des bois, suivis des trois soldats restants. Les femmes se sont levées alors que Big Tom s'approche de Martha avec un regard sombre. Martha est anxieuse, et regardant son mari dans les yeux :

Où sont les autres ?

Le visage grave de Big Tom tient lieu de réponse.

Clara est la seconde à arriver à Big Tom, anxieuse.

Où est Len? Où sont-ils! Au nom de Dieu, dis-moi ce qui s'est passé!

Big Tom pose sa main sur l'épaule de Martha.

Ils vont bien, bien, ne t'énerve pas. Ils sont restés derrière et ils vont tous bien.

Martha appuie son visage contre l’épaule de son mari, mordant sa lèvre inférieure tremblante et luttant contre les larmes, essayant de déguiser son chagrin au reste des femmes et à ses enfants en faisant semblant de vouloir serrer son mari pour montrer sa joie de le revoir.

En mouvement

Danny explique le basculement des pôles à Mark et à Brian, rapportant ce qu’il arrive à se souvenir de l’exposé du Professeur Isaac.

Cela se produit tous les quelques milliers d’année, et ce qui reste de l’humanité recommence tout à nouveau. Je suppose que nous avons de la chance d’être vivants.

Brian bouge en permanence, s'arrêtant après chaque mouvement pour un moment, d’abord faisant mine de se lever puis se rasseyant, croisant une jambe puis la décroisant pour croiser l’autre, mettant les mains sur ses genoux puis croisant les bras, se donnant une tape dans la nuque et cherchant dans sa main un insecte qui n’y est pas, balançant la tête d’un côté et de l’autre comme s’il regardait dans toutes les directions, agité et un peu parano.

Mark est dans le déni et ne veut pas croire au pole-shift, même s'il l'a personnellement expérimenté.

Oui, eh bien, je n'en crois rien. Si quelque chose comme ça allait se passer, le gouvernement nous l'aurait dit. C'était juste un tremblement de terre.

Un regard de soulagement traverse le visage de Mark alors qu'il voit Big Tom et les femmes s'approcher.

Mark commence à se lever de son siège pour saluer le groupe qui s'approche. Danny se retourne aussi, un sourire sur son visage, mais son sourire disparaît lentement lorsqu'il voit qu’il manque des membres. Brian a décampé dans les tentes à la vue des militaires. Gros Tom ajuste son ton de voix et prend la responsabilité du gros mensonge.

Ils nous attendent, nous devons emballer nos affaires et les rejoindre.

Heureux d'entendre ces nouvelles, Danny commence à hocher la tête et à marmonner.

Cool, on va partir d’ici.

Daisy s'approche de lui, commençant immédiatement son mode pleurnichard à nouveau, pensant que les choses redeviennent normales.

J'aurai besoin de voir la coiffeuse tout de suite, mes cheveux sont en désordre !

Elle tire sur son pantalon et son chemisier, essayant de se redresser et de revenir aux désirs de paraître qu’elle avait mis de côté. Big Tom rampe dans la tente où Frank faisait une sieste.

Allez, mec, c’est l’heure de partir.

Frank cligne des yeux et dit:

Vous êtes de retour? Où est Jane?

Big Tom persistant dans son gros mensonge, dit calmement :

Nous allons à leur rencontre. Dépêche-toi, prends tes affaires.


Martha trie dans ses objets ceux qu'elle emportera, mettant la plupart de côté, après quelques instants d'hésitation sur certains objets, regrettant de les abandonner. Finalement il n'en resta que quelques-uns seulement qui furent retenus. Après un court arrêt où elle se met à genou, levant les yeux des objets qu'elle a trié, elle s'aperçoit qu'un Zeta est venu s'asseoir en face d'elle, ses longues jambes minces pliées en posture de yoga et les coudes sur chaque genou, des mains tendues au centre comme si un dialogue se passait. Martha dit :

Tu vas me manquer...

Soudain, elle sourit et son visage s'éclaire, riant même un peu de soulagement lorsqu'elle se rend compte que le contact avec les zetas n'étaient pas liés au ranch, où elle a vécu toute sa vie.

Elle se remet à trier, maintenant avec plus de ferveur et d'énergie. Revenir à la tâche urgente. Martha se sourit à elle-même.


Le groupe quitte le ranch, n’emportant que des taies d’oreiller bourrées de leurs affaires personnelles. Martha s'arrête un instant, se retourne légèrement pour jeter un coup d'œil en arrière, avec un long regard triste sur la maison et le style de vie qu'elle sait qu'elle ne reverra plus jamais. Tammy à ses côtés lui dit :

Penses-tu qu'il y aura une maison de poupée?

Martha, ne voulant pas remettre en question le retour récent de sa fille à la normalité, lui réponds rapidement pour la rassurer :

Je ne serait pas surprise. Je parie qu'il y aura même d'autres petites filles de ton âge.

Netty doit laisser ici son grand cheval baie libre, il n'aurait pas pu être caché pendant le déplacement. Elle lui rends sa liberté en retirant son harnais et en lui donnant une claque sur la croupe. Le cheval se dirige vers les grands champs ouverts.

Le colonel Cage marche avec Frank. Il vient de lui apprendre la mort de sa femme. Frank est pâle et bouge à peine.

Au moins, elle n'a pas souffert.

Le colonel est toujours furieux pour ce qui s'est passé.

Elle non, mais je me suis assuré que ça n'a pas été leur cas !


Big Tom et Danny ouvrent la marche. Big Tom explique la situation à Danny.

.. Je ne sais pas où nous allons, mais nous devons chercher à fuir le plus tôt possible. Ils ont été envoyés pour nous tuer.

Big Tom a une expression sinistre en disant cela, tout en jetant régulièrement des coup d'œil à Danny. Il doit vérifier le terrain devant eux entre ces regards, car le rythme est soutenu et le terrain difficile. Danny est confus et troublé, semblant continuellement vouloir dire quelque chose mais devant s’arrêter, les mots ne s’assemblant pas. Finalement il arrive à digérer la situation.

Donc ils sont tous morts, Len et Herman ?

Big Tom s'arrête, face à une question à laquelle lui-même ne veut pas faire face.

Je ne sais pas, mais nous pouvons le supposer, j'imagine. Ne dis rien de cela aux femmes.

Mark et Brian ont pris du retard, Brian s'asseyant régulièrement pour pleurer, se recroquevillant en boule et gémissant doucement. Mark est consterné, car les autres sont déjà loin devant eux. Il jette un coup d'œil à la file humaine devant lui, se demandant s'il faut appeler à l'aide, et décide finalement de ne pas le faire. Mark s'assoit à côté de Brian, l'entoure de ses bras, lui frotte le dos, berce sa tête contre son épaule. Brian dit, presque imperceptiblement :

Tout ce que je veux, c’est rentrer à la maison.

Mark semble calme et réfléchi, puis repousse Brian afin de le regarder bien en face.

Eh bien, peut-être que nous pouvons le faire !


Mark est presque surpris de voir l'épave de l'avion comme ils l'avaient laissée. L’avion est encastré dans des arbres, au bord du ruisseau. Les hélices tordues et une aile pliée à angle droit. Mark parle avec enthousiasme :

Tu te souviens du ballon d’air chaud dont je parlais au Club ? Je parie qu’on peut faire une installation de fortune ! On a les parachutes, et zut, si au moins on pouvait quitter cette zone de séismes…


La nuit tombe, et le groupe du ranch établi un campement. Les lits sont fabriqués à partir de paille ramassée dans un champ de blé voisin. Comme, par sécurité, ils n'ont pas allumé de feu de camp, ils doivent manger les restes froids des aliments qu'ils ont apportés - des pommes de terre bouillies et de l'eau provenant d'un ruisseau voisin. Daisy fait la grimace en buvant une gorgée de cette eau, et le Colonel Cage explique :

C'est du chlore, ça empêche la diarrhée.

Clara dit nerveusement à Martha, à voix basse.

Pourquoi ne nous laissent-ils pas allumer un feu ? Je n'aime pas ça, quelque chose ne tourne pas rond !

Big Tom, entendant cela, sent qu'il y a besoin de calmer le groupe. Il s'adresse à tous, parlant à haute voix pour que tout le monde puisse entendre.

Nous faisons attention pour ne pas nous faire voir. Nous ne voulons aucun problème. C'est seulement des précautions.

Billy aide Red à répandre de la paille qu'il a ramené du champ voisin, et se plaint à son grand-père :

Ca gratte. Pourquoi devions nous déménager ?

Red, qui a été informé par son gendre plus tôt, répond :

Nous ne pouvions pas rester au ranch pour toujours, fils. Nous étions à court de nourriture, et devenus trop nombreux.

Le groupe s'allonge sur la paille à mesure que les dernières lumières du jour s'évanouissent, trop épuisé pour discuter plus avant.


Le lendemain matin, le groupe remue dès l'aube. Le soleil n'est pas encore levé mais l'aube précoce fournit assez de lumière pour montrer le contour des arbres au loin et ici et là un membre du groupe se lever et s'étirer. Quand il est clair qu'ils sont tous éveillés, Martha leur annonce :

Je n'ai rien pour le petit déjeuner. Je suis désolé. Voici ce que je suggère. Chacun de nous regardera dans les environs, pendant notre marche, et cherchera quelque chose de comestible. Peut-être qu'à la tombée de la nuit nous pourrons avoir un bon festin !

Frank tapote sa poche de chemise et sourit quand il sent un ami familier dedans. Il en sort un guide de poche et le tient en l'air.

J'ai un livre, un livre sur les plantes sauvages comestibles et les champignons. Je l'amène avec moi au camping à chaque fois, juste au cas où je me perdrais dans les bois ou quelque chose comme ça.

Etonné, il se rend compte que pour une fois, lui, Frank, est le héros. Un léger sourire éclaire son visage. Vivant à nouveau, avec un rôle à jouer après la perte de sa femme Jane.


Le groupe se traîne avec moins d'énergie que la veille. Clara, qui est d'âge moyen, traîne franchement, et Netty s'approche d'elle pour prendre son sac. Le groupe est aligné en file indienne. Big Tom et le colonel Cage sont à l'avant de la ligne, s'approchant de quelques collines basses. Frank marche côte à côte avec Billy, qui se penche de temps en temps pour regarder une photo dans le petit livre de poche de Frank sur les comestibles sauvages. Frank est en train de faire des gestes, et Billy jette un regard de temps en temps pour regarder Frank en face, afin d'être poli, mais il aurait plutôt préféré avoir seulement le livre.

...Ceux-là sont sans danger, mais il y en a d'autres ici que nous ne voulons pas...

chardon

Martha et Tammy font des repérages pendant leur marche, sortant seulement quelques instants de la piste afin de cueillir une probable herbe comestible. Elles en prélèvent un échantillon, comme une feuille ou une fleur, tout en reprennant le rythme afin de retourner à leur place dans la file. Martha a enlevé une fleur pourpre d'un chardon, en prends une petite bouchée et tends un autre morceau à Tammy pour qu'elle teste la fleur aussi. Elles se sourient l'une à l'autre.


serpent

Un grand serpent (une couleuvre inoffensive) est surprise au cours de sa sieste au soleil. A l'approche des hommes, elle commence à se tortiller pour rejoindre la protection de quelques hautes herbes. Une botte militaire descend soudainement sur le serpent vers sa queue, le clouant au sol. L'un des soldats laisse tomber une pierre sur la tête du serpent et le serpent arrête de gigoter.


cresson

Un ruisseau, serpentant dans les bois, est un coup au soleil, un coup à l'ombre lorsqu'il passe sous les grands arbres et les bois épais. Red est entré dans l'eau, ramassant une plante vert clair en forme de dentelle qui pousse dans l'eau le long de la rive. Red charge son bras gauche avec la récolte tout en attrapant des poignées avec sa main droite, inconscient du fait que son côté gauche devient boueux et humide. Il a un sourire sur son visage. Le cresson d'eau est une belle découverte le jour où même une salade ordinaire serait appréciée.


Netty et Danny marchent ensemble en tête, Netty collée aux talons de Danny. Elle explique sérieusement quelque chose à Danny, qui, ennuyé, ne veut pas entendre. Il essaye de mettre de la distance entre lui et elle pour l'éviter. Netty le rattrappe continuement, cependant, tout en parlant sans arrêt :

. . Dans le monde entier. Nous sommes la seule culture qui ne le fait pas. Beaucoup de gras et de protéines. . . Eh bien, quoi d'autre allons-nous apporter à la casserole ce soir? Tu as de meilleures idées?

Ils tombent alors sur un tronc d'arbre à terre, tombé à côté du chemin, à moitié enfoncé dans le sol, l'écorce tombant. Netty pointe du doigt l'arbre mort et se dirige vers le tronc.

Là! Ça nous permettra de vérifier pour ces vers.

Danny est horrifié, mais s'arrête quand même pour regarder pendant que Netty donne un coup de pied au tronc, le repousse et se jette à genoux dans les copeaux de bois tendres, creusant avec un morceau d'écorce. Elle arrache un autre gros morceau d'écorce, plus large, et met des vers blancs dessus, travaillant rapidement pour que les larves ne s'échappent pas dans le sol mou. Elle regarde par-dessus son épaule Danny le réticent, lui jetant un sourire.

Oh, pour l'amour du ciel ! Dépasse tes inhibitions, le citadin !


Big Tom et le colonel Cage sont désormais en tête de file. Big Tom regarde par-dessus son épaule pendant qu'ils marchent le long d'une ligne d'arbre et voit que beaucoup dans le groupe ne suivent pas, occupés à chasser et à cueillir. Le groupe est allongé sur au moins 800 mètres de long, avec un écart entre ceux qui suivent et les deux leaders. Big Tom dit :

Je sais qu'il y a de la truite dans ces cours d'eau, et j'ai essayé de trouver comment les attraper. Pas de temps pour un hameçon et une ligne, c'est sûr.

Big Tom enlève sa veste et la tend au colonel Cage pendant qu'il enlève sa chemise à manches longues. Il noue un nœud dans chaque manche et boutonne le col aussi haut que possible. Il fait cela tout en marchant à grandes enjambées, se dirigeant vers le ruisseau, puis entre dans un trou d'eau (sorte de petite piscine naturelle).

Remonte un peu en amont et ramène-les vers moi. Voyons voir si cela fonctionne.

Big Tom chevauche le courant, positionné sur un endroit où le cours d'eau se resserre, à la fin de la piscine naturelle. Il tient sa chemise par le bas, comme un filet entre ses deux mains. Ses doigts sont bien écartés, tenant le bas de la chemise ouverte, les pieds bien campés de chaque côté, bloquant le passage. Le colonel Cage peut être vu en arrière-plan, s'avançant avec précaution dans le courant et se dirigeant vers Big Tom.


Le groupe s'est réfugié pour la nuit contre un affleurement rocheux, en partie pour s'abriter contre une tempête de pluie menaçante et aussi en partie pour cacher un petit feu de cuisson qu'ils prévoient d'allumer. Affamés et fatigués, ils se détendent dans la poussière légère, fatigués. Big Tom a accroché sa chemise mouillée sur une branche, et la veste ouverte, il se met à l'aise en fermant les yeux, un enfant endormi sous chaque aisselle, recroquevillés contre lui.

d

L'un des soldats a aménagé un feu de camp - un cercle de pierres avec toutes les ordures et débris dégagées de quelques mètres. Il utilise une branche comme un balais pour balayer l'espace nettoyé des plus gros débris. Ensuite, il va vite fait dans les bois à proximité, récupérant de quoi allumer le feu. Il s'agenouille et commence à faire tourner entre ses paumes une branche robuste, une rotation alternative. Le pied de la branche frotte sur une écorce plate, ce qui génére de la chaleur. En une minute se forme une braise brillante sur l'écorce, braise rapidement soufflée puis nourrie de mousse séchée.

Martha est sur le côté, hors de l'abri du surplomb, arrangeant les popotes de camping et les assiettes que le groupe a emporté avec eux. Elle fouille dans les sacs à dos, et Clara et Red s'avancent dans la brume pour aider. Martha préparera tout ce que le groupe a recueilli dans la journée. Elle le fera sous la pluie, si besoin est, car il n'y a pas assez de place sous le surplomb pour toute l'activité. Le feu et les couchages secs sont plus importants, dans son esprit. Les trois étalent ce qui a été recueilli et lavé - le cresson, les vers, les champignons, les fleurs de chardon, et enfin les filets de poisson et de serpent. Red et Clara arrangent le cresson, les fleurs de chardon et les champignons sur une assiette et la passent au groupe blotti sous le surplomb. Red dit :

Voici vos vitamines, mangez copieusement.

Le plateau est passé de mains en mains, chacun prenant une pincée et l'nfournant dans leur bouche. Danny s'illumine :

Ce n'est pas mal ! Il manque juste la sauce barbecue...

Martha est devant le feu, le poisson et la viande de serpent cuisant dans une casserole avec un peu d'eau. Elle pose un couvercle sur la casserole et l'enfonce dans les braises. Martha attrappe ensuite un bol rempli de larves blanches qui se tortillent dans tous les sens. Martha prend une grande cuillère et commence à écraser les larves, puis les fait suinter en les piquants avec une fourchette. Elle tire la casserole couverte du feu, et soulève le couvercle en utilisant sa jupe pour ne pas se brûler les mains. Elle retire le poisson cuit et le serpent, en laissant seulement un peu d'eau dans la casserole. Martha fourre la viande sur le plateau, qui a servi à amener la salade au groupe, et sert le prochain plat avec un sourire. Elle passe le plateau à Red, que l'on peut voir en train de se tourner vers le groupe blotti sous le surplomb.

Et voici votre protéine - poisson et, ahem... poulet.

Martha verse les larves mousseuses dans la casserole et la tient au-dessus du feu en remuant rapidement. Quand le mélange ressemble à des blancs d'œufs cuits, elle se tourne rapidement et le pose sur un autre plat. Elle finit par tirer de sa poche un brin d'herbe qu'elle a ramassée pendant la journée, et qui servira de garniture.

Et pour le désert, nous avons du pudding.

Billy fait les yeux ronds quand il tire la patte brune d'une larve coincée entre ses dents.


Big Tom et le colonel Cage sont en avance sur les autres. Après un virage ils s'immobilisent. Leurs visages horrifiés montrent que le spectacle n'est pas beau à voir. Big Tom jette un coup d'œil rapide au colonel Cage, ils se comprennent sans parler, et Big Tom fait rapidement demi-tour pour empêcher les autres de passer le virage. Il trottine vers Danny et Frank qui sont les suivants de la file.

Gardez les autres en arrière, mais envoyez Netty nous rejoindre.

Danny hoche la tête, indiquant qu'il a compris, pendant que Frank se tient debout, pâle et inquiet. Le traumatisme continu et les événements étant au-delà de sa capacité à faire face. Il a abandonné, essentiellement.


La scène devant le colonel Cage est horrible, même pour quelqu'un comme lui avec un entraînement militaire. Quelques vêtements sont éparpillés, dont une chaussure d'enfant. La chaussure d'un homme et la jambe de son pantalon, couverte de sang. Une femme jetée dans les buissons, sa tête ensanglantée comme si elle avait été matraquée, et surement violée. Danny, Big Tom, le Colonel Cage et Netty ont le visage sinistre. Ils se tiennent à côté du feu, qui contient une partie de cette scène d'horreur, avec ses restes humains carbonisés. Des traces de tortures gratuites, comme jeter les enfants vivants dans le feu, peuvent être observées. Le colonel Cage rompt enfin le silence.

J'avais entendu dire que ça se passait comme ça à certains endroits. Cannibalisme. Nous avons eu des rapports, des endroits où ils avaient la radio, et ils étaient attaqués comme ça.

Big Tom le fixe avec une expression alarmée, la pensée évidente qu'ils marchent en pleine zone dangereuse, danger dont il n'avait pas été informé, dans cet esprit.

Bordel, pourquoi tu nous as fait venir ici ? A quoi as-tu pensé !

Le colonel Cage le regarde brièvement, puis revient sur les lieux.

Nous avons eu d'autres rapports aussi, certains groupes étaient OK, et j'avais repéré les emplacements sécurisés. Comme cet endroit en théorie.

Son visage s'assombrit alors qu'il se rend compte que cette affaire pourrait ne pas être que locale.

J'espère de Dieu que ma femme et mes enfants vont bien. Le général ne nous a laissé passer aucun appel personnel.

Netty dit :

Nous ne pouvons pas les laisser voir ça !

Son commentaire les ramène tous à la situation immédiate.

Nous leur dirons qu'il y a un éboulement.


s

Mark et Brian planent dans un nuage bas. Le jour est continuellement couvert et gris. Il bruine perpétuellement. Des nuages bas sont soufflés par un vent presque au niveau du sol. Tout le payasage est gris, et le couple est poudré d'une fine suie volcanique qui les a coloré en gris clair strié. Brian est suspendu au-dessous de Mark, dans un harnais de parachute, regardant autour de lui avec de grands yeux effrayés.

Mark tient la turbine d'air chaud dans ses bras, pointé vers le haut, un assemblage de 2 parachutes au-dessus de lui. Mark utilise l'air chaud à l’économie, car régulièrement le vent les rattrape et les propulse avec des accélérations rapides. L'air chaud n'est utile que quand le vent tombe entre deux rafales et qu'ils commencent à dériver vers le sol.

Au-dessous se trouvent des terres agricoles inondées, une ville noyée avec un clocher et un silo dépassant de l'eau, et parfois des toits avec des gens blottis au centre. Il y en a un qui fait des grands gestes frénétiques au couple, dans l’espoir sans doute d’être secouru... Au loin, se trouve une nouvelle colline abrupte, haute d'une centaines de mètres, sortie de terre sous la pression des plaques tectoniques (l'orogénèse). Des lambeaux de maisons pendent du haut de la colline, d’autres morceaux de maisons sont disloqués en bas, et des débris sont accrochés au flanc de la nouvelle falaise. La colline, en poussant, a coupé ces maisons en deux, chaque partie se retrouvant maintenant à des altitudes différentes de centaines de mètres.


Le groupe du ranch, voyageant à pied, est parvenu à trouver le pont routier qu'ils espéraient utiliser pour traverser la rivière. Malheureusement, ce pont est en ruine. La section centrale du pont en béton armé est complètement déplacée, se retrouvant maintenant à 30 mètres en amont, comme ayant remonté le courant. Le jour est couvert, comme d'habitude, et une brise légère souffle, que tous apprécient. Il n’y a pas signe de vie. Pas de bateaux, personne sur le rivage, rien que l'étendue de l'eau et la brise qui ride la surface calme de la rivière. La brise agite leurs vêtements souillés et en loques. Clara remonte ses jupes et s'enfonce dans l'eau jusqu'aux hanches, un air de soulagement sur le visage. Voyant cela, Billy lève les yeux vers le visage de sa mère et supplie.

Maman, pouvons-nous aller nager ?

Big Tom, regardant par-dessus le pont déchiqueté, essaie de ressentir les forces qui auraient réarrangé ce paysage familier.

Vous ne nagerez pas tant que nous n'aurons pas déterminé ce qui pourrait être sous l'eau, sans parler des courants très forts qui pourraient courir sous la surface.

Une corne de brume retentit doucement. Le groupe voit un grand radeau, s'avançant vers eux à la rame depuis la rive opposée. Le radeau a été bricolé à partir de plusieurs planches. 6 hommes rament pour le faire avancer, 3 de chaque côté. Martha jette un coup d'œil nerveux au colonel Cage, dont le visage est calme : ils ne se seraient pas annoncés si l'approche était malveillante. Le visage de Big Tom se détend, et il se dirige vers sa femme, mettant un bras autour de son épaule pendant qu'ils attendent que le radeau les rejoigne.

Les rameurs sont des hommes fins mais nerveux. Pour se diriger, ils regardent par-dessus leurs épaules pendant qu'ils rament, car il semble n'y avoir aucun leader dans le groupe pour coordonner les efforts. À l'approche du radeau, Big Tom et Danny entrent dans l'eau pour aider à le guider vers le rivage. Les hommes du radeau ne semblent pas armés. Ils sautent du radeau. Ils sont encore maladroits dans leurs manoeuvres, ce ne sont pas des bateliers, mais des paysans qui ont appris à traverser la rivière. Ian, le premier homme à sortir du bateau, s'approche avec un large sourire sur son visage, sa main tendue.

Bienvenue, nous sommes le groupe qui a survécu à Bridgewater, et nous avons mis en place un camp sur la falaise là-bas. D'où êtes-vous?


Il fallut plusieurs traversées pour transporter tout le groupe. Big Tom, Martha et leurs enfants ont fait parti du premier voyage, décision acceptée à l'unanimité par le groupe du ranch. Le dernier bateau est en train d'arriver à Bridgewater. Le colonel Cage et Danny sont dans le dernier groupe à traverser. Le colonel Cage ressent un peu de soulagement et pense qu'il peut parler ouvertement à ceux qui sont sur le bateau, maintenant que les femmes et les enfants ne sont plus présents. Il interroge Ian :

Combien de groupes comme le vôtre connaissez-vous?

Ian dit :

Nous sommes les seuls. Pendant un certain temps, il semblait y avoir un groupe au pied des collines, mais leurs feux se sont arrêtés après quelques semaines et nous sentons qu'ils sont surement morts.

Le colonel Cage va droit au but, le visage détendu; car il a été formé pour regarder le danger en face sans sourciller.

Avez-vous eu des assauts de la part de gangs, du cannibalisme?

Ian prend un moment pour répondre :

Nous avons une bonne position ici, la rivière d'un côté et les montagnes de l'autre. Peu de personnes peuvent nous rejoindre à moins que nous ne les amenions par bateau, comme nous vous l'avons fait avec vous. Donc, je suppose que nous n'avons pas été la meilleure cible, Dieu merci.

Le dernier groupe monte maintenant la colline escarpée en direction du camp. Un groupe de femmes sur le côté du sentier remue quelque chose dans une casserole au-dessus d'un feu ouvert. Une femme verse de l'eau dans un abreuvoir en forme de V, tandis qu'une autre femme retire un bac de drainage sous cet abreuvoir et le remplace par un bac vide. L'auge est remplie de cendres grises avec quelques morceaux de bois noirci ici et là, les cendres d'un feu. L'eau récoltée dans le bac de drainage a donc coulé auparavant à travers la cendre. Le colonel demande :

Est-ce pour le souper ?

Ian dit :

Ils fabriquent du savon. Graisse et lessive. Ça fonctionne assez bien mais ça va enlever les poils de ta poitrine.

Ian souri de sa blague tandis qu'ils continuent à monter le long du sentier, passant devant une table basse où se trouve un ratelier en métal, permettant de donner leur forme aux savons. Ce ratelier consiste en un entrecroisement de parois métalliques, placées à l'intérieur d'un moule à gâteau carré, où une douzaine de barres de savon peuvent durcir. La casserole est retirée du feu et un mélange épais de couleur beige, fumant de vapeur, est versé sur le ratelier.


C'est le soir au camp de la rivière, où les femmes prennent leur premier bain chaud depuis des lustres. Qui plus est, il s'agit d'un jaccuzi (bain chaud à remous). Une femme de la ville, trapue, s'approche de la hutte de sudation avec plusieurs serviettes propres posées sur son bras, tandis que des rire détendu sortent de cette hutte. A l'intérieur, Daisy se frotte les cheveux vigoureusement. Elle s'enfonce dans la baignoire pour se rincer les cheveux, plonge totalement sous l'eau et en émerge avec un air extatique. Une fois de plus, elle se retrouve à la maison, l'endroit où elle peut se pomponner, comme ça lui est dû, pense-t-elle. Martha essuie Tammy, qui raconte sa rencontre avec des nouveaux amis.

... et ils font une maison de poupée aussi, mais en ce moment ils n'ont que les souris pour le traverser. Alors peut-être que nous devrions l'appeler la maison de la souris!

Tammy rigole, mettant sa main à sa bouche et regardant sa mère. Sa mère est visiblement soulagée, affichant un air calme et content. Clara trempe dans une baignoire, immergée jusqu'au menton et ne bouge pas.

Je pense que je vais rester là pour toujours.

Netty n'est pas parmi elles.


De l'autre côté de la rivière, le colonel Cage, Big Tom, Ian et Netty regardent le soleil se coucher. Ils se tiennent tranquillement, regardant le spectacle grandiose. Ian dit :

Compliments à la poussière volcanique.

Netty demande,

Poussière?

Sortant de ses pensées, Ian explique :

Oh, je veux dire que nous n'aurions pas un tel coucher de soleil sans la poussière volcanique. C'est ce que j'ai entendu dire. Quand les Philippines sont entrées en éruption, on a eu ce genre de couchers de soleil pendant un certain temps, mais ceux-ci sont les plus magnifiques que j’ai jamais vu. Je suppose que c'est pour cela que nous avons aussi des jours si moroses et manquant de lumière.

Le groupe tourne à nouveau la tête vers le couchant et reste silencieux, chacun plongé dans ses réflexions.


C'est l'aube, et les oiseaux commencent à gazouiller et à chanter irrépressiblement. L'eau de la rivière est placide. Big Tom et Red, qui sont levés, ont l'habitude de travailler à la ferme dès l'aube, voir même plus tôt. Leurs vêtements n'ont pas encore été lavés, et ils n'ont pas pris non plus de bain, ayant donné aux femmes la priorité.

J'ai entendu dire qu'il y avait un vieux technicien qui vivait ici. Qu'il avait un jardin et tout.

Red dit,

J'ai parlé au gars la nuit dernière. Il a essayé de faire fonctionner le tracteur avec des copeaux de bois. La chose la plus dangereuse dont j'ai jamais entendu parler, mais il affirme que ça a déjà été fait.

Puis méditant sur le défi mécanique, Red, qui ne recule pas devant un défi, finit par déclarer :

Je vais lui donner un coup de main.


Red et le vieux, qui est maigre et habillé d'une salopette très sale, sont dans la vieille grange de la propriété d'origine, propriété devenue actuellement le camp de Bridgewater. La grange penche méchamment d'un côté, mais elle est tombée contre des arbres et n'a pas complètement basculé. La vieille grange est soulevée de ses fondations de l'autre côté, de sorte que la lumière du jour donne beaucoup de lumière à l'atelier. Red inspecte les outils posés sur l'établi et ceux accrochés au mur, faisant l'inventaire.

Un gaz, dites-vous ? Jamais entendu parler.

Le vieux est assis sur un tabouret bas à l'avant d'un petit tracteur. Le tracteur est presque une antiquité, vieux de plusieurs décennies, avec la peinture presque entièrement pourrie ou couverte de crasse, rouillée par endroits. A l'arrière, la charrue montée sur la barre de relevage est en position relevée. Le capot moteur du tracteur est soulevé. Red attrape un seau et le tourne à l'envers pour l'utiliser comme tabouret, accroupi à côté du vieux. Les deux têtes sont presque rentrées dans le moteur, côte à côte. Le vieux explique :

Mets le foyer ici, et fait chauffer le bois lentement, c'est le secret. C'est un gaz ! Nous avons besoin d'une bobine électrique ici, et d'un interrupteur...


Big Tom rentre dans la vieille grange inclinée. Il a pris un bain et porte des vêtements propres, empruntés à ceux du camp de Bridgewater. Les vements empruntés sont tous trop petits pour lui.

Besoin d'un coup de main?

Red lève les yeux de son travail, l'air heureux.

Je crois que nous tenons le bon bout !

x

Générateur de gaz aux copeaux de bois, schéma de principe :
Fuel (wood chips) = carburant (copeaux de bois)
Drying Zone = zone de séchage
Charring zone = zone de carbonisation
Ash = cendres
Charcoal = charbon

Red montre sur l'établi derrière lui une cuve métallique carré. Sur le haut de la cuve, une porte à été découpée pour permettre de charger les copeaux de bois dans la cuve. Un tuyau, servant à collecter le gaz de bois, est enroulé en boucle d'un côté, avec un pot de collecte sous la boucle pour recueillir le gaz de bois condensé qui s'égoutte. Il y a des fentes coupées dans le côté de la chambre de combustion, en bas, pour l'admission d'air. Il y a un autre drain de l'autre côté où la vapeur, condensée en eau liquide, s'égoutte au dehors. Le vieux se lève pour démonter l'appareil, désireux de montrer à Red la chambre de combustion. Il retire sa main rapidement, réalisant qu'il est encore chaud.

Zut!

Billy apparaît à la porte, son visage excité comme celui de Red.

Cool!


Les bricoleurs sont dehors dans un champ en friche, autour du vieux tracteur. Le gazogène (générateur de gaz de bois) est attaché sur un côté du moteur du tracteur. Le tracteur démarre de manière saccadée. Après quelques hoquets, le moteur se mets enfin à tourner rond, de manière régulière. Les visages reflètent l'étonnement, certains yeux ont les yeux un peu larmoyant, d'autres sont juste bouche bée. Quelques temps plus tard, le vieux tracteur laboure lentement une rangée dans le champ, pendant que Billy et Big Tom, assis sur le tabouret et le seau retourné de la grange, coupent énergiquement en copeaux, avec une hache, quelques branches ramassées du bois voisin.


Mark et Brian ont traversé assez rapidement les USA d'Ouest en Est. Partis des Rocheuses, ils finissent par rejoindre New York City après une semaine de vol. Le vent fort les entraîne à une vitesse assez rapide, les parachutes devant eux et remplis comme une voile de bateau. Ils sont sales, ne s'étant pas lavés lors des atterrissages rapides faits pour prendre un peu de sommeil. Ils ont bien maigris lors de cette semaine. Mark est excité à la vue de la ville.

Brian, voilà, il y a la ville! Nous sommes à la maison, à la maison! Laisse moi trouver un bon endroit où atterrir.

Les mains sur les cordes, Mark jette un coup d'oeil vers le bas, préparant mentalement sa descente, quand il se fige en voyant le spectacle de désolation qu'ils survolent. La Statue de la Liberté est inclinée à un angle de 45 degrés. Les restes d'un voilier encastré dans la torche de la statue pendouillent misérablement, tandis que des algues recouvrent la statue jusqu'au menton. Aucun gratte-ciel ne reste debout, la ville n’étant que décombres noires se découpant sur le ciel gris. Les ponts sont coupés et la plupart de leurs sections sont tombées. Aucun bateau n'est vu sur l'eau, sauf deux ou trois grands navires flottant la quille en l’air. Les yeux de Mark se remplissent de larmes, et il regarde vers le haut, ne voulant plus regarder en bas. Finalement, il jette un coup d'œil vers Brian, puis se dit à lui-même :

Au moins, tu n'es pas là pour voir tout ça. Il est temps de nous dire adieu. Nous n'avons plus rien pour vivre ici.

Mark pointe le jet d'air chaud directement sur les lignes de parachute, qui fondent rapidement. La plate-forme commence à basculer sur le côté, puis plonge soudainement dans l'océan en-dessous.

La mauvaise voie

Le colonel Cage prépare son lit, un sac en tissu rempli de paille. La hutte des hommes est un dortoir pour plus d'une douzaine d'hommes, avec des lits sommaires tous identiques. Le colonel a étendu ses vêtements en travers du pied de lit, pliés au carré. Il ajuste l'arrière de son col de T-shirt, puis s’allonge sur le lit de paille, avec un soupir. Son visage prend un air perplexe et il touche de nouveau le dos de son col, cette fois franchement affolé. Il s’assied d’un coup, amenant son tee-shirt par dessus la tête et examinant son col qu’il a maintenant devant les yeux.

Oh mon Dieu...


Le colonel Cage et Ian sont dans la salle du conseil. La lumière est faible, seule une lampe à huile brûle, placée sur la table. Le colonel Cage a sorti Ian du lit. Il tient son T-shirt devant lui, sous le nez d'Ian, tremblant de rage.

Qu’ils soient maudits, ils m’ont mis sur écoute, ils savent où nous sommes, et ils vont venir nous cueillir !

Ian ne comprends pas l'agittaion du colonel. Le Colonel soupire, fait de gros efforts pour se calmer, et reprends tout dans l'ordre.

C’est un micro. Je ne savais pas que je le portais. S’il est relié en direct, et je n’ai aucune raison de penser le contraire, ils peuvent me suivre à la trace, et ça va les amener tout droit où nous sommes.

Une pensée traverse son esprit et il jette soudainement le T-shirt par terre, et broie le col du vêtement sous son talon jusqu'à ce qu'il entende un craquement.

Mais vous ne savez pas depuis combien de temps vous l’avez ni même s’il fonctionne.

Le visage du colonel Cage pâlit, car il se rend compte qu'il ne peut pas dire à Ian ni aux autres tout ce qu’il sait, trop de choses impossibles à raconter en si peu de temps. Il explique finalement, après une lutte intérieure avec lui-même sur la question :

Attendez vous au pire.


La corne de brume soufflant doucement à nouveau, indiquant que des visiteurs sont arrivés sur la rive en face du camp de la rivière. Le colonel Cage, perturbé de ce qu'il a découvert la veille, s'agite et tourne sans cesse dans son sommeil. Ses yeux s'ouvrant d'un coup au bruit de la corne. Il se glisse dans son pantalon et se dirige vers la porte, avant même d’avoir fermé sa braguette. Ian est debout sous un arbre, à peine visible dans l’ombre. Le Colonel Cage s’avance vers Ian. Malheureusement, le tee-shirt blanc du colonel est voyant comme un drapeau qui s’agite. Ian dit :

Ils t'ont vu.

Le Colonel, endormi, se cache rapidement derrière un arbre.

Trop tard, ils t'ont aperçu.

Un groupe d'hommes est sur la rive en face, vêtu de vêtements décontractés sales. Le colonel Cage, la mâchoire serrée et légèrement secouée par la tension, parle d'une voix douce, presque à lui-même.

Je parie que c'est eux. Ils ont tué et mangé des familles.

Ian jette un coup d'œil au colonel Cage, pas choqué car il soupçonne ça aussi.

Je posterai un guetteur pour m'assurer qu'ils ne traversent pas.


Frank est en train de hacher vigoureusement un tas de légumes verts à l'aide d'un hachoir. Il est en train de bavarder sans arrêt avec Madge, la cuisinière trapue qui ne pipe pas un mot. Madge est en train de fouiller dans ses jarres à légume.

La carte de la mort est sortie, et nous savions tous que cela allait arriver.

Le son assourdi des pâles d'hélicoptère est à peine audible au début, puis augmente en volume. Frank s'arrête, le hachoir en l'air, pour écouter attentivement. Un hélicoptère noir à la technologie silencieuse arrive le long de la rivière, se déplace au centre de la rivière, puis vire vers la falaise.


Maintenant que les militaires ont découverts le camp de Bridgewater, il a été jugé plus sage d'évacuer en urgence.

Ian touche chaque membre du camp alors qu'ils se pressent devant lui, leurs affaires personnelles serrées dans leurs bras. Tous se précipitent, en file indienne, dans les bois et dans un ravin, hors de vue de quiconque se trouvant sur la rivière ou dans les airs. Personne n'est hystérique ou ne conteste la décision de Ian. Dans la cabane des femmes, Danny supplie Daisy de venir. Elle semble inconsciente de tout danger, n'écoute aucun argument, et le traite comme si c'était un hystérique.

.. Tu ne comprends pas, les gens ont été tués, les femmes ont été violées, nous ne vous l'avons pas dit !

Daisy dit :

Danny, tu ne vois pas à quel point les choses sont bonnes ici ? J'ai mes ongles qui repoussent à nouveau et nous pouvons nous baigner quand nous le voulons !

Danny a l'air consterné, il est sans voix, le regard désolé. Il réalise pour la première fois à quel point le narcissisme de Daisy, son obsession de soi, est profond. Un couple de grande taille entre, ramassant les affaires oubliées, et Danny les regarde avec compréhension. Elle ne sera pas seule !

Eh bien, je ne reste pas ici pour mourir avec toi, fais-toi plaisir.

Danny se détourne, fonçant vers la porte pour rattraper les autres.


Dans une clairière au milieu des bois, Ian compte les têtes au fur et à mesure que le groupe passe en silence devant lui en file indienne. Ian demande à tous.

Restez ensemble maintenant, restez proches les uns des autres !

Les traînards de queue arrivent, avec de plus en plus d'espace entre eux. Ian se tourne vers son assistante, une grande femme mince avec ses cheveux gris dans un chignon sévère.

Je n'ai pas vu le petit garçon et son grand-père, ni le dernier de ce groupe .

L'assistante a un presse-papiers dans ses mains et a vérifié les choses au fur et à mesure que le groupe passait.

Cette jeune femme et le journaliste, ils sont aussi portés disparus.

Netty arrive dans la clairière en marchant péniblement, essayant de ne pas perdre de vue la fin du groupe qui se trouve devant elle. Elle voit enfin Ian et son assistante debout devant elle. Elle affiche un large sourire, rassurée de ne pas les avoir perdus. Elle regarde par-dessus son épaule en s'arrêtant, s'assurant que ceux qui la suive ne se perdent pas.

Billy est un peu plus loin derrière sur la piste, s’arrêtant pour ramasser quelque chose sur le sol, sa curiosité de petit garçon éveillée. Alors qu’il fait cela, il y a des bruissements dans les buissons au bord du chemin. Billy se redresse d’un coup, la bouche ouverte et les yeux écarquillés. Le chien alpha (le leader ou chef) d'une meute sauvage, un grand boxer si maigre qu'il a l'air presque squelettique, ses côtes saillantes, montre les crocs en grognant.

Netty n’hésite pas. Elle se met à courir à toutes jambes, couvrant la distance la séparant de Billy silencieusement, avec ses jambes puissantes qu’elle a musclées en montant à cheval toutes ces années.

Elle rejoint très vite Billy, pétrifié comme une statue. Les chiens sont un mélange d'anciens animaux de compagnie - bergers, boxers et chiens de chasse - de toutes sortes. Les plus petits s'attardent et jappent, excités par la possibilité d'un repas à venir mais pas encore prêts à attaquer les humains, se rappelant toujours leurs anciens propriétaires. Netty soulève Billy du sol en le prenant dans ses bras. Red et Danny viennent en courant, et Red frappe à grands coups de veste le chien alpha qui bat en retraite. Red dit :

Ils sont affamés!

Netty dit,

Venez, nous ferions mieux de suivre les autres. Viens Billy, ne traîne plus.

Netty prend Billy par la main et s'élance, le traînant presque derrière elle. Red et Danny font de leur mieux pour marcher aussi vite, Danny devant se mettre à trottiner de temps en temps pour tenir le rythme. Les retardataires rattrapent le reste du groupe de Ian, qui sont debout sur la rive, regardant quelque chose sur la rivière. Danny et Red arrivent de l'arrière, essouflés et transpirant légèrement.

Le groupe entend ce qui sonne comme de la musique, le son que font des bouteilles en plastique remplies d'air et collées l'une contre l'autre dans un filet, ou attachées ensemble. Ces tonalités sont diverses, comme une sorte de batterie composée de petits tambours en plastique, presque tintant plutôt que tonnant. Une série de maisons flottantes sont amarrées aux arbres d'une petite île au milieu de la rivière, dans les eaux lentes. Les radeaux sont alignés en file indienne, quelques radeaux amarrés aux arbres forts de l'île, puis d'autres radeaux amarrés à ceux-ci, de sorte que le lot s'étend le long du centre de la rivière. Les bouteilles en plastique ont été remplies d'air et sont soit attachées ensemble, soit entassées dans un filet. Les bouteilles forment un dispositif de flottaison pour du contreplaqué ou des radeaux faits des planches grossièrement clouées ensemble, ces matériaux provenant des débris générés par les tremblements de terre et les vents de l'ouragan. Les radeaux sont soulevés d'au moins 30 cm hors de l'eau, c'est à dire plus que le nécessaire à la flottaison. Il y a plus de volume de bouteilles que ce qu'il fallait pour le poids qu'elles portent, la considération évidente étant que certaines des bouteilles en plastique pourraient se percer et se remplir d'eau, donc mieux vaut plus que moins à cet égard.

Certains radeaux ont des tentes dessus, d'autres ont des cabanes fabriquée à partir de bois de rebut et de bâches, et un des radeaux est surmonté d'une structure rachitique de deux étages qui semble devoir tomber au moindre vent un peu fort. Le linge est étendue ici et là, sur des fils attachées entre les planches clouées sur les bords des radeaux et tout ce qui sert de dortoirs au centre du radeau. La plupart des radeaux ont des jardins dans des pots, des pots en plastique de différentes tailles et couleurs, où se trouvent des tomates en train de pousser, de la laitue ou des cardons. Des lignes de pêche sont suspendues aux radeaux et s'égrènent dans la rivière en aval. Il y en a tellement que l'ensemble ressemble presque à une toile d'araignée avec les radeaux capturés au centre. Un garçon s'approche d'une ligne et commence à la ramener, en tirant un poisson de bonne taille. Il pose le poisson sur une boîte en bois à proximité, et le frappe à la tête avec un maillet en bois, le tuant instantanément.

Les tout-petits peuvent être vus sur le pont de certains radeaux, leurs mères vigilantes les gardant à moins d'un bras de distance. Certains sont attachés dans un harnais afin qu'ils ne puissent pas tomber dans la rivière. Une femme est sur ses mains et ses genoux au bord d'un radeau, se lavant les cheveux. Quelqu'un sur la radeau remarque le groupe sur la berge et les pointe du doigt, lançant un appel aux autres de son groupe puis faisant signe au groupe sur la berge. Certains appels sont échangés entre les deux groupes, mais la distance exclut tout autre chose qu'un "bonjour". Ian dit :

Ils ont récupéré tout ça à la déchetterie de Middleton.

Red dit :

Pas mal... C'est plus sûr que dans ces bois... Et pas de manque de poisson frais à manger!

Ian est debout à côté du colonel Cage, le regardant directement avec une légère inquiétude sur son visage. Le colonel Cage lui jette un regard rapide, devinant la question qui taraude l'esprit de Ian, puis retourne son regard vers la ville de radeaux, ville qui est fascinante et subjugue tout le monde dans la troupe.

Ils ne seront pas embêtés, ni ceux que nous avons laissés à Bridgewater. C'est nous qu'ils recherchent, ceux du ranch. Nous connaissons l'emplacement de leur quartier général, et le général n'est pas encore prêt pour avoir des visiteurs. Il veut nous tuer, nous du ranch... et ceux qui seront sur sa route.

Le colonel Cage fait un geste de la main vers la ville de radeaux, en regardant directement Ian.

Eux ne sont pas une menace pour lui. Il n'a aucun avantage à en tirer. Juste des déchets dans la rivière, c'est comme ça qu'il pense.


Le brouillard s'abat très tôt le matin le long de la rivière. Ian vient d'éveiller son groupe itinérant, ne leur laissant pas plus de quelques heures de repos pendant la nuit. Il les touche sur l'épaule, plutôt que d'utiliser sa voix pour annoncer que la marche doit recommencer. Maintenant qu'ils peuvent voir où mettre un pied devant l'autre, il a l'intention de les remettre debout et de se déplacer à nouveau.

Le groupe a des petits yeux, comme s’ils venaient juste de se réveiller et avait besoin d’une tasse de café, voir même d’une cafetière entière. Personne ne se plaint, cependant, et quand on trébuche et laisse tomber quelque chose, celui qui est derrière les aide à les ramasser et à le remettre à nouveau avec leurs affaires. Ce groupe s'entraide de manière non compétitive et il n'est jamais nécessaire de demander cette aide.


Ian, en tête, arrête le groupe derrière lui en levant la main. Là, caché par le brouillard la plupart du temps, mais visible quand les nappes de brouillard se dissipent momentanément, se trouve un énorme dôme gris terne, de plusieurs étages. Le dôme n'atteint pas la cime des arbres, mais couvre une superficie aussi grande qu'un terrain de football. Placé sur une crête le long de la rivière, où il y a des arbres de tous les côtés et pas de terrain au-dessus de la crête, le dôme ne pouvait pas être vu à moins qu'un avion ne le survole. Plusieurs membres du groupe d'Ian se pressent autour de lui et regardent le dôme par dessus ses épaules. Ils sont tous silencieux, contemplent, enregistrant ce qu’ils voient et essayant de se faire une idée de ce que cela peut être.

Ian finit par avancer de nouveau, le groupe traînant les pieds derrière lui. Il y a un grand espace dans la file entre Ian et ceux qui le suivent, ses assistants, et un espace encore plus grand avant que le reste du groupe n'arrive. Ils se tiennent clairement en retrait, pas si loin que ce serait pris pour un manque de confiance en Ian, mais assez loin derrière pour qu'une fuite éventuelle soit possible. Alors que Ian s'approche de l'entrée, les portes s'ouvrent et glissent sur le côté. Plusieurs humains sortent, Jonah en tête, la main tendue. Ian hésite un instant, puis s'avance avec lui aussi la main tendue. Le groupe qui suit Ian accélère notablement l’allure, voyant un accueil amical.

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Dès leur entrée dans le dôme, les nouveaux arrivants restent bouche bée devant le plafond élevé mais éclairé de façon diffuse, et la végétation luxuriante poussant au centre du dôme, où se trouve une fontaine et des pelouses où des enfants jouent. Le dôme a des logements alignés en cercle le long du bord, sur plusieurs niveaux, aussi bien vers le bas dans le sous-sol que vers le haut au-dessus du sol.

A chaque niveau résidentiel, se trouvent sur le bord extérieur, contre le mur extérieur du dôme, les résidences elles-même, courant sur toute la circonférence du dôme et ouvrant vers l'intérieur, c'est à dire le centre du dôme. A chaque étage, devant les résidences, on trouve le patio, une zone de jardin que se partagent tous les habitants de l'étage. Cette zone encercle en continu le devant de toutes les résidences de chaque niveau.

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Tammy rompt le silence car une petite fille de son âge l’a remarquée. Tammy serre contre elle sa poupée de chiffon, qui est maintenant si sale et déchiquetée qu’elle ressemble plutôt à un vieux chiffon noirci. La petite fille qui l’accueille a une poupée de chiffon propre, pareille en taille et avec la même robe que la poupée de Tammy. Elle donne à Tammy sa nouvelle poupée en souriant. Tammy a les larmes aux yeux devant cette marque de gentillesse et de compréhension, et sourit faiblement. Elle tend à l’autre fillette sa poupée en loques et elle font l’échange, riant spontanément de la bêtise du cadeau de Tammy. Elles partent ensemble en courant, la petite fille du dôme en tête. Pas un mot n'a été prononcé entre les filles pendant cet échange.

Billy est juste derrière Tammy et il a observé la scène. Il lève son visage vers sa mère derrière laquelle il est debout, et ils partagent en silence le même sentiment que c'est un bon endroit.

Ian est debout sur le côté, dans une conversation intense avec Jonah. Le reste du groupe continue de s’amasser à l’entrée du dôme, en réagissant à ce qu'ils découvrent. Madge, la grosse cuisinière, entre et se fige, son froncement des sourcils permanent refusant de quitter son visage. Frank est juste derrière elle, levant les bras avec un air extatique, disant des choses qui parlent de l'Atlantide et d'autres villes mythologiques.


Il est très tôt le matin dans la ville du dôme. L'éclairage est contrôlé par des lampes-projecteurs apposées le long du mur du dôme, au dessus du niveau supérieur des logements, qui est une zone de promenade. Ces projecteurs produisent une lumière intense grâce à un arc électrique entre 2 électrodes de carbone (lampe à arc), une lumière équivalente à la lumière du soleil. Cette lumière est projetée vers le haut, sur le plafond du dôme, par des cônes de plus d'un mètre de long. La pointe du cône vers le bas est placée directement sur l'arc (pour ne pas éblouir). La lumière est donc indirecte, éclairant le dôme après s'être réfléchie sur le plafond du dôme. Les cônes sont peints, extérieurement, de la même couleur que le plafond du dôme, à savoir bleu ciel.

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L'inconvénient de l'éclairage à l'arc c'est qu'il faut régulièrement passer sur toutes les lampes pour rapprocher les électrodes de carbone qui s'usent avec l'arc électrique.

Justement, un homme est en train de marcher le long du niveau supérieur, une boîte à outils et un escabeau à la main. Il va de lampe en lampe, pour en faire l'entretien. Debout sur l'escabeau, il appuie sur un interrupteur à côté de la lampe et elle s'éteint. En utilisant un outil spécial, il tourne rapidement les crochets de haut en bas du cône afin de retirer le cône. L'outil est une forme étrange et unique afin que les enfants ne puissent pas enlever accidentellement les cônes. Les pointes de carbone des 2 électrodes se faisant face sont désormais visibles, et l'homme ajuste chaque électrode pour la déplacer plus vers le centre, l'une vers l'autre. Il mesure alors l'écart. Satisfait, il remet sa mesure d'écart dans sa poche et remet le cône en place.

Des moutons paissent sur la pelouse de la ville, dans une section clôturée. La clôture est en bois et se déplace facilement, elle est utilisé plus comme un guide pour le mouton qu'un confinement. La ville dôme n'utilise pas de tondeuses à gazon, car les moutons tondent l'herbe très près du sol. Par contre si on les laisse trop longtemps au même endroit, ils finissent par détruire la prairie en mangeant l'herbe à la racine. Les moutons ont presque finis de tondre leur section. Un ouvrier est en train de replier la clôture en bois portable comme un accordéon, celle qui séparait la partie tondue de la partie à tondre, dont l'herbe est haute. Il fait ensuite passer les moutons dans la zone d'herbes hautes en leur parlant doucement, avant de refermer la barrière repliée.

Le long du mur entourant la zone des jardins, il y a de temps à autre des portes donnant dans des pièces où se trouvent des jardins hydroponiques et d'autres activités de production alimentaire. Les murs sont de la même couleurs que les murs de la zone résidentielle supérieure, ce sont donc les murs de fondation de la ville elle-même. Une porte s'ouvre. L'étiquette sur la porte indique "Consolidation du Compost". Un homme poussant une brouette lourdement chargée passe. Sa charge est riche, terre limoneuse grouillante de vers de terre. Une fourche est plantée dans la charge. Il pousse rapidement la brouette à travers la pelouse vers quelques vignes sur une tonnelle, vers le centre des jardins de la ville dôme.

Une volée de poules et de coqs se précipitent vers lui, certains volant, d'autres en courant. Ils connaissent cette routine. Certains sautent dans la brouette, n'attendant pas leur friandise. Le travailleur ne rompt pas sa foulée, puisque toutes les tâches du matin doivent être terminées avant que les résidents ne se réveillent. Il se dirige vers les vignes et verse sa brouette sur les racines des vignes. Les poules avides couvrent la pile, nettoient les vers et grattent furieusement les vers dans le compost.

La main tendue

On prépare le repas du soir dans la ville dôme. Le toit de l’étage supérieur des résidences, la zone de promenade, est essentiellement une zone ouverte où se tiennent les exercices et les activités communautaires. Ce soir, du fait des nouveaux arrivants, on donne un dîner spécial, sous forme de buffet. Les enfants courent le long du toit et dans les escaliers, ou encore dans les rampes qui descendent à espace régulier vers le centre, se poursuivant et organisant des jeux. Une fanfare joue de la musique, un banjo, un violon et une caisse claire dans un étrange arrangement, avec quelques chanteurs qui sont remarquablement bons étant donné les circonstances. Des couples dansent sur la musique, devant l’endroit où la fanfare s'est rassemblée.

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Jonah, Ian et le colonel Cage, assis à une table, bavardent en sirotant un verre. Ian et le colonel Cage tentent de s'adapter à cette nouvelle vie d'abondance et de sécurité. Ian interroge anxieusement sur la sécurité, s'ils ont eu des raids ou des intrusions. Jonah répond, énonçant juste un fait :

Nous sommes protégés.

Cette réponse fait froncer les sourcils de Ian. Auraient-ils pénétré par erreur dans le camp ennemi ? Après avoir hésité une minute, il laisse échapper une question :

Protégé par qui?

Le colonel Cage les regarde converser, ses yeux passant de l'un à l'autre, devenant de plus en plus calme alors que quelque chose d'important est sur le point d'émerger, ses antécédents militaires reprenant le dessus. Jonah dit :

Nous ne sommes pas seuls, ne l'avons jamais été, mais maintenant, ils peuvent se montrer davantage.

Ian a un blanc, ne comprenant toujours pas. Jonah dit :

Vous savez, les gens de l'espace, ils sont ici, et ils nous ont aidé à construire cela. Oh, vous n'en verrez pas beaucoup, voir même aucun, mais ils sont toujours là pas loin, et nous avons des enfants spéciaux pour le prouver.

Les yeux de Ian s'élargissent, fixant le visage de Jonah. Et ensuite?

Allez, je vais te montrer.


Jonas a emmené Ian et le Colonel Cage dans les jardins du centre de la ville dôme, là où les enfants jouent. Jonah est assis sur l’un des bancs qui se trouvent là, parlant chaleureusement et tranquillement à des enfants debout devant lui, montrant qu’il faisait ça souvent, qu’il leur est familier et entretient de bons rapports avec eux. Ils ont de grands lobes frontaux et un menton délicat, des yeux plus grands que la normale, et écoutent plus qu’ils ne parlent. Ils semblent anticiper les mouvements des uns et des autres, par exemple l’un reculant d'un pas en synchronisme avec l’autre qui avance d'un pas, et d'autres choses du genre. Le vacarme des voix des enfants est entendu en arrière-plan. Jonah dit :

... c'est prévu d'avoir une foire artisanale, pour le prochain concours, non ?

L'enfant hybride du milieu répond à Jonah, mais parlant d'autre chose que ce qui vient d'être dit. Il répond aux pensées de Jonah, pas à ses paroles :

Ils s'adapteront rapidement parce qu'ils vivaient déjà comme nous. Tu verras, il n'y aura aucun ajustement du tout.

Le colonel Cage se penche en avant pour poser une question.

Comment le sais-tu?

L'enfant le regarde calmement.

Tu as raison d'être inquiet, ils ont besoin de toi. Ils ne savent pas où tu es ni comment te trouver.

Il y a un silence, mais finalement le Colonel Cage répond, la gorge serrée :

Ils ont des ennuis ? L'armée avait des installations! Ils ont dit ... ils nous avaient dit ça... que ...


À l'extérieur de l'entrée de la ville dôme, le colonel Cage prend congé, disant au revoir à Jonah. Ils se tiennent devant l'entrée du dôme, à l'extrémité du long tunnel de style igloo qui agit comme un bouclier contre les intempéries, protégeant les portes coulissantes au bord du dôme lui-même.

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Je dois essayer, même si c'est la mort qui m'attends. Je ne sais pas si ces cartes routières sont encore valables... C'est à 360 kms à vol d'oiseau, et Dieu seul sait si je vais y arriver ou ce que je vais trouver là-bas.

Le colonel Cage voyage léger, tenant une sacoche en toile noire qu'il porte à l'épaule. Alors qu'il vient d'entrer dans les bois, un grand Zeta gris apparaît, se plaçant coude à coude avec Jonah, qui regarde toujours le colonel disparaître dans les bois.

Il va avoir besoin d'aide.

Le Zeta met momentanément sa main sur l'épaule de Jonah, puis se met à suivre le colonel Cage.


Le colonel Cage marche dans la banlieue de ce qui était une ville de taille moyenne. Il voyage la nuit, pour se protéger. Son corps se détache brièvement devant un tas de déchets enflammés que quelqu'un a rassemblés et allumé. Les planches brisées se dressent de temps en temps, au hasard, et des blocs de ciment tombés par terre jonchent les rues. Il se fraie un chemin à travers les décombres. Il y a des cris au loin, et ce qui sonne comme un rire hystérique de temps en temps.


Passé la ville maintenant, et voyageant de nouveau de jour, le colonel Cage est debout au bord d'une crevasse dans la terre. Les pieds de la colline qui donnent sur une vallée fluviale se sont soulevés, la terre nue exposée se démarquant nettement des arbres ou des champs de chaque côté. Il reste là à contempler la scène, le sourcil légèrement froncé, puis cherche une carte dans sa poche arrière, qu’il déplie, semblant de plus en plus perplexe. Il secoue la tête et marmonne dans sa barbe :

Si c'est bien le fleuve, ça veut dire que j'ai fait 240 kms en un jour !

Il replace la carte dans sa poche arrière, ramasse sa sacoche, et s’en va en descendant à grands pas le long des bords de la faille, vers le fleuve.


C'est la nuit, la pluie tombe sans arrêt, détrempant tout. Il fait si sombre qu'il faut 1 minute avant de distinguer quelque chose. Regardant à travers le noir, le colonel Cage doit plisser les yeux pendant plusieurs minutes pour apercevoir à l’occasion des silhouettes dans l'obscurité. Sa progression a été lente, sur la dernière partie de son périple, mais il reconnaît désormais le paysage, il est enfin chez lui. Il est immobile, regardant fixement les fenêtres brisées de ce qui était sa maison. Rien ne bouge, et il n'y a pas de lumières ou de sons. Il entend la voix d'un jeune garçon derrière lui :

Papa?

Le colonel Cage se retourne si vite qu’on le voit presque flou. Il soulève son fils dans ses bras. Après un long câlin silencieux, pendant lequel les deux semblent incapables de se lâcher l'un l'autre, le colonel pose le garçon, et demande d'une voix enrouée.

Où est ta mère et John ?

Le garçon dit :

Ils vont bien, viens.

Avec excitation et empressement dans la voix, il prend son père par la main. Ils trébuchent dans le noir, le Colonel Cage trébuchant derrière son jeune fils, marchant tous deux trop vite en regard de la visibilité nulle, mais trop impatients d’arriver pour faire attention.


Le lendemain, les quatre personnes marchent prudemment le long d'une rive arborée. Tous sont vêtus de vêtements sombres qui se fondent dans le vert sombre et le jaune moutarde de la végétation, et quand ils sont à découverts, ils se penchent et courent à pas précipités à travers champ, pour ne pas attirer l'attention de ceux qui pourraient les voir. Le colonel Cage est visiblement nerveux, mais ne partage pas avec sa famille les raisons de sa peur. Ils entendent des voix, et il signale à tous de se coucher par terre et de ne pas faire de bruit. Le visage du colonel est pâle et il tremble, montrant sa peur extrême que sa famille soit torturée et tuée, comme il l'a vu faire pour d'autres. Il a son plus jeune, John, à côté de lui, et lui a mis la main sur la bouche. Il signale du regard à sa femme et son fils aîné la gravité de la situation.

Un groupe d'hommes passe, parlant et se disputant entre eux. Une voix résonne au-dessus de l'endroit où la famille est accroupie, se joignant à la conversation sans attendre. La famille terrifiée entend une fermeture éclair s'ouvrir, puis quelqu'un pisse, puis de nouveau le son de la fermeture éclair qui remonte. Celui qui vient de se soulager passe devant le plus jeune garçon comme s'il ne le voyait pas, rejoignant les autres. Les autre regardent dans sa direction, et ne semblent pas non plus voir la famille, plaquée contre le sol, retenant leur souffle. Pendant que les hommes reprennent leur marche, ils sont surveillés par un grand Zeta debout à côté d'un arbre, les bras croisés sur sa poitrine. La famille reste sans bouger jusqu'à ce qu'aucune voix ne puisse être entendue. Le colonel Cage lève légèrement la tête et jette les yeux autour de lui, et ne voyant rien, avertit à voix basse :

Suivez-moi, mais aussi tranquillement que possible.

Il se déplace lentement pour ne pas faire craquer de brindille, n’accélérant l’allure qu’en atteignant une zone d’herbe le long d’un ruisseau où le bruit du courant couvre le frottement de leurs jambes contre l'herbe. Quand le colonel Cage peut regarder dans toutes les sens et voir lque l’horizon est libre, il pousse un soupir de soulagement.

Je ne sais pas pourquoi ils ne nous ont pas vus. Ils étaient juste au-dessus de nous, ce qui est le plus étrange.

Il secoue la tête, fronçant légèrement les sourcils, il commence à comprendre en confrontant cet incident avec la rapidité avec laquelle il a voyagé. Il se marmonne à lui-même :

C'est eux.

Son fils aîné le regarde avec un air perplexe, mais ne reçoit aucune explication.


Une parcelle de quenouilles (plantes aquatiques de type roseau) se trouve dans une zone marécageuse contiguë à un ruisseau. Les touffes de quenouilles ont presque 1 m d'épaisseur, poussant là où l'eau a moins de 25 cm profondeur, leurs gousses brunes pas encore mûres, de sorte que les graines n'ont pas encore été libérées. Une grenouille est assise sur un rocher au milieu de la parcelle de quenouilles. Un bâton aiguisé sort en sifflant de la touffe de quenouille, se dirigeant vers le côté de la grenouille. La grenouille croasse.

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La casserole est recouverte d'un couvercle qui bouge tout seul, car l'eau bouillonne furieusement à l'intérieur. Une jambe de grenouille sort de la casserole, le pied et une partie de la jambe visible. Une feuille de quenouille est également collée, plâtrée contre le côté de la petite casserole.

Je sais que c'est dur. Mangez autant que vous le pouvez.

La famille est accroupie autour de la casserole bouillonnante, le plus jeune ne paraissant pas convaincu. Ils sont très sales après des jours sur la route sans bains ni vêtements propres.

Nous allons prendre les restes avec nous, alors ne vous attendez pas à quelque chose de mieux pendant un certain temps. Cela vous aidera à continuer.

Le plus jeune fils, l'air un peu découragé, met une gousse de graines de quenouilles à la bouche, comme un épi de maïs, et en prend une bouchée. Trouvant le goût tolérable, son visage se détend et il commence à manger avec délectation.


Le colonel Cage, son épouse et ses fils entrent par l'entrée de la ville dôme, trempés et fourbus, mais profondément heureux. Danny, en train de prendre un mug de café le matin avec Red. Danny se renverse du café chaud sur lui lorsqu'il secoue sa tasse à la vue de la famille entrante. Il s'étouffe et tente de parler à travers la toux.

C'est eux ! Ils l'ont fait ! Bon sang, ils l'ont fait !

Le visage ridé de Red est plissé de bonheur, mais n'arrive pas à parler. La voix de Big Tom s'épanouit, combinée à la voix de Billy qui salue la nouvelle famille.

Vous les avez trouvés! Zut! Ici, asseyez-vous, prenez mon siège.


Billy fait visiter la ville dôme aux deux garçons du Colonel Cage, tout en l'explorant lui-même. Les deux garçons du colonel Cage ont pris un bain et portent des vêtements propres. Billy utilise la tournée comme une excuse pour fouiller dans des endroits qu'il n'a pas encore explorés, espèrant qu'en utilisant une voix de guide assurée il pourra rentrer partout.

... Et ici, au niveau inférieur, ah...

Billy ouvre une porte sur le niveau sous le quartier résidentiel. Ce niveau n'a pas de patio devant les portes, ces dernières donnant directement sur une passerelle en béton puis sur la partie enherbée au centre du dôme. La passerelle forme un sentier encerclant le centre herbeux, contre le murs de ce niveau. Rien ne permet à Billy de deviner ce qui se cache derrière les portes, une étiquette sur la porte ou autre. Billy franchit effrontément une porte, et se retrouve nez à nez avec une chèvre nourrice, debout sur une station de traite.

Bêêêê

Billy s'arrête sous le choc de la rencontre, les deux autres garçons se cognant contre lui, le lot ricochant en arrière d'un ou deux pas.

Whoa!

La femme qui traite la chèvre jette un regard endormi sur les garçons, et continue sa tâche matinale. La salle est remplie de plusieurs chèvres, quelques jeunes chèvres, et un bouc temporairement attaché sur le côté. La chèvre en train d'être traite baisse légèrement la tête en regardant les nouveaux arrivants impétueux, estimant la menace. Sur le côté de la pièce, il y a une mangeoire remplie de ce qui ressemble à de la verdure visqueuse. Retrouver sa voix et son aplomb, Billy continue :

... lait de chèvre. Et nous les nourrissons, ahem. .

La femme endormie, voyant ce qui se passe, sourit à elle-même et tourne la tête vers eux.

Nous les nourrissons d'algues. Elles poussent rapidement sous la lumière vive et les effluents. Nous recyclons tout ici, y compris nos déchets.

Billy ne connaissant pas tous les termes utilisés, mais devinant en partie ce dont elle parle, reprends :

Ouais, on cultive des trucs dans l'eau des toilettes.

Jetant un coup d'œil sur le bouc, qui commence à souffler, Billy se retourne et pousse les 2 fils du colonel Cage pour ressortir.


La pièce suivante est une pièce brillamment éclairée, avec une installation de jardinage hydroponique. De longs bacs de part et d'autre de la pièce descendent en cascade le long du mur, empilés de telle sorte que le bac supérieur soit proche du mur, le bac suivant en dessous légèrement décalé par rapport au mur (de la distance du bac d'au dessus), et ainsi de suite, pour que la végétation de chaque bac puisse se développer sans entrave en hauteur. D'un côté de la pièce on a des légumes ressemblant à de la laitue ou des épinards. De l'autre côté on a la culture des fraises, qui sont remplies de fruits rouges.

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Les stolons des fraisiers (les filaments produisant de nouvelles plantes à distance de la plante mère par marcotage), pendent de chaque bac. Un homme marche le long des bacs de fraises, inspecte les stolons et coupe le stolon des nouvelles plantes qui semblent assez mûres pour se développer toute seule sans l'apport du stolon venant de la plante mère. Ces jeunes plantes ont des racines, bien qu'elles soient suspendues en l'air. L'homme tourne la tête et sourit aux garçons.

Salut les gars.

Voyant des assistants potentiels, l'homme prends son panier de collecte et se dirige vers l'arrière de la pièce, où se trouve ce qui ressemble à une pile de compost dans une poubelle. Il prend une fourche en plastique avec des dents émoussées et commence à remuer le compost. Le compost est rempli de vers de terre rouges, qui se retournent et essaient de s'enfouir dans le compost lorsqu'ils sont exposés à la lumière. Il prend une buse de pulvérisation à partir d'une applique murale et pulvérise le compost. L'eau brune est recueillie dans un bac de collecte sous le drain de compost.

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Pendant qu'il attend que l'eau s'écoule, il prend des morceaux bruns, des déjections de vers de terre en forme de serpentins moulés, et les met dans un autre panier de collecte sur le côté. Il attrape aussi les vers matures, les plaçant dans un autre panier de collecte fixé sur le côté. Il travaille rapidement - oeufs de vers de ver ici, les vers matures là. Les garçons le regardent tandis qu'il fait ces mouvements, prenant tout en note. Il dit :

Nous fabriquons notre propre solution nutritive à partir de ces lits de vers de terre. C'est le meilleur engrais du monde! Nous récoltons les vers pour les protéines aussi. Ils contiennent 82% de protéines, le saviez-vous? Nous avons mis ces oeufs dans de nouveaux tas de compost. Ils sont pleins de larves de vers.

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Voyant qu'il a soulevé l'intérêt des garçon, il leur demande :

Vous voulez m'aider ?

Les garçons disent tous, à l'unisson :

Sûr !


A l’intérieur de la ville dôme, la nuit, la lueur chatoyante du plafond s’assombrit pour simuler la nuit. Il n’y a aucun bruit si ce n’est le clapotis de la fontaine, parfois. Un écureuil grignote un biscuit salé. Des canards près de la fontaine, au centre du dôme, cachent leurs têtes sous leurs ailes. Un petit singe descend des arbres et avance dans l’herbe à grandes enjambées. Il y a des animaux sauvages ici dans le bio dôme, vivant en liberté à l’état naturel. Le plafond est éclairé par un laser situé au centre de la fontaine, qui fait luire le matériau lisse recouvrant le plafond, provoquant une lueur de nuit comme celle avec la lune et les étoiles. Les animaux sauvages, tous comme les hôtes humains, ont accepté cette nuit et ce jour comme leur monde, sans difficulté, de façon si naturelle qu’après un jour ou deux ils ne l’ont même plus remarqué.

Un Zeta se matérialise soudain au centre de la pelouse, effrayant l’écureuil qui décampe. Le Zeta est rejoint par deux autres, et tous trois se dirigent à grands pas vers l'escalier. Ils montent en lévitation jusqu’à l’étage de résidences le plus haut, plutôt qu’ils ne prennent vraiment les marches.

Ils atterrissent sur le patio.

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Les trois Zetas avancent de quelques pas, puis s'arrêtent devant une porte fermée. Bien qu'ils n'aient pas frappé ou fait du bruit, la porte s'ouvre, un Jonah endormi émergeant en pantalon de pyjama. Ils semblent tous se regarder un instant. Jonah demande :

À quelle distance sont-ils?

L'un des Zetas déplace légèrement sa main, puis Jonas panique, avec une certaine alarme dans sa voix.

Alors nous devons faire quelque chose ! Ils vont nous faire sauter ! Je sais comment ces gars fonctionnent, ils tuent tout ce qu'ils ne peuvent pas gouverner !

Un Zeta pose sa main légèrement, paume vers le bas dans un geste pour le calmer.

Je ne peux pas me calmer, tous ces gens...

Mais le Zeta change son geste pour tracer avec ses doigts un demi-cercle devant lui.

Oh, oh, d'accord, je sais que je vous ai demandé de m'aider, et si vous dites que ça marchera, d'accord, d'accord, mais, hum, mais, par le Christ, si ce n'est pas le cas, nous sommes morts.

Jonah est visiblement nerveux à propos de ce qui a été discuté.


A l’extérieur de la ville dôme, le dôme gris terne peut à peine être vu au clair de lune. Les insectes vrombissent dans la nuit d'été humide, qui est enveloppée de brume. Le général Flood et son acolyte, le minuscule et toujours con-plaisant Sergent Hammond, émergent des bois. Ils examinent la scène silencieusement, puis le général se vante tranquillement :

Nous pouvons y faire un trou sans problème, et ce sera à nous.


L'aube, à l'extérieur de la ville dôme, est brillante, causée par l'épaisse couche de poussière volcanique reflétant la lumière du soleil. Une colonne de soldats se dirige vers la ville dôme, marchant dans la terre boueuse.


Le tunnel d'entrée de la ville dôme est ouvert mais personne n’entre ni ne sort. C'est une manœuvre, invitant à l'attaque. Un hélicoptère apparaît, et une voix tonitruante et impérative se fait entendre à travers un mégaphone :

C'est les forces armées de votre pays qui parlent. Permettez à nos équipes d'inspection d'entrer ou vous en subirez les conséquences. Envoyez vos dirigeants avec un drapeau blanc pour indiquer que vous comprenez ces ordres.

L’hélicoptère vole lentement en cercle, bien au delà de la circonférence du dôme. Au début, il n'y a pas de réponse de la part de l'intérieur de la ville dôme, mais ensuite Jonah émerge, avec le colonel Cage, Big Tom, et les deux soldats qui ont désertés avec le colonel. En se montrant, les 3 anciens soldats savent qu'ils vont mettre le général Flood fou de rage, car le général ne supporte aucune insubordination. A l'intérieur de l'hélicoptère, le Général Flood a en effet le visage rouge de rage. Il gromelle pour lui-même et le pilote :

Il va mourir, et mourir lentement.

Puis, parlant à travers l'interphone, il aboie à ses hommes au sol :

Mettez le missile en place, pour qu’ils le voient.

Un missile effilé et monté sur roues émerge des bois, poussé par 6 soldats. Plusieurs autres soldats émergent aussi des arbres, puis s'alignent le long des bois. Ils ne sont pas habillés en uniforme. Certains ont des bandanas attachés autour de leur tête, d'autres ont les cheveux longs attachés derrière la tête en queue de cheval, d'autres ont peint leurs visages, d'autres portent de longs couteaux à machette, mais tous portent des pantalons de treillis et des bottes militaires. Ce n'est clairement plus une troupe militaire formelle.

Quelque chose d'invisible se déplace dans l'herbe, comme si un mur coulissant était en train d'être mis en place. L'herbe s'aplatit et se sépare, comme si un mur invisible avait été mis en place. Cette ligne se déplace rapidement, avec le son lancinant des lames de l'hélicoptère au-dessus.

Cage, j'aurai ton foie pour souper, et je te creverai les yeux!

A l'intérieur de l'hélicoptère, General Flood aboie les ordres par l'intermédiaire de l'interphone :

Sortez l'otage maintenant, et abattez-le.

Len est poussé vers l'avant, les mains liées devant lui et un œil tuméfié, poché pendant une crise de rage du général Flood lors une séance d'interrogatoire. Il trébuche d'épuisement et chancelle, mais est poussé vers l'avant jusqu'à mi-chemin entre les représentants de la ville dôme et la troupe militaire. Clara se tient à l'intérieur du tunnel d'entrée, juste au bord, et regarde la scène. Ses yeux se remplissent de larmes et sa main flotte sur sa bouche, mais elle ne dit rien, et retient son souffle, sachant qu'elle ne peut rien faire pour influencer le résultat. Netty met son bras autour de l'épaule de Clara. Red se tient derrière les 2. Habitué à prendre des mesures en cas d'urgence, mais incapable de le faire dans ce cas de figure, impuissant, il a un regard consterné sur son visage. Un coup de feu retentit, et voir Clara s'évanouit. Red s'avance pour la retenir, et ils tombent tous les deux sur le sol en tas.

À l'intérieur de l'hélicoptère, le général Flood souffle avec arrogance dans le mégaphone.

Le reste d'entre vous a cinq secondes pour lever les mains et laisser mon équipe d'inspection entrer, ou nous allons faire sauter votre petit nid et envoyer au ciel tous les petits oisillons à l'intérieur ! Cinq secondes ! Cinq, quatre, trois, deux, Un.

Le Général Flood fait une pause, les muscles de son visage tressautant avec rage, fou de haine d'avoir été défié.

...Très bien les mecs, chopons les !

Le groupe qui se tient devant la ville dôme reste impassible, imperturbable. Ils s'étaient attendus à ce que les deux hommes détenus par le général Flood aient été tués, alors la mort de Len n'a pas été une surprise. Ils sont conscients de la présence du bouclier et qu'ils aient confiance en lui ou non, dans leur esprit ils n'ont pas d'alternative. La mort, pour eux et leurs familles, vaut mieux que d'être capturé par ce groupe. C'est pourquoi la porte d'entrée a été laissée ouverte, de sorte que si le bouclier échoue, tout le monde mourir rapidement, comme un groupe soudé ne faisant plus qu'une seule entité. Big Tom, parlant doucement à ses camarades, montre leur détermination.

Mieux vaut ça que de vivre sous la tyrannie, hein, les gars?

Le missile bourdonne, un flash apparaît à l'extrémité du réacteur, puis le missile part si vite que l’œil ne peut le suivre. Tout aussi soudainement, il heurte un bouclier invisible et l'explosion se propage en arrière sur les hommes et les arbres, une boule de feu sortant en éventail, grillant tout sur son passage. Il y a un cri ou deux, mais la mort est rapide. Au fur et à mesure que les flammes s'éteignent rapidement sur les éclats de métal du missile brisé, les pales de l'hélicoptère continuent de se faire entendre au-dessus de leurs têtes. Les muscles du visage de General Flood s'agitent. Le général ordonne au pilote :

Descendez et atterrissez leur dessus!

Le pilote jette un coup d'œil nerveux sur le visage du général, et voyant qu'aucun argument n'y pourra rien, il déplace le joystick pour faire descendre l'hélico. L'hélicoptère descend, frappe la barrière invisible et explose en débris incandescents. Le groupe debout devant la ville dôme peuvent respirer à nouveau. Les citoyens de la ville dôme s’avancent, prudemment au début. Ils regardent à droite et à gauche, bouche bée devant les dégâts. Martha se précipite pour embrasser son mari, suivi par le fils aîné du colonel Cage, qui jette ses bras autour de son père par derrière, essentiellement en serrant ses fesses. Ian a un air de soulagement sur son visage. Il se tourne rapidement vers le côté et vomit, se permettant de ressentir sa peur maintenant que le danger est passé.

Nouveaux voisins

s

Danny, Netty, Billy et le garçon hybride sont debout dans un cercle au centre d'une pièce circulaire sans fenêtres, la pièce principale d'un vaisseau Zeta. Il y a aussi quelques grands Zetas et quelques petits Zetas de couleur beige, qui sont à peu près aussi grands qu'un enfant. Les grands Zetas sont avec les adultes, bavardant et faisant des gestes. Les enfants discutent avec les plus petits Zetas. Les petits Zetas, ces derniers gazouillent comme des oiseaux entre eux de temps en temps au cours de la discussion. Billy dit au garçon hybride :

...les vers se tortillaient dans tous les sens, si bien que tu ne savais pas où ils allaient, mais je n’ai pas eu peur !

Le garçon hybride met ses mains sur ses hanches et se penche un peu en arrière.

Ils ne se tortillaient pas, idiots ! Ils marchaient ! Tu n’y connais donc rien ?


C'est le soir dans la ville dôme, et les lumières venant du bord du dôme sont tamisées lentement pour simuler la soirée. Les résidents se déplacent lentement en faisant leur balade du soir autour de la zone de promenade sur le toit de l’étage supérieur. Les enfants sont rappelés, ils doivent arrêter de jouer dans la zone herbeuse du centre près de la fontaine, et ils protestent un peu mais c’est bientôt l’heure pour eux d’aller au lit. Danny et Netty marchent lentement le long de la promenade, main dans la main. Netty lève les yeux vers le visage de Danny.

Tu ne veux pas aller le voir? Tout le monde ne reçoit pas d'invitation.

Danny répond, doucement, presque pour lui-même.

Enfer ouais!


Plus tard dans la soirée, après que la nuit soit tombée aussi bien dans le dôme qu’à l’extérieur, Danny émerge de l’entrée de la ville dôme. Il marche seul vers un vaisseau observatoire qui plane juste au dessus du sol à quelques mètres de l’entrée du dôme. Il marche exprès à grandes enjambées. Comme il s’approche du vaisseau, Netty et Billy émergent en pyjamas et robe de chambre, courant après Danny. Ils réduisent la distance qui les sépare, de sorte qu’ils sont tous ensemble en arrivant au vaisseau. Une rampe d'accès descend du côté du vaisseau, la lumière intérieure du vaisseau éclairant toute la zone. Les trois montent rapidement la rampe en marchant, sans peur. Le vaisseau émet une légère lumière depuis le centre de sa partie supérieure. En effet, la moitié de la partie supérieure et de la partie inférieure du vaisseau est un vitrage en verre brun transparent, qui permet aux gens dedans de voir dehors et inversement, aux gens dehors de voir dedans.

s

À l'intérieur du vaisseau, Danny et Netty émergent d'un couloir qui entoure la pièce centrale du navire, à travers une ouverture en forme d'arche qui va directement dans la pièce circulaire au centre du vaisseau. Des chambres individuelles sont situées le long du bord extérieur du vaisseau. Danny et Netty sont la main dans la main, Billy marchant avec impatience juste devant eux. Ils s'assoient tous côte à côte autour du cercle d'observation, Netty tenant toujours la main de Danny, parce qu'elle sent qu'il est nerveux. Billy pointe le doigt vers le sol puis le plafond, parlant avec enthousiasme alors que le navire se retourne sur le côté, montrant la ligne d'horizon à travers le plafond et la vitre d'observation au sol, sans que l'attraction de la gravité pour les passagers n'aient changée, toujours dirigée vers le plancher du vaisseau.

C'est trop cool!

Danny lève les yeux et regarde juste en haut, silencieusement, ne bougeant pas pendant un moment. Puis il demande, l'émerveillement dans sa voix.

Comment font-ils cela?

Netty se tourne pour lui faire face.

Le vaisseau est sur la tranche.

Billy gazouille, avec sa voix aiguë d’enfant, excité comme toujours par ces voyages, mais contenu quand même. Il sent que, malgré son âge, il est le leader ici, et qu’il doit rester calme pour ce couple qui a besoin de lui.

Nous pouvons même aller à l'envers! C'est trop cool!

Billy pointe du doigt le plafond alors qu'il dit ça, puis pointe vers le sol.

Regardez, regardez! Nous décollons!

Le vaisseau se déplace latéralement dans les airs, d'abord lentement, puis prenant rapidement de la vitesse de sorte qu’il fonce dans l’espace en oblique par rapport à la Terre.


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Le brouillard fait des volutes autour d'un rebord rocheux. Danny, Netty et Billy sont debouts, détendus et regardant autour d’eux.

Ça pourrait être n'importe quoi. Ça pourrait être une pieuvre. Ca pourrait être ... Ouais! C'est une pieuvre!

Une grande pieuvre de couleur orange, levée à mi-hauteur sur ses nombreux tentacules, approche. Il n'a pas d'oeil, elle semble lisse et sèche, et le dessous de ses tentacules est d’un blanc crème. Billy met les mains sur ses genoux et se met face à face, si l’on peut dire, avec la pieuvre.

Est-tu le même gars à qui j'ai parlé la dernière fois?

La pieuvre sort de la partie inférieure de son corps ce qui semble être un ver de terre rose, et Billy tend le bras sans hésiter pour laisser la tentacule parlante s’enrouler autour de sa main.

Topons la.

Danny et Netty sont restés choqués pendant cet échange enthousiaste entre Billy et la pieuvre amphibie. Finalement, Danny trouve sa voix.

Qu'est-ce qu'elle dit?

Danny Danny fait un pas en avant, d’abord avec peine, puis il prend de l’assurance.

Comment entendez-vous ce qu'il dit?

Billy recule, ayant lâché le tentacule.

Vous l'entendez mieux quand vous topez.

Danny hésite une minute, puis tend spontanément la main pour être enveloppé dans le ver rose. Après un moment, il discute.

Oui, nous sommes tous du même endroit, juste en visite. Vous vivez sur les rochers ici?


s

Billy grimpe sur des rochers dans un endroit sec et rocailleux. Il parle à Netty qui suit de près :

Et tu ne peux jamais savoir! Une fois que croyais que c’était un rocher, et voilà qu’il s’est mis à bouger ! ..

Netty est juste derrière lui, Danny étant en retard, si bien que sa tête n'apparait que maintenant, regardant autour de lui avant de s'aventurer plus avant. Ne voyant rien d'alarmant, Danny comble le fossé entre eux pendant qu'ils redescendent l’éboulis de rochers. Soudain, Billy s'arrête, Netty se heurtant à lui, puis ils attendent tous les deux sans rien dire. Danny arrive derrière eux, lentement, regardant dans la même direction. Tous sont silencieux pour un moment. Finalement, Billy rompt le silence :

Ces gars sont nouveaux.

Deux petits hominoïdes, avec des plaques épineuses comme la peau d'une tortue qui leur recouvre le corps, se tiennent devant eux, à plusieurs mètres de distance. Ils portent de petits manteaux bruns, sont bruns eux-mêmes et sont pieds nus. L’un des deux est plus petit que l’autre, il lui arrive aux épaules. Soudain, un grand Zeta se matérialise entre le couple et les 3 visiteurs, faisant signe au couple de se rapprocher, ce qu'ils font. Netty semble s'animer, comprenant soudain ce que l’un des deux, la femelle, est en train de dire, le Zêta traduisant télépathiquement pour eux. Netty est penchée vers elle.

Seulement la nuit ? Comme c'est triste pour vos enfants ! Est-ce qu'ils ..

Netty se tait tandis que l'hominoïde femelle ressemblant à un crapaud cornu grogne tranquillement. Netty dit,

Oh .. bien .. c'est vrai .. on traite le feu de cette façon ..


À l'intérieur du vaisseau, une grande boule vivante remplit presque tout l'intérieur du vaisseau. Il a des veines sur sa surface, mais entre les veines on peut voir du liquide au centre. Cela ressemble à un ballon d'eau vivant. A l'intérieur on peut voir quelque chose ressemblant à des méduses, très fines et virevoltante. Pas le genre de méduse solide avec une cloche sur le dessus qui peuplent les océans de la Terre, mais plutôt comme une masse de spaghettis. Billy s'avance et touche le côté du ballon d'eau vive, qui s’enfonce sous la pression comme le ferait la peau.

Génial !

Les méduses se dirigent vers le doigt de Billy, et son visage prends un air extatique, en communication avec la créature aquatique. Il regarde par-dessus son épaule et dit à Danny et Netty :

Il veut que je vienne nager avec lui.

Tout à coup, Billy disparaît, ses vêtements tombant sur le sol en un tas. Netty a le souffle coupé et montre du doigt le ballon d’eau vivant, en voyant Billy nu dans l’eau du ballon vivant, qui regarde fixement Netty. Ses poumons fonctionnent manifestement dans l’eau, il respire l’eau. Netty s’évanouit pendant que Danny, consterné, se jette sur elle pour arrêter sa chute.


Le vaisseau d'observation est conçu pour avoir les occupants serrés autour du plancher de verre et du plafond, mais a aussi des salles privées. Celles-ci entourent le vaisseau sur le périmètre, chacune avec une entrée en forme d'arche, sans porte. La salle d'observation centrale est délimitée par un mur en face des chambres privées, de sorte qu'aucune vue directe sur l'une des chambres privées n'est possible depuis la salle d'observation. Danny a emmené Netty dans l'une de ces pièces, si peu meublées que seule une table avec un poteau central pour le soutenir se trouve dans la pièce. Netty est allongée sur cette table, revenant à elle. Billy a de nouveau son pyjama, essuie ses cheveux mouillés et passe ses doigts dans ses cheveux pour le mettre en place, comme un peigne. Billy lève les yeux vers Danny :

Elle va mieux que ma mère. Ils ont dû la renvoyer.

Netty se concentre sur Billy, un regard confus sur son visage.

Je pensais que tu étais en train de se noyer .. Je pensais .. Je ..

Sans hésiter, Billy répond :

Nah! Vous pouvez respirer ce genre de choses, mais ce n'est pas facile! Tu dois être forte, Netty! Ma Maman n’a rien compris à ça.


Sortant de la pièce où Netty se remettait, les trois rencontrent un buffet de divers légumes cuisinés aux formes étranges qui a été installé sur le côté, des amuse gueule à volonté. Billy n’hésite pas, il y va droit et pique quelque chose qu’il porte à sa bouche avant que les autres ne le remarquent. Il se retourne et regarde les deux autres par-dessus son épaule, ses joues gonflées de nourriture et mâchant bruyamment avant d’avaler. Netty dit :

Oh c'est gentil! On dirait un peu comme des asperges, mais, ahem, marron.

Netty grignote un morceau, et Danny met aussi ceci et cela à la bouche, roulant les yeux au plafond en goûtant, afin de se concentrer sur le goût. Il accélère le mouvement en réalisant que ce n’est ni toxique ni mauvais, et commence à piquer des morceaux qu’il porte à la bouche l’un après l’autre. Ils sont tous affamés. Netty se lèche les doigts en se retournant pour scanner l'intérieur du navire. Puis elle regarde à travers les vitrages de verre brun clair du plafond et du plancher. Elle commente, avec crainte :

Oooh, c'est comme de la barbe à papa !

Danny et Billy suivent son regard et voient des nuages et des bouffées de fumée illuminés de bleu et de rose et de la lumière jaune qui flotte autour du vaisseau comme si le vaisseau était immobile et que les nuages passaient à côté. Soudain, ce qui ressemble à une raie manta sans son aiguillon vient flotter à côté, mais bat des ailes afin de rester face à la vitre du plafond, regardant à l’intérieur les trois passagers du vaisseau. Le navire plane, incliné sur le côté, au-dessus de la surface d'une planète, pour que ce soit plus commode pour la raie manta d'observer les passagers. Ils sont tous dans la crainte, mais finalement Billy transmet un message télépathique :

Il veut entrer, mais il ne peut pas! Il mourrait ici, et nous mourrions en dehors. C’est con.

Le navire décolle soudainement de sorte que l'horizon de la planète de barbe à papa apparaît rapidement. Puis la planète se rétrécit rapidement et devient aussi petite qu'une balle de golf, éclairée d'un côté, l'autre côté étant dans l'ombre. Tout aussi soudainement, le vaisseau revient en arrière, mais cette fois revient sur le côté obscur (nuit) de la planète. La triangulation est le moyen le plus rapide d'aller d'un point à un autre, dans un vaisseau spatial non limité à la propulsion. Danny est aussi dans la crainte :

Mon Dieu, un boomerang parfait! Quelle façon de voyager!

Alors que le vaisseau se déplace dans le côté obscur de la planète, il apparaît d'abord que tout est noir comme dans un four. Puis les trois voient des lumières clignotantes, de toutes les couleurs, et une des lumière se dessine près de la vitre du plafond, prenant la forme de la créature qui les a visité du côté jour/lumineux de la planète de barbe à papa. La raie plane, faisant battre les membranes de ses ailes et émettant aussi des pulsations de lumière, une créature sans yeux ni oreilles ni appendice mis à part ses membranes en forme d’ailes comme celles d’une raie manta. Netty s'approche de Danny, qui passe son bras autour d'elle alors qu'elle pose sa tête sur son épaule.


De retour à la ville dôme, Danny, Netty et Billy entrent par l'entrée principale. Il est très tôt le matin, la ville est toujours endormie et calme. Billy se dirige vers les quartiers de la famille, en train de dire au revoir sans mot dire, et Netty et Danny, trop fatigués pour faire plus que sourire et faire demi-tour, rejoignent leur chambre ensemble.


Martha ramène un plat de ce qui semble être des œufs brouillés et des pommes sautées à l’une des tables installées pour le petit déjeuner sur l’aire de promenade. Un chef en chapeau de cuisinier et tablier blanc fait des bruits métalliques avec des casseroles et des poêles au dessus d’une plaque électrique qui grésille, les bras constamment agités en oeuvrant à ses merveilles. De temps en temps il attrape des herbes dans une jarre ou un sac. Big Tom sirote un café dans un mug et Tammy rigole avec sa nouvelle amie alors qu'elles essaient d'amener leurs poupées à s'asseoir directement sur le banc à côté d'elles. Billy est à moitié endormi, il cligne des yeux endormis qui ne veulent pas rester ouverts, ne disant rien, contrairement à sa nature enjouée et gaie habituelle. Red et Clara s'effondrent dans leurs robes de chambre, ne cachant plus le fait qu'ils passent leurs nuits ensemble. Martha jette un coup d'œil à Billy avec un regard perplexe sur son visage, taquinant Billy :

Billy? Je pense que tu dois retourner au lit, mon fils, tu as l'air d'avoir besoin d'une bonne nuit de sommeil.

Sans hésitation, Billy répond :

Oui, OK maman.

Billy traîne, laissant Martha bouche ouverte.

Je plaisantais!

Jonah marche avec Ian et son assistante aux cheveux gris. Tous les trois sont sinistres, comme s'ils se concentraient sur une affaire sérieuse mais pas alarmante. Martha a une carafe de café de la cafetière commune, avec des mugs supplémentaires, et leur offre du café. Ils acceptent avec un hochement de tête. Après une ou deux gorgées, Jonas, qui a médité solennellement sur ses pensées, confie :

Nous avons entendu parler d'une autre ville, comme la nôtre. Ils semblent être amicaux, semblent bien se débrouiller, mais il y a quelque chose d'étrange ...

Martha secoue la tête soudainement, alarmée.

étrange?

Jonah discute avec lui-même pendant un moment ou deux avant de continuer.

Eh bien, je ne pense pas qu'ils soient entièrement humains.

Martha est clairement soulagée que ce soit les seules nouvelles potentiellement mauvaises.

Vous voulez dire comme ces enfants super intelligents que nous avons ici avec nous?

Jonah se réchauffe et est impatient de parler d'une question qu'il sait qu'ils devront partager tôt ou tard.

Eh bien .. laissez-moi juste dire ceci ... la transmission que nous avions portait à la fois audio et vidéo, mais ils ne parlaient pas. Nous avons reçu le signal par télétype. Et dans la vidéo, ils sont tous restés là, souriants et agités, mais sans parler. Maintenant pourquoi serait-ce ... à moins qu'ils ne puissent pas parler.

Martha fronce les sourcils et regarde pendant un moment, les possibilités de traitement.

Ont-ils donné des indications .. Je veux dire .. a-t-il l'air que peut-être le micro a été cassé ou .. peut-être, ah ..

Jonas est en train de se lâcher et de tout révéler librement maintenant.

Non, non, et ce n'est pas tout. Ils avaient de petites bouches et pas de cheveux. Pas de cheveux du tout! Mais à part ça ... eh bien, ils avaient de gros cerveaux, on pouvait voir ça, de grands yeux aussi ... bleu et brun et noisette ... de beaux yeux, je dirais ça! Mais pas un cheveu sur la tête! Et pas un mot!

Martha sourit, soulagée et attendait évidemment quelque chose de beaucoup plus bazar.

Alors ... les avez-vous invités à souper?

Tout le monde rit. Jonas sourit et est également soulagé de sa réaction.

Ben ouais! Que devais-je faire d'autre? Comme ça peut être étrange! Je veux dire, au-delà de ce que nous avons déjà eu affaire !

Jonah sourit ironiquement à Big Tom.


Plus tard dans la soirée, lorsque les lumières reflétées par le plafond de la ville dôme s'obscurcissent, la ville dôme reçoit des visiteurs. Derrière le garde-corps longeant le niveau supérieur, près de l'entrée, de grands Zetas gris foncé se tiennent à côté de quelque chose qui ressemble à un grand ver vert avec deux grands yeux de marionnettes en haut de la figure et une tentacule se balançant.

monstre

Le dos large de ce qui ressemble exactement à la créature dans le vieux film d'horreur américain "la créature de la lagune noire" se profile derrière eux

smiley

Puis la main verte ronde d'un petit homme vert vêtu d'une blouse bleu foncé surgit au-dessus de la balustrade, alors qu'il se lève pour mieux voir. Il regarde vers le centre de la coupole, son visage rond reflétant un sourire aussi large et simple qu'un symbole smiley "ayez une belle journée".

Il n'y a guère de mouvement dans la ville dôme, juste une ou deux personnes se déplaçant le long de l’un des patios, retournant vers une chambre à coucher. C'est Billy qui essaye de rentrer à la maison avant d'avoir un cri de rappel de sa mère. Il est la dernière personne à quitter le parc. Il passe devant la fontaine et entend une faible éclaboussure. Billy jette un commentaire sur son épaule, ne regardant même pas dans la direction de la fontaine.

Pas de baignade dans les fontaines, les gars.

Une grande pieuvre orange sans yeux surgit de l'eau de la fontaine et s'assied sur le bord de la fontaine, secouant l'eau sur ses tentacules.

Fin.

Différences par rapport à la version française de 1997

Ajouts

Les principales différences avec la première traduction sont une meilleure cohérence de l'histoire, des contacts Zetas-contactés apparaissant plus tôt dans le récit, une description plus complète des signes de Nibiru avant les cataclysmes, ajout de détails sur la survie comme la description de la première chasse-cueillette du groupe, la réalisation d'un feu de camp en frottant des bâtons, la description de la cuisine de nourriture sauvage, des astuces des groupes de survie pour organiser du confort ou fabriquer des savons, construction d'un tracteur au gazogène, ou encore la descritpion du groupe avec les maisons flottantes.

Retraits

Des scènes ont été coupées. Je pense qu'elles peuvent avoir leur importance, je les reproduit ci-dessous.

Scène de cannibalisme

Il n'y a plus la description de ce qu'ont subi les cadavres trouvés lorsque le groupe en tranhumance tombe sur des restes de cannibalisme. Dans cette page j'ai rajouté vite fait un commentaire parlant de ça pour qu'on comprenne, mais c'est vrai que la version d'origine était plutôt glauque :

Des vêtements sont éparpillés, une chaussure d’enfant. Une main d’enfant est sur les restes carbonisés de ce qui a dû être un grand feu, agrippée à ce qui a dû être une braise, les doigts plantés dessus, la douleur et le désespoir dans sa tentative de ramper hors du feu brûlant ayant été sans doute plus forts que d’enserrer un charbon ardent. Le reste du corps est dans le feu, réduit en cendres. Danny, Gros Tom, le Colonel Cage et Netty sont debout près du feu réalisant la scène, le visage sombre. Le Colonel Cage rompt finalement le silence. « Ils étaient vivants quand on les a jetés au feu. J’ai entendu dire qu’il se passait de ces choses. » Le corps calciné d’un enfant d’environ un an est près du feu, le crâne ouvert et le cerveau dévoré. On a pris sur le père mort la chair des cuisses et des épaules, et son épouse, morte aussi a été jetée face contre terre, la robe retroussée au dessus de son arrière train levé, et elle a servi de toute évidence à les satisfaire pendant qu’elle mourait, plutôt que comme repas.

Scène avec la meute de chiens errants

Disparition aussi de l'épisode où Netty est mordue par la meute de chiens, est transportée évanouie sur un linge par 2 personnes pendant que Red se tape 3 bagages jusqu'au dôme. Disparition du coup de la description de l'infirmerie Zeta et de Netty et Billy qui tombait amoureux à ce moment-là. Mais cette "péripétie" rajoutait pas mal de lourdeur à l'histoire qui se traîne déjà pas mal à la fin...

Netty atteint Billy et le soulève du sol dans ses bras, juste au moment où le chef de meute se jette sur lui. Il lui plante les crocs dans les fesses et elle lui rejette la tête en hurlant, les autres chiens de la meute se dispersant dans les bois dans la panique. Red et Danny arrivent en courant, Red donnant des coups avec sa veste au chef de meute qui bat en retraite, et Danny se précipitant sur Netty qui tombe à terre évanouie. Billy, en petit homme qu’il est, sort de ses bras et tourne autour pour apporter son aide. Il parle avec excitation. « Il l’a mordue aux fesses, en plein dans les fesses. Mince, elle est arrivée de nulle part! »

...

On porte Netty dans une écharpe, entre Danny et la grosse cuisinière Madge, qui a beaucoup de muscles sous la graisse, semble-t-il. Frank les suit, portant leurs bagages collectifs comme un bât. Il ne se plaint pas, mais il bavarde à propos de diverses situations dans la mythologie ou autres cultures qui ressemblent à la scène, pour s’expliquer pourquoi sa nouvelle chérie est la bête de somme alors qu’il n’est que le bât. L’ego masculin a survécu intact au basculement des pôles, semble-t-il. Netty est rose et bouffie, fiévreuse, et semble inconsciente ou endormie. Frank dit, « Et les Cherokee permettent même que leurs femmes deviennent Grand Chef. »

... [Lors de l'entrée du groupe de Ian dans le dôme :]

Gros Tom et Danny font finalement entrer Netty sur l’écharpe qu’ils tiennent chacun d’un bout, Rouge leur fermant le pas avec tous les bagages qu’ils auraient dû porter à trois. Un homme et une femme se précipitent sur eux, qui pratiquent de toute évidence la médecine, et ils s’affairent à tirer Netty sur le côté, vers un Poste de Premiers Secours au niveau de l’entrée.


Au Poste de Premiers Secours, Netty est allongée sur une table où on examine la morsure infectée de ses fesses. Danny reste auprès d’elle, debout sur le côté et l’air inquiet. Gros Tom et Rouge retournent voir leur famille, voyant que Danny s’est porté volontaire pour la surveiller. Netty est toute rose et inconsciente, elle est bouffie et sa respiration est rapide. Elle est couchée sur le côté droit, sa fesse gauche à l’air, un rouge agressif dû à l’inflammation entourant les points de morsures. Le couple qui dirige le poste des premiers secours se parlent à toute vitesse. « Piqûre de pénicilline, et il faut la mettre en chambre froide pour faire tomber la fièvre. »

... [Juste avant que Jonah ne présente l'enfant hybride à Danny et au colonel Cage]


Netty flotte dans la chambre de refroidissement de la pièce des Premiers Secours, reprenant conscience maintenant que sa fièvre a baissé. Son visage qui était rose et congestionné est à présent pale, et ses yeux sont à peine ouvert. Elle réalise qu’elle est nue dans l’eau, et que Danny lui tient la tête afin quelle n’ingère pas d’eau. Danny ne sait pas qu’elle est consciente. Le couple qui tient le poste des Premiers Secours font des allées et venues, se préparant à la transporter sur un lit de camp. « Ca va aller, j’ai déjà vu cela avant, elle est aussi saine que les autres, et elle va s’en sortir. » L’homme plonge les mains dans l’eau et incline les hanches de Netty pour inspecter l’enflure. « Ca diminue. Encore 15 minutes. » Il jette un coup d’œil à Danny et dit, « Surveillez la pendant que nous préparons tout. » Disant cela, le couple quitte le poste de Premiers Secours.

Voyant qu’ils sont seuls, Netty parle. Danny, qui ne pensait absolument pas qu’elle était redevenue consciente, réagit en ouvrant grand les yeux. « Cela fait combien de jours? » « Seulement 3, mais tu t’es vite évanouie. C’est drôlement courageux ce que tu as fait là. Tu as sauvé la vie à Billy, c’est sûr. » Netty veut des détails, « Comment va… » Mais Danny va au devant de sa question, sachant ce qu’elle va demander, et l’interrompt « Oh, il va bien, pas une égratignure, c’est toi qui as tout pris, tu… » et trop ému, en se souvenant de l’incident, il s’arrête. Juste à ce moment, le couple rentre à nouveau dans la pièce et sourit à Netty, la voyant réveillée. « Votre chambre est prête si vous êtes prête à sortir du bain. »

Scène avec l'abduction de Danny et Netty

Une fois le général Flood mort, Netty et Danny montent dans un vaisseau spatial, c'est là que l'histoire du temps manquant au camping trouve son explication : Danny à été abducté, Danny rencontrait Netty en avance dans un vaisseau Zeta mais sans qu'aucun des 2 ne s'en rappellent. Les explications sont un peu décousues, mais on n'a plus accès qu'à la traduction française de l'époque.

[Début du chapitre "Nouveaux voisins"]

Plusieurs résidents de la ville dôme, les chefs, grouillent dans un cercle situé au centre d’une pièce circulaire sans fenêtres, la pièce principale d’un vaisseau Zêta. Le groupe comprend Jonah, Ian, l’assistante grisonnante de Ian, le Colonel Cage, Danny, Netty, et plusieurs enfants : Billy et les enfants hybrides. Il y a aussi plusieurs grands Zêtas et une flopée de petits Zêtas beiges, qui sont à peu près de la taille des enfants. Les grands Zêtas se mélangent aux adultes avec lesquels ils communiquent, pendant que les enfants humains et les Zêtas plus petits restent en périphérie à regarder, pour l’essentiel.

Netty jette un œil à Billy et dit à Danny, « Nous sommes déjà venus là. » Danny est étonné de cette déclaration, il cligne des yeux et sa mâchoire tombe légèrement, et dit, « Mais, mais, tu n’en a jamais rien dit. Pas un mot! » Il est maintenant agacé, regarde le sol puis fixe à nouveau Netty, la colère sous-jacente étincelant dans ses yeux. « Je veux dire, si tu t’étais baladée dans tout l’univers, c’est le genre de chose que tu aurais sûrement dit avant, mince alors! » Netty dit tout bas à Danny, car les autres se sont mis à observer leur échange, « Oh, Danny, tu ne sais pas? Tu ne te souviens de rien après, en tout cas pas de mémoire. Ca n’est enregistré que par ton subconscient, donc en ton cœur et au plus profond de toi tu connais chaque détail, mais quand tu es ramené sur Terre .. Tu sais .. Le temps manquant! »

Danny fronce légèrement les sourcils, essayant de comprendre, et dit, « Comment font ils ça? » et tournant les yeux vers un grand Zêta, « Comment faites vous cela? » Le grand Zêta bouge la main et ses longs doigts de haut en bas pour accompagner sa réponse télépathique. Danny regarde intensément le visage du Zêta, et chuchote, comme s’il comprenait quelque chose pour la première fois. « C’est un peu comme la chambre et le salon. » Un large sourire se dessine lentement sur son visage alors que ses yeux restent fixés dans ceux du Zêta. « Ouais, on ne laisse pas rentrer n’importe qui dans la chambre. Bien sûr! Si ce sont des étrangers, on leur en empêche l’entrée, c’est plus convenable. Mais tout se passe dans la chambre. OK, j’ai compris. »

[Ensuite retour à les description des petits zetas gazouillant avec les enfants]

... [Un peu plus tard, alors que Netty et Danny marchent dans la main avant d'aller voir le vaisseau]

Danny et Netty marchent lentement le long de la promenade, main dans la main. Danny dit, « Je ne sais pas si je veux le croire ou pas. » Il regarde timidement du côté de Netty. « Tu m’as mis ce truc devant les yeux et j’ai tout revu en rêve, c’est ça? De l’hypnose. Hum! » Après une pause, il dit, « Mais je vais te dire ceci. Ca m’a vraiment paru réel! » Netty tourne les yeux pour le regarder et dit, « Tu ne veux pas qu’on aille voir ça? » Danny répond tout bas, dans sa barbe, comme s’il se parlait à lui-même, « Enfer, ouais! »

Page suivante : la maison flottante (la péniche)

Retrouvez dans la page suivante le livre 2 de Nancy Lieder, où l'auteur développe le concept de ville flottante entraperçu dans cette page.


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